Fire & Gasoline (Terminé)

Monsieur et Madame Tout le Monde

ATTENTION: ce chapitre contient une scène à caractère sexuel.

Lorsque j'ouvre les yeux, la chambre d'hôtel pourrie est plongée dans l'obscurité. Le réveil affiche 2h03. Il me faut quelques secondes pour me remémorer comment je suis arrivée ici.

J'ai craqué, évidemment.

En réalité, la perspective de pouvoir de nouveau dormir avec Daryl me tentait tellement...je n'ai pas pu résister. Pour ma défense, je ne lui ai pas adressé un mot depuis notre conversation dans la voiture. C'est puéril mais je ne voudrais pas qu'il croit que je suis à sa botte, prête à tout lui pardonner. Au pied du lit, Lazslo laisse échapper de petits ronflements. Mais je n'entends pas ceux de mon homme. Je me retourne avec précaution. Daryl est appuyé contre le mur, les mains sur ses jambes repliées, perdu dans ses pensées. La lueur qui perce à travers les stores merdiques me permet de remarquer sa poitrine qui se soulève rapidement et son front luisant de sueur. Je pose une main sur sa jambe.

« Ça va ? »

Je connais trop bien ce genre de symptôme pour ne pas les reconnaître. Un cauchemar. Daryl me jette un regard sombre.

« Je t'ai réveillée ? »

Je secoue la tête. En réalité, c'est probablement le cas mais inutile de le faire culpabiliser.

« Non. J'ai pas pris mes médicaments, alors... »

Alors je vais probablement pas me rendormir !

Il hoche la tête. Il n'est probablement pas réveillé depuis longtemps, à en juger par son état. Je me redresse pour m'approcher de lui.

« T'as fait un cauchemar ? »

À ce mot, son souffle s'accélère un peu plus et il hoche la tête, les yeux perdus dans le vide.

« J'ai rêvé qu'il s'en prenait à toi. »

Je penche la tête sur le côté, attendrie. Cette seule idée a l'air de le bouleverser. Lui qui est toujours si rassurant, si insouciant... Le voir comme ça me serre le cœur. Avec douceur, je me glisse sous son bras pour poser ma tête sur son torse. Je peux entendre les battements affolés de son cœur se calmer lentement tandis que sa respiration s'apaise. J'aimerais pouvoir lui dire que tout va bien, que je ne risque rien et lui non plus. Mais c'est faux. Alors que je cherche un moyen de le rassurer, une idée me traverse l'esprit.

« On pourrait partir. »

Daryl ne répond pas. Sa main glisse le long de ma cuisse avec légèreté. Je reprends :

« On quitte le pays, on va s'installer ailleurs. On recommence tout à zéro. »

Il pousse un profond soupir avant de répondre.

« Et ton père ?

-Il verrait pas la différence. »

Et le pire, c'est que cette pensée ne me fait même pas mal. Mon père et moi sommes devenus deux étrangers depuis longtemps. Daryl se penche pour déposer un doux baiser dans mes cheveux.

« Tu partirais avec moi ? Tu laisserais tout tomber ?

-Oui. »

Sans la moindre hésitation.

« Même si je suis un gros con ? »

Je pouffe.

« Oui, même si t'es un gros con. »

Je rêve ou son cœur s'est remit à battre frénétiquement ? Je souris.

« Tu nous imagines ? Monsieur et Madame Tout le Monde. Un couple sans histoires avec un chien, un jardin et une machine à faire des jus de fruits. Je serais la femme au foyer et toi tu iras travailler.

-Pourquoi ça serait pas moi l'homme au foyer ?

-Parce que tu pourras jamais passer une journée avec Lazslo sans que vous vous écharpiez. »

Il laisse échapper un petit rire. J'aime tellement l'entendre rire.

« Tu passeras tes journées dans un bureau et en rentrant tu mettras les pieds sous la table pendant que je ferais les tâches ménagères.

-Toi ? Les tâches ménagères ?

-Je pourrais apprendre à utiliser un aspirateur...

-Et on aurait des enfants ?

-Plein ! Une ribambelle de mômes insupportables dont je m'occuperais à longueur de temps... Les couches, les biberons, les devoirs, les activités extra-scolaires... »

Quelle horreur !

« Et quoi d'autre ?

-Le dimanche on fera des promenades en forêt...et tu mettras un pull autour du cou.

-C'est obligé ?

-Oui. Et je ferais des tartes aux pommes pour la fête des voisins. »

Il éclate de rire, ce qui me fait sourire à mon tour. Gagné ! Je me retourne vers lui, l'air fier de moi. Une fois son hilarité calmée, il me caresse tendrement le visage.

« Ma puce, je crois que nous imaginer comme ça c'est encore plus flippant que mon cauchemar.

-Tu me crois pas capable de cuisiner, hein ?

-Je te crois pas capable de rester à la maison pour t'occuper des enfants et du ménage pendant que ton mari travaille. »

Ses yeux brillent dans l'obscurité. Son pouce effleure mes lèvres.

« Ça fait partie des choses qui me plaisent chez toi... »

Je m'enflamme de bonheur sous son regard énamouré. Quand il me regarde comme ça j'ai l'impression d'être la chose la plus précieuse du monde. Je pose ma main sur la sienne.

« Si tu préfères, on peut partir et se créer de nouvelles emmerdes ailleurs.

-J'ai déjà essayé ça et jusqu'ici on peut pas dire que ça soit une réussite... »

Je baisse les yeux. Il faut se rendre à l'évidence, où que nous soyons, Julio voudra se venger. Même si c'est la dernière chose qu'il fait dans sa vie. Et je ne tiens pas à passer la mienne à me cacher. Autant l'affronter ici et maintenant. Et se débarrasser de lui définitivement. Daryl attrape ma main dans la sienne et l'approche de ses lèvres pour embrasser délicatement ma paume. Je sens un frisson me parcourir le dos et me redresse pour approcher mon visage du sien. Mon regard glisse rapidement sur sa bouche avant de se planter dans le sien.

« On va s'en sortir. Tous les deux. »

Comme pour sceller cette promesse, j'approche mon visage du sien pour embrasser ses lèvres. Il se laisse faire tandis que ma langue vient caresser la sienne avec douceur. Puis il lève la main pour venir caresser mes cheveux et agripper ma taille. Sans interrompre notre baiser, je passe une jambe de l'autre côté de son corps et fait glisser mes mains sur son torse. Il passe les siennes sur mes fesses, puis sur mes cuisses qu'il caresse sensuellement. À ce contact, ma peau semble se réveiller, elle devient brûlante, affamée. Il murmure tout contre mes lèvres :

« Je veux pas qu'il t'arrive quelque chose...

-Il m'arrivera rien. »

C'est une évidence dans mon esprit. Tant qu'il est là, il ne peut rien m'arriver. Je me rends bien compte que le danger est grand, pour nous deux, mais je ne peux pas envisager une seconde qu'il nous arrive quelque chose. C'est impossible. Pas après tout ce qu'on a traversé. Fiévreusement, Daryl attrape ma taille pour me faire basculer sur le côté et venir se poster au dessus de moi. Ses lèvres dévorent les miennes comme si c'était la dernière fois. Je glisse une main dans ses cheveux. Finalement, je suis bien contente de ne pas dormir seule ce soir...