[Inceptio] Menel Ara - Tome 2 - Vincent Dionisio

Depuis le début
                                    

2. Échec et mat

Pour continuer sur l'allégorie de la partie d'échecs, on arrive ici à ce moment de la partie où les adversaires, à forces égales, grimpent en tension. On a passé toute la partie qui met en place le jeu et la stratégie, désormais, on passe à l'attaque. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que du rebondissement, il y en a beaucoup !

On reprend l'histoire exactement là où on était resté : Victor a formenté un attentat contre les Sept Familles, qui a partiellement réussi. Même si les dégâts sont peu nombreux, l'acte a permis de remettre en question la légitimité des "grands" de Menel Ara qui ne sont plus aussi certains d'être intouchables. La suite ne va faire que le prouver. Dans cette deuxième partie, c'est donc l'aspect dystopique qui est de plus en plus mis en avant, jusqu'à se transformer en véritable apocalypse. On sait rapidement quand le point de non-retour est atteint et que plus rien ne sera jamais comme avant.

L'histoire reprend au début les personnages qui ont marqué le premier tome, Gaël et Victor Dubuisson, Maria, et bien sûr Youri Komniev, mais d'autres tirent peu à peu leurs épingles du jeu et sont davantage mis en avant. Le personnage de F., par exemple, voit son personnage être extrêmement développé dans cette partie. De même, Suryena est mis en sourdine pour laisser pleinement la place à Delta, personnage très secondaire du tome 1 et qui va être propulsé parmi les protagonistes les plus importants de cette partie de l'histoire. Ces personnages font souffler un vent de renouveau qui permet de ne pas se lasser de l'intrigue.

Je suis toujours aussi fan des personnages et j'ai même eu un petit pincement au coeur à la fin du livre, en devant les laisser partir. Même si ce sont tous de sacrés sacs à merde, ils ont quelques chose de très attachants. Les personnages que l'on pensait intouchables révèlent peu à peu leurs défauts, tandis que ceux qui paraissaient défendre des causes plus justes révèlent peu à peu une part plus sombre. Cela permet, pour le lecteur, de mettre tous les personnages au même niveau : désormais, la balance ne penche plus du tout pour l'un des camps, c'est au lecteur de choisir de prendre parti pour l'un des dirigeants, ou au contraire pour aucun d'eux. C'est ici le rôle de Mussa, qui est extrêmement bien amené et permet de prendre du recul avec les événements qui se déroulent sous nos yeux.

La fin est d'ailleurs bien plus complexe et libre d'interprétation que prévu. Je suis encore assez dubitative, et on a presque envie de faire un grand saut dans le temps pour voir si ce sera pire qu'avant. Encore une fois, tous les messages doivent être lus dans ce tome avec plusieurs sous-lectures. Et l'intrigue en elle-même doit être prise avec des pincettes. A la fin de cette histoire, j'avoue que je ne savais plus du tout qui je devais croire xD On se croirait un peu en pleine élection présidentielle : propagande de partout, mais surtout des intérêts personnels pour de grosses têtes qui veulent, au fond, juste en dominer d'autres. 

C'est ça que je trouve magique avec son livre, même si tout a l'air suffisamment surréaliste pour se dire que ça ne pourra pas arriver en vrai, il y a toujours des petites piques qui vous font dire que si, malheureusement, c'est totalement possible que ça arrive. J'ai développé mon goût pour la politique assez récemment, et j'ai un peu l'impression de retrouver dans l'ambiance du livre la désillusion de notre politique actuelle, qui comme la Haute-Ville, cherche à nous mettre de la poudre aux yeux, mais ne fait malheureusement pas grand chose d'autres. C'est aussi pour ça que ce livre m'a beaucoup touchée.

Et je pourrais aussi vous parler de cette fantastique critique des médias en sous-brillance et de leur rachat par les partis politiques que j'approuve totalement et que j'ai trouvé tout simplement excellente. Il y a énormément d'autres messages cachés, et je suis sûre qu'après lecture, il m'en manque encore. C'est un texte d'une diversité effarante qui avertit et enseigne sans forcer les choses.

En bref, cette duologie, c'est un grand oui pour moi. Je ne me suis pas ennuyée un seul moment et je suis tombée folle amoureuse des personnages et du style de l'auteur. L'intrigue est excellente et extrêmement complexe, absolument rien n'est laissé au hasard. Je vous la recommande énormément, je pense pour ma part que ce sera un de mes gros coups de cœur de cette année.

3. Un petit extrait ?

— Bravo, monsieur Dubuisson, déclara Komniev, un large sourire barrant son visage. Quelle éloquence, quelle rhétorique ! Ce discours a été longuement répété et cela se voit. Votre éthique du travail est extrêmement rare, savez-vous ?

Il marqua un temps, juste de quoi savourer le regard ahuri de son ennemi intime. A cet instant, Victor sut qu'il avait perdu. C'était aussi imperceptible que certain. Komniev posa ses mains de chaque côté de son pupitre et reprit la parole, plus sérieusement cette fois.

- Distingués membres de la Chambre, je ne me cache pas derrière mon petit doigt. Je reconnais mes erreurs et sans doute ai-je sous-estimé les dangers, notamment celui émanant des Putras. Si votre confiance m'est maintenue, j'accorderai une importance particulière à la sécurité.

Une fois cette introduction achevée, il se tourna vers Victor et implicitement, s'adressa à lui.

— Monsieur Dubuisson est un homme ambitieux, mais pour être franc, je ne vois pas très bien quel jeu il joue. Vise t-il le poste de Chef de la Chambre ? Désire t-il fonder sa propre grande Famille ? Je l'ignore. Ce que je sais, en revanche, c'est que cette ambition le ronge, le dévore et que, ces derniers temps, il l'a laissée prendre le dessus.

Les nombreux membres présents ne comprenaient pas exactement ce dont il retournait et Komniev le voyait bien. Victor, lui, encaissait sans broncher. Mais il savait.

— Chers membres de la Chambre, j'ai, hélas, de mauvaises nouvelles. La dernière fois que je me suis exprimé en ces termes, c'était pour vous annoncer que notre noble institution était infiltrée. J'ai bien peur que ce que je dois vous dire aujourd'hui soit du même ordre. En effet, nous sommes en mesure, aujourd'hui, de vous dire qu'Alfred Brinnus, l'homme qui a été exécuté pour avoir attenté aux vies des chefs des Sept Famillles, a été payé pour commettre cet attentat. Et que le commanditaire n'est autre que Victor Dubuisson lui-même.

Une bronca historique accueillit cette nouvelle. 

C'est tout pour cette nouvelle chronique ! On se retrouve bientôt pour de nouvelles aventures, des bisouilles !

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