[EDL] Mémoires de la forêt : Les souvenirs de Ferdinand Taupe - M. Brun-Arnaud

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Hello, hello ! Aujourd'hui, on parle d'un livre qui sort un peu de ce qu'on a l'habitude de lire sur ce blog, avec un roman jeunesse exceptionnel qui a réussi l'exploit de me faire pleurer non-stop pendant deux heures, et rien que pour ça, il mérite sa place ici. Je parle bien évidemment des Mémoires de la Forêt de Mickaël Brun-Arnaud !

 Je parle bien évidemment des Mémoires de la Forêt de Mickaël Brun-Arnaud !

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Le goût du souvenir

Archibald Renard est libraire dans la forêt de Bellécorce. Son travail est de collecter les livres que les autres animaux lui confie et leur trouver le lecteur qui leur correspond le mieux. Routinier et un brin maniaque, Archibald Renard se plaît parfaitement dans cette petite vie bien organisée et parfaitement contrôlée.

Son quotidien calme et ordonné explose lorsque Ferdinand Taupe franchit le seuil de son commerce. Paniqué, la petite taupe remue et chamboule ses rayonnages à la recherche désespérée du livre qu'il a écrit : Mémoires d'Outre-Terre. Malheureusement, le livre a été vendu le matin même, et le renard n'y peut pas grand-chose.

Ferdinand Taupe lui explique alors être atteint de la maladie de l'Oublie-tout, qui lui fait perdre ses souvenirs et tout ce qu'il a un jour été, sans espoir d'amélioration. Ce livre, c'est la dernière chance de Ferdinand de renouer avec son passé, et surtout, la femme qu'il a un jour aimé, Maude, et qu'il ne parvient pas à retrouver.

Touché par son histoire, Archibald Renard accepte de quitter son quotidien pour partir à l'aventure sur les traces de Maude et du passé de Ferdinand. Celui-ci se révèle plein de surprises, bonnes... et moins bonnes.

Le livre est disponible depuis le 16 mars 2022 et est disponible sur le site de la maison d'édition au format papier et numérique. Le lien est en commentaire.

Tempête d'émotions

Ce livre. Non, mais sérieusement, ce livre. J'en avais déjà entendu beaucoup de bien avant de me décider à me le procurer, mais je ne savais pas que c'était à ce point. C'est clairement une de mes plus grosses claques littéraires de ces dernières années. J'ai fondu en larmes après ma lecture pendant deux heures tellement ça m'a remuée ahah. C'est à la fois doux et amer, et il est impossible de rester insensible devant cette histoire.

Nous avons donc affaire ici à un roman entre fable, conte et fantasy animalière. Les personnages sont des animaux anthropomorphisés, qui vivent dans la forêt de Bellécorce, une petite bourgade toute mignonne où chacun a un métier bien défini, des envies et des objectifs. Bien que le roman soit classé pour la jeunesse, il est vraiment tout public, et en temps qu'adulte, vous vous y retrouverez tout autant, voire plus, parce qu'il y a un énorme sous-texte à ce roman qui me semble assez difficile d'accès pour des enfants.

Nous suivons deux personnages principaux très attachants. Le premier, c'est Archibald Renard, qui comme son nom l'indique, est un renard. Bien qu'en apparence un peu rigide et maniaque sur les bords, il s'agit de quelqu'un de très humain et sensible à la douleur des autres, fiable et loyal, ce qui en fait le compagnon de voyage par excellence, prêt à tout pour arriver à son objectif malgré sa peur tenace de l'aventure. Il est accompagné sur les routes par Ferdinand Taupe, une petite taupe qui apparaît comme son contraire parfait sur bien des points : il est chaotique, agit sur impulsion et, on le découvrira au fur et à mesure de l'histoire cache beaucoup plus de choses qu'on ne pourrait le croire au premier abord. Les deux personnages se complètent parfaitement et l'amitié qui se développe au fil des pages est très touchante, au point de pleurer à chaque fois qu'ils se font un câlin, mon cœur, au secours.

L'intrigue paraît simple en apparence : il faut retrouver le livre de Ferdinand Taupe. Mais elle n'est simple seulement en apparence. C'est une véritable chasse au trésor qui s'organise dans le livre, peuplée de rencontres sur le chemin qui permettent à Ferdinand de débloquer des souvenirs clefs et des indices sur ce qui a pu arriver à sa femme, Maude, qu'il recherche désespérément. L'intrigue est semée d'embûches, mais contrairement à d'autres romans où ces obstacles peuvent être des difficultés ou de mauvaises rencontres, ici, la principale difficulté est Ferdinand Taupe lui-même.

