Le reste des vacances de noël se passa sans heurts.
Rabastan avait retrouvé son flegme naturel dès le lendemain matin, Irina n'avait plus vu cet homme au désespoir depuis et elle ne voulait pas le revoir .
L'image qu'elle avait de son père s'en était trouvé ébranlé, son père était dur, sans remords, solide comme un roc. Il ne montrait pas ses émotions et n'avait pas de regret car il ne pouvait pas se tromper.
La pierre angulaire du comportement de Rabastan était sa fierté, il sauvait toujours les apparences.
« Rien n'est plus important que l'image que l'on renvoie aux autres » aurait pu être le mantra des Lestranges.
Mais ce soir-là elle l'avait vu différent, à nu. Elle avait désormais la désagréable sensation de voir cet homme, débordant de rage et d'amertume enfermé sous la haute stature de Rabastan.
Elle remarquait des petits gestes, des expressions de profonde tristesse, une sorte de flamme au fond de son regard placide . Elle se rendait compte que son père lui était apparu sous un nouveau jour...Il était humain...
Et ça elle n'aimait pas.
Humain c'est être faillible, c'est avoir tort.
Et Rabastan était plus que ça, c'était un adulte, c'était son père,un roc inaltérable.
Cette certitude l'avait toujours conforté dans les moments douloureux.
Il était son point d'ancrage.
Si lui bougeait, le reste aussi.
Et Merlin qu'elle détestait le changement !
Cette peur irraisonnée qui ne lui permettait pas d'imaginer que l'herbe pouvait aussi fleurir autre part.
« Il n'aurait pas dû tuer Mme Couple » pensa durement Irina.
« Je l'aimais ».
Au fond de son être un poids s'allégea soudain, un poids qu'elle ne pensait pas exister.
« Anne n'est pas morte a cause de moi ».
A part cela ses vacances furent très ennuyeuse, elle en vint même a se demander quelles avaient été les activités de son enfance.
Elle se souvenait s'être raisonnablement ennuyée alors que désormais elle passait ses journées à se morfondre.
Ses devoirs étaient terminés, ses livres avaient été dévoré et son regard avait balayé chaque parcelle de sa chambre, du sol au plafond .
Elle était allé faire un tour dans le domaine, sa chouette boudeuse comme compagne silencieuse ; elle voyait son père aux repas ; et pour tout avouer elle ne voulait pas le voir plus .
Irina aurait préféré rester à Poudlard, au moins là-bas les fantômes, les élèves et leurs mille et une frasques apportaient chaque jour son lot d'évènement.
Ici il n'y avait juste rien de nouveau, rien de mémorable ; juste une suite terne et plate de journée.
Si elle avait dû tenir un journal elle aurait réellement peiné à y inscrire des choses tangibles sans extrapolation ni mensonge.
Il était vrai que dans le parc elle avait vu une souris, ou plutôt elle avait vu sa chouette de jais fondre toutes griffes dehors et lui rapporter un cadavre minuscule et velu.
Elle avait trouvé des inscriptions gravées à l'intérieur de sa penderie, preuve du passé d'une tierce personne entre les murs usés de sa chambre.
Irina , en bonne aventurière avait passé plusieurs heures à la recherche d'inscription similaire dans les recoins du manoir et ce n'était pas chose qui manquait !
Elle avait trouvé des tagues sur les plinthes de la chambre bleu, et d'autres sur les montants du lit de la suite rose.
Ces inscriptions étaient difficilement lisibles mais on y retrouvait des croix, des fleurs, des noms .
Comme le besoin de prouver son existence, d'affirmer son passage dans les lieux et peut-être même de revendiquer une propriété sur ces objets qui allaient passer de génération en génération.
Alors Irina avait aussi apposé sa trace.
Ainsi perdurera dans ce manoir une trace de son passage. Bien que son nom, jamais ni sera inscrit.
Un petit I majuscule, pouvant être confondu avec une éraflure parfaitement verticale.
Le retour a l'école ft finalement la chose la plus excitante de ses vacances .
Le poudlard express, paré de sa belle robe rouge égayait les quais et les larmoyants au revoir .
