Souvenirs

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Elle-même craignait que cet état ne soit permanent et irréversible, si cette obduration était salvatrice au vu de ces révélations particulièrement dures à encaisser ; elle n'espérait pas ne plus jamais ressentir la joie futile d'être une adolescente.

Pour parfaire à son malheur, Rabastan apparut un matin chez les Malefoy. Apparu, car le mangemort s'était grimé pour passer les grilles et ainsi espérer déjouer une possible surveillance par des Aurors prévoyant, le système des cheminées ayant été déconnecté.

Un elfe vint prévenir Irina que son père la demandait, mais elle n'avait pas bougé.

Figée, même le souffle dans ses poumons s'était calcifié. Face à l'insistance de l'elfe qui ne voulait risquer de titiller le mécontentement de l'homme agité au rez-de-chaussée, Irina ne put qu'accepter de descendre à la condition que Narcissa vienne avec elle.

Ensemble, les deux sorcières s'étaient rendues dans le hall où attendait Rabastan Lestrange, aussi bourru et grave qu'à l'ordinaire. Mais Irina le regardait, pétrifié ; devant elle, ce monstre qu'elle s'était imaginé assassinant sa mère à peine le nourrisson extrait de son ventre.

L'homme prit tout de même la peine de saluer les deux femmes avant de se tourner vers sa fille et de déclarer « Suis-moi ». Ce n'était pas une question, ni même une proposition.

Le personnage autoritaire qu'était Rabastan ne pouvait imaginer qu'on, ou plutôt sa ridicule fille, puisse contester un ordre exprimé clairement avec ce ton cassant qui intimait généralement la peur, à défaut du respect, aux enfants.

L'homme sembla se radoucir, ne voyant pas sa fille faire mine de le suivre.

-           Nous allons au 12 square Grimmaurd, le siège de l'ordre du Phénix, le maitre veut que tu nous ouvres la porte.

Mais la jeune fille ne sourcilla même pas, le visage figé dans une expression d'horreur, comment Rabastan pouvait-il sembler si semblable a lui-même alors que sa fille le voyait sous un jour complètement différent. Comment pouvait-il toujours être lui quand elle-même n'osait plus se regarder dans un miroir de peur d'observer des traits qui n'étaient pas les siens sur son propre visage ? Comment Rabastan pouvait-il continuer de mener sa vie quand la sienne avait été chamboulée ?

Le sorcier n'était pas patient, ainsi il attrapa mollement le bras de la fille pour qu'elle le suive.

Mais Irina se déroba et fit face au regard las où commençait à poindre la colère.

-           Cesse tes enfantillages ! Que tu le veuilles ou non, nous irons !

À son plus grand désarroi, sa fille était figée, le regard étrangement mort où ne brillait aucune vivacité ; un instant il eut presque peur de cette expression neutre, mais il n'avait pas de temps à perdre.

Plus fortement il attrapa les épaules de la jeune fille et la tira vers l'entrée.

Puis, contre toute attente, Irina se mit à crier.

-           Je ne vous suivrais pas ! Je veux des explications ! Je ne vous suivrais nulle part avant que vous m'expliquiez le fin mot de cette histoire !

L'homme fit volteface et approcha son visage rubicond transpirant de fureur.

-           Tu n'as rien à exiger ! Tu m'obéiras point à la ligne.

Jamais ils n'avaient eu ce genre de dispute, jamais il ne s'était disputé d'ailleurs ; jamais Irina n'avait osé élever ainsi la voix et faire vibrer les murs de sa voix chargée de courroux.

EndolorisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant