Endoloris

Patronus et agitation

Assis l'un contre l'autre pendant des heures, ils ne parlaient de rien, de leurs amis, de leurs réussites et échecs. Cet aparté tout en douceur et en sincérité plaisait énormément à la jeune Lestrange qui se sentait alors comme tout adolescent.
Sans problèmes familiaux, sans aucune considération politique ou sociétale sur ce monde qui menaçait de se désagréger.

Entre les bras de Aaron, elle se reposait dans une quiétude sans préjugé et sans jugement.

Bien que platoniques, ces moments passés en tête à tête lui étaient importants, ils étaient des rendez-vous où ils pouvaient travailler ou apprendre à se connaitre.

Malgré tout, Irina se fixait une limite, elle n'avait aucune envie de lui exposer la noirceur de sa famille. Elle tentait de se convaincre que cette omission n'était pas un mensonge, mais sans grand succès. Elle aurait voulu pouvoir se montrer aussi sincère que le garçon, mais encore une fois, une honte bien ancrée lui chuchotait que la laideur de son enfance détournerait quiconque souhaiterait l'approcher.

Les séances de l'AD consacré au sortilège du patronus se déroulaient avec toujours plus de formes spectrales virevoltantes. Les conseils de méditation et de souvenir puissant avaient permis à plusieurs de considérablement progresser dans cet art si particulier.

Aaron parvenait maintenant à créer une forme vaguement animale, on reconnaissait parfois un petit chien qui gambadait ; cependant l'inconstance de son sortilège rendait difficile la perception nette des contours de ce dernier. À chaque fois que le garçon relâchait son attention, le semblant de chien disparaissait en une pluie de poussière argentée.

Catherine, quant à elle, était parvenu à un exploit. Au bout de la troisième séance, elle parvenait à conjurer un immense cheval parfaitement reconnaissable. Le puissant animal galopait vigoureusement en balayant sa crinière de nacre parmi ses compères animaux.

D'autres signes de progression venaient ravir Harry qui distribuait des félicitations à tour de bras ; Hermione parvenait désormais à émettre une loutre scintillante et des pies particulièrement vives tournoyaient autour des jumeaux Weasley.

Seul point noir, la baguette d'Irina qui restait désespérément muette.

Elle avait pourtant suivi les conseils de Harry et s'était entourée de tous les souvenirs positifs disponibles.

Pour ce faire elle avait choisi de ne pas remonter bien loin, les soirées entre amies près du feu, les félicitations du professeur McGonagall pour son devoir particulièrement époustouflant, la main de Aaron dans la sienne à la St Valentin...

Et malgré cela, une simple poussière sans consistance répondait à l'appel de la formule.

Oui on pouvait dire qu'il y avait de l'amélioration depuis la première séance, mais à ce rythme elle serait diplômée avant de pouvoir se pavaner avec son animal argenté.

Loin de la peiner, Irina s'était fait une raison ; les échecs de l'AD ne concernaient que l'AD ; elle excellait dans les autres matières et pouvait même se targuer d'obtenir de très bons résultats avec Ombrage. Elle devait se faire une raison, la défense en temps réel n'était pas faite pour elle.

Les sortilèges, même complexe qui demandaient rigueur et concentration n'étaient pas un obstacle, cependant tout ce qui touchait au combat créait chez elle une sorte de blocage.

Dans le cas du patronus elle aurait du pouvoir y arriver, ici pas d'ennemis menaçant face à elle, le simple reflet de sa personne.

Soudain, un tumulte suivi d'explosions se fit entendre à l'extérieur de la salle sur demande.

Aussitôt, un silence pesant s'abattit sur les élèves qui virent leur rare progrès avec leurs patronus s'évaporer sous le manque de concentration.

Le bruit ne s'arrêtant pas, Harry, Ron et Hermione décidèrent dans une accalmie de jeter un œil derrière le battant secret de la salle sur demande.

À peine eurent-ils passé un œil qu'ils annoncèrent la mauvaise nouvelle.

-           Le couloir est plein d'élèves de la brigade inquisitoriale... Quelque chose se trame.

Heureusement pour eux, ils ne semblaient pas connaitre l'endroit exact de la porte et la milice d'Ombrage naviguait dans les couloirs sans grande discipline.

-           Voilà ce qu'on va faire, vous allez rentrer dans votre dortoir par petits groupes. On a encore le temps avant le couvre-feu, il nous faut espacer les groupes pour passer le plus inaperçus possible.

Irina, Catherine et les deux autres élèves de Serdaigle sortirent en premier. À grandes enjambées ils s'éloignèrent tout en cherchant à rester discrets. Ils ne croisèrent aucun élève et furent tous blottis sous leurs draps avant le couvre-feu.

-           Tu penses qu'on a été dénoncé ? s'inquiéta Irina auprès de Catherine.

-            On va dire que ça me parait extrêmement improbable que la milice de Ombrage fasse des allers-retours dans cette section précise du château...