Lymerya Alley.
Rien que le nom était déjà des plus anormaux.
Alors si, en plus, elle voyait des évènements inexplicables et surnaturels autour d'elle depuis son enfance, on pouvait déjà s'imaginer que sa vie ne serait pas des plus communes.
Pourta...
« J'aurais dû faire plus attention », songea-t-elle, déçue par sa propre faiblesse.
La pointe de l'épée noire lui piquait la peau du cou, et elle sentit du sang perler à cet endroit. Elle serra les poings. Elle avait perdu Prysm dans sa bataille, et, de surcroît, elle avait trop mal à l'épaule pour se servir de ses pouvoirs correctement – la douleur l'aveuglait et retirait toute bribe de concentration qu'elle aurait pu obtenir. En plus, la pierre noire dans laquelle étaient taillées les xiphoskias avait le don d'atténuer les dons télékinésiques de tous ceux qui n'étaient pas leurs propriétaires. Elle était donc totalement incapable de se défendre, alors que Loki était en pleine possession de ses moyens.
Loki quitta sa parure de Nyx pour redevenir l'adolescent ordinaire qu'il avait vu plus tôt, mais cette fois, ses traits étaient détendus et il faisait preuve d'un calme olympien. Il n'y avait plus aucune trace du petit garçon effrayé qu'elle avait vu plus tôt. Décidemment, il savait jouer la comédie, presque aussi bien que Larrow, même.
- Tu te bats bien, observa-t-il d'une voix très calme, loin des balbutiements de garçon terrifié.
- Wow ! Sympa de me le faire remarquer ! Ce commentaire va révolutionner ma vie. C'est-à-dire les dix minutes qu'il me reste probablement. Youpi !
Il semblait osciller entre l'agacement et l'amusement.
- Ah, tu es l'une des sarcastiques.
- C'est bien moi. Enchantée.
Elle tendit la main vers lui, faisant mine de vouloir la lui serrer, mais il ne fit que réaffirmer sa prise sur son épée et elle dut la rebaisser.
Si Shay avait été là, il aurait protesté en s'autoproclamant le plus sarcastique de tous les Dragomirs. Mais il serait fier d'elle – elle faisait de l'humour aux portes de la mort, ce qui était un comportement purement à la Shay. Elle se demanda alors si elle le reverrait un jour.
- Comme je le disais, tu es douée pour te battre. Tu ne voudrais pas rejoindre l'Empire, par hasard ?
- C'est sûr que c'est mon rêve, répliqua-t-elle d'un ton moqueur. Surtout depuis que l'un d'entre eux me menace avec son épée.
Il leva les yeux au ciel sans retirer sa xiphoskia de sous son cou. Il indiqua d'un geste du menton son épaule meurtrie.
- Tu es blessée.
- L'œuvre de l'un de tes copains.
- Tu devrais aller chercher un médecin, ou ça risque de s'infecter.
- C'est sûr qu'un médecin me sera très utile quand je serais morte.
Loki semblait se retenir de la trancher en morceaux, et elle eut un petit rire ironique. Comme sa gorge se soulevait à cause de son rire, un filet de sang se mit à couler de son cou. Semblant en prendre conscience, l'autre retira son épée et recula d'un pas. Elle haussa les sourcils, surprise. Elle s'était déjà imaginé sa mort. Shay, Larrow, Kosh et Elyra qui retrouveraient son corps sans vie au milieu de la forêt, et qui se demanderaient ce qui lui était arrivé. Mais de toute évidence, Loki ne semblait pas partager ses scenarii dramatiques.
- Quoi, tu me tues pas ?
- Tu es tellement énervante que j'ai failli le faire, mais je suis fair-play. Tu ne m'as pas tué, je ne te tue pas.
- Oh, non, c'est terrible. Tu viens de gâcher tous mes plans d'avoir une mort tragique et douloureuse. Mince alors.
- Tu es insupportable.
- Oh, tu as remarqué ! répondit-elle en posant une main sur son cœur, feignant un air flatté. Je suis touchée, c'est un aspect de ma personnalité que j'essaie de faire ressortir...
Il lui adressa un regard glacial au fond duquel perçait une pointe d'amusement.
- Mais la prochaine fois, si on se retrouve sur le champ de bataille, je n'aurais pas de pitié.
- Et moi donc. Essaie de pas mourir d'ici-là.
Le Fauson ricana, puis s'éloigna d'un pas rapide et agile. Cependant, Lym attendit qu'il ait disparu au milieu des arbres pour se détendre, de peur qu'il ne se retourne au dernier moment pour lui lancer une balle dans la tête d'un pistolet qu'il aurait tiré de l'une de ses maudites cachettes de Nyx.
Reprenant enfin son souffle, elle se redressa difficilement et claudiqua jusqu'à Prysm, abandonnée sur une racine noueuse.
- Prysm, murmura-t-elle, et elle rattacha son pendentif à son cou.
Ses mains tremblaient. Mais elle était en vie, ce qui était déjà un petit miracle en soi.
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