Coucou ! Bonne nouvelle ! J'ai mon service civique ! Grand soulagement de pas se retrouver sans rien l'année prochaine. En attendant, on continue avec les chroniques qui sentent bon l'été chez les éditions Inceptio avec une toute nouvelle autrice, Julia Weber.
1. Danger ! Ne pas écrire !
Après des années à nager dans un flot de mauvais souvenirs et une rupture récente, Solveig décide qu'elle a besoin de changements dans sa vie, même si cela signifie renoncer à tout ce qu'elle a fondé avec tant de difficultés. C'est en emménageant dans sa nouvelle maison qu'elle rencontre Erick. Il vendait une machine à laver, elle avait absolument besoin de laver ses chaussettes, et ainsi débuta de longs échanges de mails d'abord neutre, puis de plus en plus passionné.
Le petit secret de Solveig, c'est que dans son temps libre, elle est aussi L, une autrice à la popularité grandissante, de plus en plus pressée par son éditeur pour écrire un nouveau livre. Mais ça, personne ne le sait, pas même ses amis. Eux sont plus préoccupés par l'amour qui va et qui vient, qui se fait, se défait et se complique.
Dans sa toute nouvelle maison, Solveig découvre dans un tiroir un vieux carnet à la couverture jaune, intitulé The White Side. Assez vite, il devient son confident, le miroir de sa vie de tous les jours, de ses peines, de ses détresses, de ses rancoeurs. Et elle ne va pas tarder à en avoir plus besoin que jamais.
Un jour, Erick cesse les échanges de mails et disparaît de la circulation. Solveig, poussée par Kristin, la sœur du jeune homme, se lance à la recherche de son mystérieux correspondant en ligne, sans même savoir à quoi il ressemble. Elle n'imagine alors pas que ce n'est que le début d'une série d'événements qui vont la conduire jusqu'aux frontières de l'imaginable... Et même plus loin.
A walk on the white side est disponible aux éditions Inceptio depuis le 26 juin 2019. Vous pouvez retrouver le roman au format papier et numérique sur leur site. Le lien est en commentaire !
2. Une promenade sur le fil de la vie
En lisant le résumé et le début du livre, j'avoue avoir été assez dubitative sur cette histoire. Comme vous le savez, la romance, c'est loin, loin, loooooooooooin d'être ma tasse de thé, et donc j'ai eu un peu de mal à m'attacher au livre. Et puis, soudain, il y a commencé à avoir quelque chose d'un peu étrange et je me suis dit qu'il y avait quelque chose de pourri au royaume du Danemark. Et au final, j'ai pas trop compris comment, mais j'ai adhéré totalement à l'histoire et je me suis laissée entraîner par l'autrice.
Cette histoire est extrêmement trompeuse et doit être prise avec d'énormes pincettes. A force de mystères et d'inexpliqués, on en vient à douter sur tout ce que l'on lit, et la fin du texte m'a parfaitement confortée dans cette idée. Il est impossible de savoir quand et si l'autrice vous mène en bateau parce que tout est fait pour vous embrouiller le cerveau. Ce livre, il faut le voir comme un énorme puzzle où pour démêler le vrai du faux, le lecteur doit lui aussi enquêter et lire entre les lignes.
Et c'est cet entremêlement de sous-lectures qui m'a fait chaviré et adoré ce livre. J'aime la complexité, et sous son apparente simplicité, l'histoire regorge de messages qui peuvent être interprêtés de tellement de façon qu'on se retrouve avec un livre que le lecteur peut s'approprier et lire comme il le veut. Ce qui est réel et ce qui ne l'est pas, au final, c'est à vous de le décider. Je trouve cette liberté d'interprétation juste géniale, et les attentes de lectures sont constamment renouvelées au fil de la lecture tant les méninges fonctionnent pour trouver des indices.
Ce que j'ai beaucoup apprécié dans ce livre, c'est aussi la recherche sur la forme. Déjà, le style de l'auteur est incroyable, tout doux, on se sent plutôt bien en lisant, avec des tournures de phrases très jolies et poétiques par moment. Je trouve l'écriture super addictive et très, très fluide, on rentre dans l'histoire sans aucun problème et on se laisse simplement guider (attention à ne pas vous laisser totalement absorber par le livre toutefois, c'est dangereux). Ensuite, comble du bonheur pour moi, c'est pas juste du récit. Il y a des mails aussi, et la forme des chapitres, classés par dates, m'a énormément plu puisque ça se lit et se coupe facilement. On peut limite lire un chapitre par jour et rentrer totalement dans la peau des différents personnages.