Ferdinand est atteint de la maladie de l'Oublie-tout, qui comme vous vous en doutez sûrement à présent, est le joli nom donné par l'histoire à la maladie d'Alzheimer. Ferdinand a du mal à distinguer le rêve de la réalité, le passé du présent, et parfois, ne reconnait plus le lieu où il se trouve et les personnes qui l'entourent. Ces scènes sont absolument déchirantes dans le roman, parce que, comme pour la vraie maladie, elles peuvent survenir n'importe quand, ce qui donne lieu à de grands moments de détresse qu'Archibald Renard va devoir apprendre à gérer. La maladie est traitée avec énormément d'humanité, et, ma grand-mère paternelle ayant été touchée par cette maladie qui a fini par gagner et l'emporter pour de bon, ça vise vraiment juste et droit au cœur. Ce sont les petits détails, comme Ferdinand qui agit soudainement comme un petit garçon, qui font super mal et qui donne énormément de vraisemblance à cette histoire.

Et comme si ça ne suffisait pas, l'histoire de Maude, qui se tisse tout au long de l'intrigue, vient contribuer à vous exploser le cœur. C'est terrible, parce que tout du long, je savais que ça allait se finir comme ça. Ferdinand permet, ironiquement, d'oublier que ce qui s'est passé était possible. Je ne peux pas trop m'étaler, vous le découvrirez par vous-même. Les derniers chapitres sont très riches en émotion, et valent vraiment toute la quête des deux personnages principaux.

À l'intrigue s'ajoute une écriture incroyable, où se mêle poésie et récits imbriqués qui permettent d'avoir le point de vue de tous les personnages que l'on rencontre au fil de l'histoire, et qui est tout aussi important que celui des deux personnages principaux. J'ai beaucoup aimé le nom des personnages, qui reflète leur animal, mais aussi toutes les petits détails qui montrent que bien qu'humanisés, les personnages restent des animaux. La stylistique est vraiment top, et je ne suis même pas certaine d'être parvenu à en voir tous les détails.

Le texte est également illustré, magnifiquement, par Sanoe. Le dessin apporte vraiment un plus à l'intrigue et vient donner vie aux souvenirs de Ferdinand. J'ai adoré les scènes de décor, mais aussi la manière dont sont représentées les pertes de repères de Ferdinand en dessin, qui sont très frappantes visuellement et donnent encore plus de vie au personnage.

Ce texte est l'un de mes plus gros coups de cœur. Pas juste de cette année, mais en général. J'ai passé un excellent moment de lecture, j'ai ri, j'ai pleuré et ça faisait extrêmement longtemps qu'un roman ne m'avait pas touché à ce point, et un roman jeunesse encore plus. Je vous le recommande chaudement, toutes les critiques élogieuses que j'ai pu lire dessus sont justifiées, et il mérite vraiment d'être découvert.

Un petit extrait ?

— Ferdinand, Ferdinand ! C'est moi, est-ce que vous me reconnaissez ? Ferdinand ? reprit la voix qui l'avait interpellé plus tôt, avant la maison sans murs.

— Laissez-moi tranquille, qui que vous soyez ! Je dois retrouver Maude, elle était juste là près de moi, et je l'ai laissée partir ! pleura la taupe en progressant vers la porte.

Alors la voix s'éteignit. Mais maintenant debout devant la porte bleue, Ferdinand ne savait plus s'il avait vraiment envie de l'ouvrir. Pris d'une angoisse incontrôlable, de grosses gouttes de sueur coulèrent sur son museau, embuant ses lunettes. Pourquoi paniquait-il à l'idée de franchir le seuil et de retrouver ses souvenirs ? Si ce qui l'attendait était aussi beau que la tendresse de sa maman, la complicité de son papa et la douceur de son épouse, pourquoi diable redoutait-il d'entrer ? Soudain, on frappa à la porte, fort, très fort. Bam, bam, bam ! et la porte commença à trembler sur ses gonds.

— Non, je ne veux pas, murmura Ferdinand, non, je ne veux pas ouvrir...

Mais la porte semblait se rapprocher, centimètre par centimètre, et sa poignée dorée, fumante comme de la vapeur, se mit à tourner sur elle-même, menaçant de tout ouvrir.

— Non, criait maintenant Ferdinand, non, je ne l'ouvrira pas ! Non, je n'ouvrirai pas ! Ouille ! cria-t-il en retenant la poignée qui lui brûlait les doigts.

Ce n'était plus un rêve, c'était un cauchemar, et quand la porte s'entrouvrit, Ferdinand, oubliant ses douleurs, se mit à fuir sans regarder derrière lui. Au loin, des cris transperçaient les ténèbres comme des oiseaux maudits. Mais Ferdinand, lui, courait à en perdre haleine, prêt à tomber, à s'effondrer à n'importe quel moment...

C'est tout pour cette chronique, merci de l'avoir lue jusqu'au bout ! J'espère que ça vous a plu et je ne peux que vous recommander encore une fois d'aller la découvrir, vous ne le regretterez vraiment pas !

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