364-Arc Ashfeld : Acte LXXXII Petite Fille, Grande Fille

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Le souffle hésitant, les nerfs vifs et alertés, l'on se cherchait du regard, guettant la moindre faille qui pourrait trahir, l'instant de vacillement tant attendu, de la plus aguerrie? Peut-être de l'autre? Kali dominait, d'une suprématie appuyée d'une arrogance certaine face à cet adversaire qu'elle avait su sondé, cet adversaire dont elle connaissait le rythme de la respiration, le mouvement des jambes selon les situations, la sensibilité à la provocation, la réactivité, la finesse des gestes, et toutes ces petites choses qui forment les plus redoutables, les plus grandes, à la seule condition qu'elles puissent judicieusement les dissimuler afin qu'aucun opposant ne puisse s'en servir. Mais hélas, Ayya demeurait bien petite. Kali lisait en elle-même aussi clairement que la mer reflétait le ciel.

Nafsia Shantae regardait la confrontation d'un œil neuf. Ce n'était pas la première fois que sa protégée affrontait celle de Bellona. Les liens les plus solides se forgent dans le combat, et dans la connaissance mutuelle de la douleur que pouvait infliger un compagnon. Elle se revoyait encore jeune, quand elle affrontait tantôt Shara, tantôt Meryem. Il lui arrivait de mordre la poussière. Il lui arrivait de se relever. Et de continuer.

- Kali Kick ! Hurla la jeune tigresse.

Elle fit suivre à son coup de pied une trajectoire circulaire. Bellona lui avait bien inculqué l'importance des appuis. Il fallait se connecter à la terre-mère, recueillir sa grande puissance et la déversait dans un élan démoniaque.

Ayya repensait à toutes ces fois-là où elle n'avait su esquiver, où elle avait été trop lente. Une vérité en ressortait : Cela faisait mal...

Elle ne voulait plus ressentir cela, cette déconnexion totale entre corps et esprit, l'attaque de Kali qui lui arrachait toute conscience. Alors Ayya réagit plus tôt que prévu, plus tôt que toutes les dernières fois. Son corps n'avait pas oublié la douleur et ses réflexes la sauvèrent d'un sommeil prolongé. Elle réussit à esquiver.

- Elle a évité? constata Kali, surprise et consternée.

Elle dévisagea longuement Ayya avant de se laisser tomber à terre, dépitée.

- Je me sens toute petite. Ma précieuse technique... ma précieuse technique adorée... Ma technique imbattable... battue...

Elle se mit à taper le sol de frustration.

- Tu as bien combattu, Ayya.

- Maîtresse, répondit la jeune fille, heureuse de voir Shantae la féliciter.

- Je ne battrai pas cette grosse folle à ce rythme-là ! Si cette faiblarde d'Ayya m'oppose résistance, comment pourrais-je la battre?

- Tu présumes de tes forces, Kali. Tu es à quelques centaines d'années de pouvoir effleurer Bellona.

- La ferme Shantae ! Tu ne comprends rien. Je dois la battre. Et partir d'ici. Elle n'est pas insurmontable. Je sens beaucoup de forces en moi et je sais que j'y arriverai. Que ce soit Bellona ou Shara, je les battrai toutes.

Ayya n'eut pas à attendre avant de réagir. Elle sauta sur Kali et la bloqua au sol, de manière à laisser les fesses de la tigresse à la merci de sa maîtresse.

Celle-ci s'avança le bâton en main, puis donna un violent coup. Kali lâcha un hurlement terrible.

- Tu miaules, jeune tigresse. Bellona n'en serait pas fière.

- Lâche-moi, Ayya ! Lâche-moi !

Le supplice du bâton. Elle en avait longuement souffert, à tel point qu'elle savait inutile le fait de se débattre. Difficilement, elle se résigna à accepter la cinquantaine de coups. Jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus sentir son corps, plus sentir ses jambes.

Sven Et Ingrid IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant