- Mais bon, ça va, sinon. Et toi ? Tiens ! Ton collier, il est nouveau ? C'est super beau. Je peux voir ?

Lym posa une main sur Prysm, dont la larme de cristal continuait d'envoyer des taches de lumière colorée alentours, reflétant la lueur du soleil. Si Sofy le lui prenait, le pendentif se métamorphoserait instantanément en épée, et, même si elle savait que les caecus étaient incapables de voir toute trace d'évènements qui leurs paraissaient surnaturels, Sofy avait bien vu le trou dans le grillage lorsqu'elle avait insisté dessus, ce qui signifiait qu'elle pouvait voir des choses avec un minimum de concentration et d'imagination.

- Ah... Euh... C'est un peu fragile et j'ai la flemme de l'enlever. Mais, oui, c'est nouveau.

- Un cadeau de l'un de ces garçons dont tu m'as parlé ? fit Sofy avec malice.

- Quoi ? Non ! Pourquoi ils m'offriraient quelque chose ?

Un nouveau sourire lourd de sens se forma sur ses lèvres fines, et Lym leva les yeux au ciel.

- Ça n'a rien à voir, Sofy...

- Si tu le dis. D'ailleurs... Pourquoi tu n'as pas apporté tes amis, là ? Elyra, Laro, Shay et Josh ?

- C'est... Pas exactement ça, rit Lym, amusée des noms écorchés de ses nouveaux amis.

- Oui, bon. Je voulais les rencontrer, moi ! Voir s'ils sont dignes d'être dans ton entourage !

La jeune fille rousse sourit, songeant à la rencontre entre Sofy et cette bande de videntis, qui risquait d'être explosive mais inévitable. Effectivement, son amie semblait au comble de l'excitation.

- Bon, écoute, le week-end prochain, tu te débrouilles pour les apporter ici, d'accord ? Et s'ils ne viennent pas, tu fais l'une de tes tactiques à la Lym, avec tout ton drama et tout ça. Tu les attaches, les jettes au fond d'un bateau et les obliges à venir en les menaçant de les découper en sushis. C'est le genre de truc que tu serais totalement capable de faire.

- Vraiment ?

Au fond, elle se demandait si elle pourrait vraiment les faire se rencontrer ; comme ils étaient censés aller au même lycée qu'elle, Sofy supposait qu'ils vivaient dans la région. Si elle savait que Larrow vivait en Floride, et les autres... Enfin, à vrai dire, elle n'avait pas la moindre idée d'où venaient Shay, Kosh et Elyra. Shay avec un accent anglais à couper au couteau, mais il aurait pu venir de n'importe quel coin d'Angleterre.

D'un autre côté, ils pouvaient se téléporter, et elle était curieuse de voir la réaction de Sofy face à eux. S'entendraient-ils bien ou bien se détesteraient-ils ? Elle avait un peu peur que la deuxième option l'emporte sur la première, mais elle devrait bien les faire se rencontrer un jour. Elle soupira.

- Je vais essayer pour le week-end prochain, d'accord ?

- T'as intérêt ! Tu me dois bien ça !

Lym haussa les épaules, mais elle avait bien raison, après tout. Elle lui devait au moins cette faveur-là. Et puis, sérieusement, ses amis pourraient-il détester Sofy ? Elle était tout simplement impossible à détester...

Toutes les deux montèrent sur leurs vélos et sortirent en roulant et cahotant sur les racines et les pierres qui jonchaient leur chemin. En arrivant vers le centre du petit village anglais près duquel se trouvait la maisonnette des Alley et où était l'appartement des Mason, elles allèrent directement au stand de glaces et demandèrent deux cornets ; comme d'habitude, Lym, gloutonne comme elle était, prit plein de parfums différents et exotiques des plus bizarres, tandis que Sofy se contentait de fraise et vanille. Poussant leurs vélos d'une main en essayant de vite avaler leurs glaces avant qu'elles ne fondent, elles marchèrent à travers le village en discutant de tout et de rien, évitant soigneusement le sujet du départ de Lym de St Exupéry. Lorsqu'elles passèrent devant le lycée en question, avec ses volets verts à la peinture écaillée, le tas de compost devant, les graffitis au gros feutre indélébile et les tatouages de Malabars sur les murs, elles s'arrêtèrent par réflexe devant la grande porte qui donnait sur le hall. Elles contournèrent le bâtiment de briques et de béton pour passer derrière au travers de la forêt ; au milieu des arbres et des fougères, elles pouvaient voir le bâtiment des sciences, la cafétéria, la cour, le stade de foot où continuait de rebondir un ballon égaré en cuir élimé et défraîchi, le couloir des poubelles où elle avait parlé à Larrow pour la première fois... Il y avait quelques élèves qui traînaient dans un coin, jouaient avec la balle ou avaient le nez dans des fiches bristol pour réviser en urgence un dernier cours, qui prenaient des selfies avec leurs amis ou étaient simplement entrain d'écouter de la musique, des écouteurs aux oreilles et leur portable dans les poches. Comme c'était un samedi, il ne devait s'agir que d'élèves venus faire des cours supplémentaires, des activités, ou bien simplement là pour leurs heures de colle.

DRAGOMIR 🍀 PART1Where stories live. Discover now