Les personnages, parlons-en ! Je l'ai ai beaucoup, beaucoup aimé, tout simplement parce qu'ils s'affranchissent totalement des tabous. C'est un excellent point : les amateurs de romance y trouveront forcément leur compte, mais ceux plus frileux sur le sujet - coucou - également, étant donné qu'on peut soit lire ces derniers dans leurs relations, soit dans leurs psychologies. Tous les personnages ont des enjeux, un but d'exister, des sous-intrigues complexes et des secrets, qu'il faut parfois percer. Il y a pas mal de sous-entendus entre certains personnages qui sont laissés dans le flou et à l'interprétation du lecteur, ce qui fait qu'on peut soit voir l'intrigue comme une romance très contemporaine et progressiste, soit comme un tableau de la vie humaine qui se lie et se délie. J'ai énormément apprécié que le côté romance ne soit pas trop prononcé, car il a aussi permis de laisser s'installer le côté fantastique de l'histoire. Mais je ne vous dirais rien dessus, parce que ça vous gâcherait la découverte.
Parmi les personnages, j'ai beaucoup aimé celui de Solveig, qui est en quelques sortes une anti-héroïne bourrée de défauts, mais tout en représentant une image de femme forte et indépendante. Le message féministe est très présent ici, et ça fait du bien. Les personnages ne sont pas des "femmes à [mec random]", ce sont des femmes tout court, représentées en tant qu'individu et surtout en tant qu'humaines.
Les personnages secondaires sont tout aussi extraordinaires, tout simplement parce qu'ils vivent leur vie. L'histoire ne s'arrête pas pour laisser la place à l'intrigue principale, ils évoluent tout au long du livre et ça crée des sous-intrigues super intéressantes qui ouvrent la réflexion sur la relation de couple, la grossesse, la tromperie, le libertinage également. Toutes les portes sont ouvertes, non pas pour pointer du doigt, mais au contraire pour montrer que ça fait partie de la vie et que si ça peut parfois être dramatique, bah on finit toujours par se relever et avancer. Je trouve que c'est un joli message optimiste, beaucoup de personnes peuvent se retrouver dans ces personnages très humains que l'on voit évoluer à la fois en arrière-plan et au devant de la scène. Ce sont ces messages que j'ai le plus apprécié dans l'histoire : on sort des sentiers battus, on brise les tabous et on dédramatise.
Dans l'ensemble, cette histoire est une jolie découverte qui m'a fait totalement sortir de ma zone de confort, perturbé au possible. Elle allie messages forts et sous-textes un brin poétique sur fond de romance, de policier et de fantastique. C'est un joli petit bijou totalement inclassable qui mérite amplement d'être découvert. A emporter sur la plage entre deux bouteilles de crème solaire.
N'écrivez pas dedans par contre, juste au cas où.
3. Un petit extrait ?
Une spatule et ma louche à la main, je remarque intriguée un tiroir ouvert. Je ne me souviens pas y avoir touché. C'est un signe ! Ma louche a trouvé son écrin. Un carnet y est déjà installé. Je troque mes ustensiles contre lui et le feuillette. S'il s'agit de recettes, je le refile à Elise, sinon, poubelle. Sur sa couverture, quelqu'un a griffonné "The White Side". Cela me fait penser à une chanson de Lou Reed, Walk on the Wild Side. Le calepin a l'air ancien, il a cette odeur de vieux papier jauni. Je l'ouvre, les pages sont noircies à la main, en anglais. On dirait une sorte de journal, des dates y sont inscrites, janvier 2019. Je cherche si un prénom est écrit au début, l'ancien locataire a dû l'oublier dans son déménagement, mais je n'avais pas notion qu'il était anglais, pourtant je l'ai croisé à plusieurs reprises. Je dépose le carnet sur le plan de travail à la recherche de son numéro. Une bourrasque me fait sursauter, je suis pourtant certaine d'avoir fermé toutes les fenêtres de la maison. C'est si virulent que le calepin atterrit au sol.
Je cherche d'où provient le courant d'air, mais malgré mes explorations n'en trouve pas la provenance.
Je ramasse le petit cahier qui gît, comme une feuille morte en plein automne - manquerait plus qu'un sanglot long des violons - et fait le grand écart tel un gymnaste accompli.
Je tourne une page, deux, trois. Feuillette à nouveau le carnet, me frotte les yeux. Il est vierge. Aucun mot n'y est inscrit. Rien, que dalle.
Et voilà ! Je vous laisse sur un terrible cliffhanger qui, je l'espère, vous donnera envie d'en savoir plus. Je vous fait des bisouilles, bonnes vacances à ceux qui partent cet été, et à très bientôt pour de nouveaux articles !