Lymerya Alley.
Rien que le nom était déjà des plus anormaux.
Alors si, en plus, elle voyait des évènements inexplicables et surnaturels autour d'elle depuis son enfance, on pouvait déjà s'imaginer que sa vie ne serait pas des plus communes.
Pourta...
- Oh ! Je veux bien. Ce serait très aimable de votre part. Quoique, je préfère du chocolat.
- Lym, tu as déjà deux heures de colle, marmonna Sofy en la prenant par le bras en jetant un coup d'œil autour d'elle.
Tous les élèves étaient déjà entrés en classe et sortaient leurs affaires, tandis que les deux amies étaient restées dans le couloir à discuter. En rougissant, elles s'empressèrent de suivre les autres et allèrent s'installer au fond ; Sofy se tut et prit le cours en silence, penaude de s'être fait rabrouer par le professeur, et Lym continua de réfléchir, les yeux dans le vague.
Elle avait toujours vu des bizarreries autour d'elle, dans son quotidien. Ombres, pupilles incandescentes dans le noir, empruntes de pas, drôles d'individus, et l'incident chez le psychologue ; coquilles d'œufs gargantuesques et formes mouvantes dans l'obscurité avaient cessé de la surprendre depuis des années. Mais, ces derniers jours, tout s'accélérait. Trop d'évènements arrivaient tous en même temps ; le garçon qui faisait fondre le métal avec sa peau avant de s'évaporer comme par magie, la griffe énorme et la bête dans les buissons, l'étrange Orion Elgar, le psy qui s'incrustait chez elles sans avoir été appelé et l'intriguait avec ses yeux rougeoyants... Tout allait de plus en plus vite, les évènements surprenants se bousculaient, et elle ne savait plus où donner de la tête.
Encore plus que d'habitude, elle n'écouta rien au cours et resta immobile sur son pupitre, à réfléchir intensément, ses yeux verts dans le vague, cherchant un point de connexion entre ces évènements, quelque chose qu'elle aurait fait ou dit qui aurait accéléré la quantité d'étrangetés qui venaient s'installer dans sa vie.
Tout ce que je veux, c'est soit faire disparaître ces choses, soit comprendre d'où elles viennent et pourquoi je suis la seule à les voir.
Sofy avait semblé sceptique lorsqu'elle lui avait montré le trou béant dans le grillage, comme si elle ne le voyait d'abord pas. Et elle aurait parié que si elle l'avait amenée avec elle dans la forêt, son amie n'aurait pas vu la bête et l'aurait crue folle en la voyant s'agiter face à cette vision.
Ces choses étaient-elles réelles ? Était-elle folle ? Ou bien les autres faisaient-ils tous semblant de ne rien voir pour la duper ? C'était une théorie du complot un peu trop massive pour être réelle, mais elle était prête à accepter toutes les éventuelles réponses.
À l'heure du déjeuner, enfin, Lym put sortir dans la cour et aller inspecter le trou dans la barrière, malgré les vives protestations de Sofy qui voulait seulement aller manger quelque chose. Elle s'arrêta net en arrivant devant l'énorme cavité dans la paroi de fil de fer, frappée par une idée ; si quelqu'un avait brisé la carapace de métal qui les enfermait dans le bâtiment, tous les élèves en auraient profité pour filer faire un tour. Or personne ne semblait remarquer ce trou et se contentaient de passer devant d'un pas léger.
- Sofy, murmura Lym. Sofy. Tu... Tu vois un trou, pas vrai ?
- Un trou ? répéta son amie en fronçant les sourcils. Un trou dans le mur, tu veux dire ? Mais le mur a toujours été cabossé et fissuré, tête de pioche, c'est pas nouveau.
- Non, je parle du trou dans le grillage.
- Hein ? Mais de quoi tu parles, encore ?
