✨~[I/13]~✨

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Larrow referma la porte et se tourna vers elle ; malgré la noirceur du ciel au-dehors, on y voyait comme en plein jour, et elle put apercevoir une lueur d'inquiétude et de regret dans ses grands yeux pâles. Il la détailla longtemps avec la même expression pensive, et elle se sentit obligée de briser ce silence ; non pas qu'il fût gênant, mais le calme et elle, ça faisait deux.

- Tu voulais me parler, non ?

- Oui... commença-t-il, hésitant.

- Quoi, tu vas essayer de me taper dessus parce que Cléandra te l'a demandé ? railla-t-elle, sarcastique, surprise presque autant que lui par son propre ton moqueur.

Elle s'aperçut alors qu'elle lui en voulait. Même si elle lui avait fait la tête car il avait été un peu froid avec elle la dernière fois qu'ils s'étaient parlés, elle se sentait rattachée à lui : il était la première personne videntis qu'elle avait connue, la première à lui offrir des réponses à ses questions.

Le fait qu'il fasse partie des toutous de Cléandra l'énervait, et elle se sentait comme trahie.

- Non, répondit Larrow. En fait, je voulais m'excuser d'avoir été un peu désagréable avec toi, la dernière fois.

- Un peu ? releva-t-elle.

En réalité, il n'avait pas été si méchant que ça, mais elle avait envie qu'il se sente un peu coupable. Qu'il se révèle semblable aux brutes stupides qui martyrisaient Sofy à St Exupéry ne l'avais pas seulement déçue, mais aussi blessée.

- D'accord, j'ai été un énorme salaud, soupira Larrow. Surtout de l'avoir laissée de frapper la première fois – mais tu avais l'air de te débrouiller assez bien, alors j'ai seulement empêché les autres membres du gang de se joindre à la baston.

- Je ne comprends juste pas pourquoi, avoua Lym. Pourquoi tu restes avec Cléandra ? Tu pourrais te faire plein d'autres amis, malgré ton caractère de crapaud unijambiste atteint de rhumatismes.

- C'était... une insulte ? essaya-t-il de deviner.

- Je voulais dire que tu as quand même un sale caractère.

Il eut un pâle sourire et resta silencieux un instant, plongé dans ses pensées apparemment tumultueuses, jusqu'à ce qu'elle brise à nouveau le silence – elle avait décidément beaucoup trop de mal à se taire dans ce genre de situations.

- Sérieusement, pourquoi ? répéta-t-elle.

- Ils me protègent, commença Larrow sans se départir de son air pensif. Si cette bande d'idiots a une qualité, c'est sans aucun doute l'esprit d'équipe ; tu t'attaques à l'un d'entre eux, et tout le groupe te tombe dessus un jour où l'autre pour réclamer vengeance. Je sais qu'ils sont mauvais. Toxiques, diraient certains, mais je suis bien plus toxique qu'eux tous réunis, de toute façon.

- Pourquoi tu... ?

Il semblait préférer ne pas aborder le sujet, et poursuivit vite sur sa lancée en éludant la question.

- Aucun d'entre eux n'est ni sympathique ni bien futé. À part Coff, qui doit avoir un cerveau caché quelque part, les autres ne doivent même pas avoir de neurones, mais si traîner avec eux est le prix à payer pour assurer ma protection, alors qu'il en soit ainsi.

- Tu parles de protection comme si tu étais en danger...

- Je ne suis pas très aimé parmi les élèves, avoua-t-il.

- S'ils ne t'aiment pas, ce n'est pas une raison pour te faire du mal !

- On n'est pas chez les caecus, ici. Les videntis ont la mauvaise habitude de s'attirer toutes sortes d'ennuis, et ils savent tous manier une arme. Sur Eleuth, un simple conflit se transforme rapidement en bagarre, et c'est encore pire depuis qu'il y a des tensions à cause de Drake...

- Peut-être, mais quand même, ils ne peuvent pas t'en vouloir à ce point...

- C'est... Compliqué. Lorsque je dis que je suis peu aimé ici, je ne parle pas juste de ne pas être populaire. Je préfère ne pas en parler. De toute façon, tu seras vite au courant ; j'ai une réputation qui n'est pas forcément flatteuse, alors tu en entendras forcément parler à un moment ou à un autre. Et c'est mieux si c'est quelqu'un d'autre qui t'en parle. Je déteste aborder ce sujet.

- D'accord, soupira Lym.

Elle avait beau être très curieuse et avide de réponses, s'il disait vrai, alors il lui suffirait d'interroger le premier videntis venu pour lui demander des informations sur lui. Peut-être pourrait-elle en parler à Joy – si elles se reparlaient un jour. Étant donné qu'elle ne l'avait pas vue de la journée, ni même pour les repas, elle supposa qu'elles ne se reverraient sans doute pas avant un petit moment.

La jeune fille chassa une mèche rousse de devant ses yeux verts, les yeux dans le vague, se demandant comment elle était censée s'adresser à son camarade à présent. Pour une fois, ce fut Larrow qui brisa le silence.

- De toute façon, commença-t-il, tu t'es apparemment déjà trouvé des acolytes. Tu n'as pas besoin de moi pour t'intégrer ici.

Il lui fallut un instant pour comprendre de qui il parlait.

- Ce ne sont pas des acolytes, rétorqua-t-elle. Shay et Kosh sont mes amis.

Elle se sentit étrange de prononcer ces mots : jusque-là, elle n'avait jamais appelé personne son ami, sauf, bien sûr, Sofia Mason. Elle fut prise d'un léger élan de nostalgie en repensant à Sofy : la pauvre, elle avait dû passer une journée seule au lycée. Bien qu'elle eût l'habitude, puisqu'elle ne comptait même le plus le nombre de journée de cours qu'elle avait séchées. Mais l'idée que son absence fut permanente, c'était une toute autre histoire...

- On peut être ça ? demanda Larrow, interrompant le fil de ses pensées.

- De quoi ?

- On peut être amis ? s'enquit-il. Je peux être désagréable, des fois, et j'en suis conscient. Je ne vais pas te sortir le discourt du « j'ai eu une enfance difficile », même si c'est exactement ça ; je comprendrais que tu ne veuilles pas me fréquenter, surtout étant donné que je fais partie de la bande de Coff.

- Oui, lâcha Lym. Oui, on peut être amis, si tu veux.

Il sembla immensément surpris, et ravi, de cette réponse. Apparemment, il s'était déjà préparé à essuyer un rejet.

- Mais que va en penser Cléandra ? demanda-t-elle, hésitante.

- Au diable ce qu'elle pense, sourit Larrow. Par Ladon, j'ai quand même le droit de parler à d'autres personnes, même si elles lui tiennent tête.

Lym lui sourit en retour, et un silence gêné s'installa entre eux jusqu'à ce que le garçon lui tende la main. Elle aurait bien aimé le questionner sur cette expression qu'il ne cessait d'employer – par Ladon – mais le moment ne lui semblait pas propice.

- Alors... Amis ?

Elle prit sa main et la serra.

- Amis.

(chapitre corrigé ✔)

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DRAGOMIR 🍀 PART1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant