Fire & Gasoline (Terminé)

Retour de flamme

Daryl n'a pas décroché un mot de tout le trajet. Il s'est contenté de vérifier que j'allais bien juste avant de prendre le volant. Je lui ai proposé de conduire, voyant son état de nerf mais il a refusé catégoriquement. Au vu de la situation, j'ai préféré le laisser se calmer à sa façon pendant qu'il me ramenait chez lui. Après une douche bien méritée, je retourne dans le salon où je trouve mon homme, assis sur le canapé, une bière à la main, exactement dans la position où je l'avais laissé. Il a l'air plongé dans ses pensées. Je m'avance doucement vers lui.

« Ça va ? »

Il lève enfin la tête vers moi. Ses yeux parcourent mes jambes nues, glissent le long de mes hanches, s'attardent sur les formes visibles sous mon tee-shirt, caressent les traits de mon visage avant de se planter dans les miens. Un léger frisson me parcourt l'échine.

« Ouais. »

Je connais très bien ce « ouais ». C'est le « ouais » du mec qui veut jouer les durs et faire comme si rien ne l'atteignait alors que je sais très bien que la soirée a été un sacré coup dur pour lui. Elle en a aussi été un pour moi. Je pensais qu'on en avait fini avec Julio. Même si finalement, inconsciemment, nous savions aussi bien l'un que l'autre que ça ne pouvait pas être aussi simple. Un peu au hasard, ne sachant pas quoi dire, je m'avance vers lui et m'accroupit juste à côté de ses jambes, posant une main sur son genou.

« Ça a pas l'air. »

Il ne baisse pas les yeux vers moi. Je laisse reposer ma tête contre sa jambe, attendant patiemment qu'il me réponde. Puis il soupire.

« J'suis énervé, princesse.

-Contre Julio ?

-Pas seulement. »

Voilà, j'en étais sûre ! Il va culpabiliser à mort parce qu'on s'en est pris à lui alors que j'étais dans les parages. Putain, j'aurais de la chance s'il me renvoie pas chez Diego dès demain ! J'appuie doucement sur son genou pour attirer son attention. Lorsqu'il pose enfin les yeux sur moi je lui adresse un sourire.

« Je vais bien. T'as pas de raison de t'en vouloir. »

Il me contemple longuement. Un sourire tendre vient finalement étirer ses lèvres et il me saisit la main.

« Viens là. »

Il me relève et m'attire contre lui, m'obligeant à m'installer sur ses genoux. Puis il entoure ma taille de ses mains et me colle à lui, observant mon visage avec attention, comme pour en saisir tous les détails.

« T'imagines dans quel état je serais si t'avais pas été là, ce soir ? »

Honnêtement, je ne préfère pas. A quatre contre un, il n'avait aucune chance. Du bout des doigts, j'effleure sa lèvre inférieure fendue que j'ai désinfecté en rentrant.

« Heureusement que ta copine est extraordinaire.

-Prends pas la grosse tête non plus. »

Je souris. Il dépose un léger baiser sur mes lèvres. J'ai très envie d'en réclamer un plus...intense mais j'ai peur de lui faire mal. Son pouce glisse sous mon tee-shirt pour caresser doucement ma peau.

« Tu devrais aller dormir, crevette. »

Je hoche la tête. Cette soirée m'a épuisée.

« A une condition.

-Laquelle ?

-Tu me promets que tu passeras pas la nuit à t'autoflageller. »

Il laisse échapper un rire et passe une main dans mes cheveux mouillés.

« Tu m'accordes combien de temps, alors ?

-Une heure, pas plus.

-Une heure ? J'aurais jamais le temps de me faire tous les reproches que je veux.

-M'en fiche ! T'auras pas une minute de plus, dans une heure t'es dans ton lit pour me chanter une berceuse. »

Il rit de nouveau avant de secouer la tête.

« Je vais pas me coucher, crevette. Pas avant d'être sûr qu'on risque rien ici.

-Tu crois qu'il viendrait ici en pleine nuit ?

-J'en sais rien. »

Cette idée fait se dresser les cheveux sur ma nuque. J'ai l'impression que ce cauchemar ne finira jamais. Daryl grimace :

« On va peut-être devoir se planquer quelques temps... »

Je baisse la tête. Daryl serre une main autour de ma cuisse.

« Sois pas triste, princesse...

-Je suis pas triste. »

Je me force à lever le nez vers lui.

« Je suis juste...découragée. »

Il acquiesce en comprenant ce que je veux dire. Puis il caresse doucement mon visage.

« Tu sais que t'es pas obligée de supporter tout ça...

-Dis pas de conneries. »

Je refuse ne serait-ce que d'envisager de le quitter. Ses doigts effleurent ma peau, glissant lentement sur mon front, à la racine de mes cheveux, puis sur l'arête de mon nez, mes joues, ma mâchoire et mes lèvres, comme pour en mémoriser le contour. Je chuchote :

« Pourquoi il t'en veut autant ? »

Je n'arrive pas à comprendre. Il me manque une donnée. Daryl soupire.

« Je sais pas, crevette. Je crois qu'il est juste malade dans sa tête. »

Mouais, pas sûr. Il me paraît beaucoup trop intelligent et machiavélique pour qu'on puisse expliquer son désir de vengeance par un quelconque désordre mental.

« Qu'est-ce qu'il veut, cette fois ?

-Aucune idée. Mais ça doit être important pour qu'il trahisse sa parole. »

Tout ça n'a aucun sens. Il a épargné Daryl la dernière fois parce que j'ai obéi à ses ordres. Et ce soir, il envoie ses hommes pour le tabasser mais sans arme ? C'est incompréhensible.

« Alors on fait quoi ? On appelle les flics ?

-Je préfère pas trop attirer leur attention sur moi... »

A ce stade, je ne vois plus qu'une seule solution : partir. Partir loin, et recommencer à zéro en espérant que Julio ne nous retrouve jamais. Passer notre vie à se cacher. Rien de très réjouissant. Daryl pose ses mains sur mes cuisses pour les caresser doucement.

« Tu vas retourner à la planque. »

Génial.

Je déteste vraiment cet endroit. Et Lazslo aussi. Si je dois y retourner, je ferais mieux de le laisser à Lorelei pour qu'elle me le garde. Je n'aurais qu'à lui dire que Daryl et moi on part en vacances. Je souffle :

« Et le travail ?

-Tu pourrais poser tes congés ?

-Je suis censée les poser une semaine à l'avance...

-Mais tu pourrais demander ? »

Je soupire. Mes absences à répétitions vont finir par vraiment m'attirer des ennuis... Déjà que ma relation avec Sam n'était pas au beau fixe ! J'aurais de la chance s'il accepte.

« Ouais. J'appellerai Sam demain.

-Ok. »

Daryl dépose un léger baiser sur mes lèvres.

« Va dormir, maintenant.

-Je préfère rester avec toi.

-T'as besoin de te reposer, crevette.

-M'en fiche. »

Au vu des évènements, je sens qu'on ne va pas passer beaucoup de temps ensemble ces prochains jours. Alors je veux profiter de sa présence tant que je peux encore. Je me lève pour m'asseoir sur le canapé à côté de lui et m'allonge, posant ma tête sur ses genoux. C'est assez inconfortable mais sa main qui glisse dans mes cheveux suffit à me bercer et je sombre dans le sommeil.