Lym en resta bouche bée. Elle s'approcha de l'endroit où le métal avait fondu et passa son bras au travers, pour bien montrer à son amie l'endroit où s'était creusé le trou. Sofy fronça les sourcils, cligna des yeux plusieurs fois, puis sembla un peu confuse. Son regard semblait trouble, et s'éclaira peu à peu.
- Ah oui. Je l'avais oublié.
- Tu l'avais pas oublié, tu ne le voyais pas ! Il y a deux secondes, tu me demandais duquel je parlais !
- J'avais pas vu, c'est tout. Calme-toi, Lym, tu es dans tous tes états. Tu n'as pas dormi cette nuit ? Tu as encore passé ton temps sur Instagram à baver sur des objets de collection, des bouquins et des célébrités ? Ou bien tu as regardé une saison entière d'une nouvelle série...
Mais la jeune fille rousse n'était pas d'humeur à plaisanter. Pas vu ? Comment Sofy avait-elle pu ne pas voir cet énorme passage béant, les fils tordus et les gouttes de fer fondu qui maculaient le sol ? Quelque chose n'allait pas du tout.
Prise d'un pressentiment, elle se tourna vers le premier élève venu et lui attrapa le bras ; il la regarda avec surprise, et sembla un instant croire qu'elle voulait lui demander son numéro car il afficha un petit sourire suffisant parfaitement insupportable. Et après on s'étonnait qu'aucun des garçons du lycée ne l'intéresse... Agacée, Lym lui montra la barrière d'un geste.
- Tu vois le trou, là ? Tu penses qu'on peut s'enfuir par là ?
- Le... trou ? répéta l'autre en haussant les sourcils, surprit. Euh... Si tu voulais me parler, tu pouvais juste me demander mon nom. Moi c'est Magnifique Pince Charmant, et toi ?
Lym eut un soupir. D'accord, donc, de un, il ne voyait pas la barrière, et de deux, elle était tombée sur le plus lourd de l'école.
- Tu peux partir, merci.
- Euh, je m'appelle pas vraiment comme àa, hein, s'empressa d'ajouter l'autre, l'air inquiet. Je m'appelle Elliott. Et mon numéro c'est zéro six cinquante...
- Au revoir Prince pas du tout Charmant !
Elle le poussa pour l'éloigner, sur les nerfs à cause de tout ce qui arrivait. Comme d'habitude, personne n'allait la croire. Elle donna un coup de pied dans un emballage qui traînait par terre et le foudroya du regard, mais il ne réagit pas. Il aurait au moins pu lui rendre son regard – ah, non. C'était un emballage. Il n'avait pas d'yeux. Lym grogna.
- Emballage stupide, tu peux pas comprendre.
La jeune fille repoussa ses cheveux roux dans son dos et se tourna vers Sofy, qui la regardait avec stupéfaction.
- Lym... Tu es en train de parler à du plastique.
- Désolée. Je suis crevée. Mais tu as vu ? Il ne le voit pas ! Il ne voit rien du tout !
- Bon, Lym, calme-toi. Zen. Respire. Je t'avais déjà dit de commencer des cours de yoga. Tu...
Mais Lym ne l'écoutait déjà plus ; elle avait été alertée par quelque chose, et, cette fois, ce n'était pas un emballage de chips. Son regard s'égara dans la foule des élèves qui couraient et discutaient dans la cour du lycée, et soudain elle le vit. Un garçon, lui tournant le dos, s'éloignait d'un pas énergique vers l'arrière du bâtiment des sciences ; il portait un large sweat bleu ardoise, et avait relevé sa capuche sur sa tête, les mains dans les poches, l'air tout à fait à son aise. Pourtant, il n'était apparemment pas un élève du lycée.
Elle vit alors le sac qu'il portait sur son épaule ; le symbole qui était frappé sur le tissu la figea sur place. L'œil étrange qu'elle avait vu la veille... sur le sac du garçon qui faisait fondre la barrière. Il portait également le même sweat. C'était lui : le garçon aux mains de feu qui avait disparu miraculeusement.
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