Et dire que certains enfants n'aimaient pas l'école !
Que pouvait-il y avoir de mieux chez eux qu'à Poudlard?
Elle retrouva ses camarades de chambrée.
Lucie avait fait couper ses cheveux en un carré propre, Melinda et Catherine n'avaient pas changé.
Chacune à leurs tours recitèrent l'historique de leurs vacances, les interminables et pénibles repas avec toute la famille, les 15 plats et l'attente fébrile jusqu'aux 12 coups de l'horloge.
Toutes détaillèrent des cadeaux plaisants, des ventres prêts a éclater et d'agréables moments en famille .
- Mes sœurs n' ont pas arrêté de s'embrouiller, je suis bien contente de ne plus avoir à partager ma chambre avec elles. Geignit Catherine, en saluant une femme brune à l'air épuisé, sa mère de toute évidence au vu des similitudes entre leurs deux visages.
- T'as combien de frères et sœur ? Argua Lucie.
- 3 sœurs et pas un seul garçon !
- J'aurais bien voulu avoir une petite sœur , s'exclama Melinda, pensive.
Catherine lui retourna un regard profondément choqué.
- Crois-moi, être enfant unique c'est le rêve ! Depuis que je suis partie à Poudlard mes soeurs ont réquisitionné mon lit et en ont fait leur cabane. La petite dernière à pleurer quand j'ai voulu dormir !
-3 sœurs ? C'est vraiment beaucoup elles ont quel âge ?
-Alors Jade 9 ans , Manon 4 et Louise 2 .
- 9 ans, bientôt Poudlard ! Tu seras en ... 4 eme année quand elle te rejoindra ! s'exclama Mélinda enjoué.
Catherine fit non de la tête.
- Pour l'instant Jade veut aller à Beaubatons, là où notre mère est allée.
Les 3 filles se tournèrent vers Catherines des étoiles plein les yeux .
- Wow ! Beaubatons ! Mais pourquoi ?
Catherine souria nerveusement devant l'attention soudaine de ses camarades.
- J'ai les deux nationalités, mes parents sont français mais se sont exilés en Asie lors de l'avènement de Vous-savez-qui sur l'Europe. Et après sa défaite ils sont venus travailler en Angleterre. J'ai cru comprendre que c'était parce que la famille de ma mère n'acceptait pas trop mon père.
-Ton père est un moldu c'est ça ? Demanda Lucie.
-Oui il est instituteur en maternelle.
-Et ta mère ?
- Créatrice de mode. D'ailleurs on a écrit un article sur elle dans la gazette du sorcier de mai. « Christelle Leroux, une touche à la française dans votre garde-robe »
Irina se laissait porter par la conversation, n'y trouvant pas trop quoi ajouter.
Elle avait vu Draco pendant les vacances et avait mangé quelques fois chez eux, profitant d'un peu plus d'animations aux repas.
-J'arrive pas à supporter Malefoy ! Grinça Melinda. Je le trouve prétentieux et imbu de lui-même, et en plus il est même pas particulièrement doué !
Irina ne défendit pas Draco, ce qui était dit n'était pas faux, même si elle considérait presque ces défauts comme des qualités, aux antipodes de sa propre timidité.
Lorsqu'elles passèrent toutes le hall de Poudlard leurs narines s'emplirent de cette odeur si spéciale.
Encre, Poussière et vieilles pierres. Une odeur de château centenaire et d'histoire passionnante.
Et aussi un doux fumet évoquant le repas du soir.
Une odeur d'un chez soi.
Son lit à Poudlard était bien plus dur, petit et moins élégamment drapé de velours que celui au manoir mais il semblait bien plus accueillant.
La présence d'amies, de décorations en tous genres, de bazar jeté a même le sol ; créaient une atmosphère enfantine et décomplexé.
Les discussions du soir, éclairées par des bougies magiques, murmurés doucement reprirent.
On ne parla pas du dangereux Sirius Black rodant en liberté.
Ces histoires là étaient pour les adultes.
Et elles voulaient profiter de n'être encore des enfants et de n'avoir a se soucier que des cours et des commérages.