Fire & Gasoline (Terminé)

Salut papa

Samedi

Ça fait un peu plus d'une semaine que je me suis installée chez Diego. J'ai fini par m'y faire. Je ne sais pas combien de temps je vais encore rester ici mais la situation me paraît un peu plus supportable depuis que Daryl passe plus souvent. La plupart du temps, il me vient me voir en coup de vent, dans la soirée, reste moins d'une heure et repart. Mais rien que ça, ça me fait du bien.

Comme promis, il m'a trouvé un autre téléphone pour que Julio ne puisse plus entrer en contact avec moi. J'ai accepté de bout des lèvres. La dernière fois que j'ai essayé de l'empêcher de me parler, je me suis retrouvée avec un flingue sur la tempe. Mais voilà trois jours que j'utilise ce nouveau portable et rien. Je m'autorise à espérer que cette fois, je me sois débarrassée de sa voix pour de bon.

Malgré tout, il y a quelque chose qui me perturbe. Je n'y avait pas fait attention sur le moment mais...quand Julio m'a parlé de la famille de Daryl, il a dit quelque chose d'assez inquiétant : c'est pas parce que je peux pas t'approcher que je ne garde pas un œil sur toi. J'en ai parlé à Diego mais il s'est contenté de me dire que je ne devais pas m'inquiéter, comme si ça allait m'aider. Logan a essayé de me rassurer en pointant le fait que Julio ne pouvait pas s'approcher de moi. Et je me suis rangée à son avis, bon gré mal gré. De toute façon, je ne peux pas faire autrement. Si je commence à psychoter, je suis foutue.

Qui dit nouveau téléphone, dit nouveau numéro. Heureusement, je n'ai pas grand monde à qui le donner : Lorelei, Viktor, Sam et...mon père. Samedi après-midi, je décide donc de l'appeler.

« Allô ?

-Salut, papa. C'est Axelle.

-Axelle ? Eh bien, voilà une revenante. »

Sans déconner. On ne s'est pas parlé depuis son passage à New-York qui s'était assez mal fini. Quand je pense à tout ce qu'il s'est passé depuis...Toutes ces choses qu'il ignore sur ma vie.

« Ouais, je...j'ai été assez occupée.

-Je vois. »

Sa voix est particulièrement froide, même pour lui. Je crois qu'il n'a toujours pas digéré mon coup de gueule au restaurant.

Et après c'est moi la gamine !

Je souffle bruyamment avant de reprendre.

« Je voulais juste te donner mon nouveau numéro de téléphone...

-Pourquoi tu as changé ?

-Parce que j'ai changé de portable.

-Tu as cassé l'autre ?

-Ouais. »

Non mais qu'est-ce que ça peut lui faire ? Je ne peux m'empêcher de lever les yeux au ciel en l'entendant prendre son ton paternaliste à deux balles, comme si c'était lui qui avait acheté mon nouveau téléphone.

« Du coup enregistre ce numéro...au cas t'aies envie de m'appeler. »

Je n'ai pas pu retenir l'amertume dans ma voix. Mon père ne m'a pas contactée depuis presque trois mois. C'est comme si je n'existais pas pour lui. Il laisse passer un silence avant de changer de sujet :

« Simon t'a envoyé une carte postale depuis sa colonie de vacances. Tu l'as reçue ? »

Vraiment ?

Sa mère a dû adorer l'idée. Je n'ai rien reçu avant de quitter mon appartement, mais peut-être que la carte est arrivée pendant mon absence. Je ressens un petit pincement à l'estomac en pensant à mon chez-moi. J'espère pouvoir y retourner bientôt.

« Euh...ça me dit rien...Elle a peut-être du retard.

-Oui, sûrement. »

Je me racle la gorge avant de passer aux questions d'usage.

« Comment va Sharon ?

-Bien. On a passé une semaine de vacances chez sa sœur.

-Super. »

Honnêtement, je ne sais pas quoi dire. J'ai l'impression que nos rapports sont encore pire qu'avant depuis mon anniversaire. Mon père ne dit rien, laissant s'étirer un silence gênant. Je décide donc de mettre un terme à la conversation.

« Bon...je dois y aller, papa.

-Ok. Donne-moi des nouvelles.

-Oui. A bientôt ! »

Il raccroche sans répondre. Je laisse tomber mon téléphone sur mon lit, blasée par cette conversation catastrophique. Décidément, je crois que je n'aurais jamais une relation normale avec mon père.

Comme si t'étais normale.

Je secoue la tête rageusement. Bon sang ça fait des années que c'est comme ça et malgré tout ça m'atteint encore ? C'est vraiment ridicule. Agacée, j'attrape mes chaussures et descend pour aller faire un tour dans le jardin.