EUPHORIA [T1]

23. DAHN

Mes cheveux étaient indomptables et la couleur me donnait un air pâle. Je voulais les tresser mais je ne savais pas le faire. Peut-être que je pourrais demander à Kanefer, quand elle rentrera. Elle était en déplacement et en son absence, je devais rester au palais car le système était toujours puni.

Je me changeai pour la dixième fois et décidai finalement de m'habiller plus simplement que d'habitude. Un jean pour changer avec un tee-shirt blanc. Je me regardai encore une fois, pas du tout satisfait par ce que je voyais mais je ne voyais plus que mettre.

- Isha, tu es prête ?

Je descendis rejoindre mamoune. Elle parut surprise de me voir mais à peine quelques secondes puis elle sourit juste. Il se dégageait d'elle quelque chose de très chaleureux.

- Bonjour Dahn.

- Bonjour.

- Tu as faim ? Veux-tu une pâtisserie ?

- Un fraisier ?

Elle rit avant d'aller voir une des servantes du palais. J'entrai dans le salon et balayai la pièce du regard. Pape parlait avec ses cousins, tout le monde était occupé en fait, et même les petits qui jouaient souvent avec moi, courraient partout dehors. Seul Key était dans un des salons privés.

J'hésitai et me décidai finalement à y aller. Je m'assis à côté de lui. Il s'était endormi apparemment. Je souris en l'observant. Keman ne ressemblait pas à ses frères, ni à son père d'ailleurs. Il avait la peau beaucoup plus foncée et une beauté moins délicate qu'eux.

Et pour être beau, il l'était. Ses cheveux bouclés changeaient fréquemment de couleur, tantôt bruns, parfois d'un blond presque vénitien, mais aujourd'hui ils étaient encore plus clairs. J'avais envie d'y glisser mes doigts, de découvrir leur texture et de jouer avec.

Il sentait bon. Une odeur de nature, comme une rosée matinale dans un jardin de fleur, oui, il sentait comme un mélange de Neo et Lean, une nymphe céleste et un Univera. Son visage était tellement calme et détendu quand il dormait, il était vraiment trop mignon.

Je suis content de revoir tes cheveux gris, il avait dit. Je touchai une de mes mèches et souris. Il aimait donc bien mes cheveux gris. C'était la première fois quelqu'un me disait ça. Bon en vrai, je n'avais pas réellement les cheveux gris, ils étaient plutôt un parfait mélange de blond et de la couleur argenté. Un sujet de moquerie de plus pour les gens mais il avait dit qu'il les aimait bien.

Je vis une petite pétale survoler jusqu'à se poser sur sa joue. Je ne pus m'en empêcher, je la retirai car elle gâchait le parfait spectacle devant moi. Je souris parce qu'en me rapprochant de lui, je pouvais le voir d'encore plus près et mieux profiter de sa beauté. Sauf qu'il ouvrit les yeux.

Son regard se fit noir et glacial, j'en fus comme paralysé alors même que je savais que je devais bouger, reculer, sortir de son espace personnel. Il gronda, furieux et pesta :

- Dégage !

Et comme je ne partais pas, il me poussa, me forçant à reculer. Il me toisa de la tête aux pieds, avec cet air arrogant qu'il prenait toujours avec moi. Puis le côté dégoûté arriva, il émit un tss qui en disait long sur ce qu'il pensait de moi. Je le dégoûtais, je le sentais dans tout son être.

Je me levai et quittai le salon, sentant mes yeux se remplir de larmes. Mamoune m'appela pour me donner mon dessert mais je la contournai car je n'avais plus faim, plus envie de manger. Je m'en allai en serrant les poings et m'enfermai dans la chambre d'Isha. J'attendis que quelqu'un vienne me remplacer avant de rentrer dans notre monde interne.

Je me rendis directement chez moi, dans mon Sanctuaire. Je passai le salon en retirant ces vêtements humains dégoutants et enfila le premier kimono que je trouvai. J'allais au jardin et m'assis en position de méditation, afin de penser à autre chose et me calmer.

Assis. Ne me regarde pas, ne me regardes jamais, baisses les yeux quand tu me vois, je ne supporte pas de devoir voir ton visage monstrueux, tu ressembles à un monstre dégoûtant. Bon juste à être un jouet. Tu n'as aucune autre valeur. Tu n'es qu'un...

- Dahn ?

Je sursautai et me tournai vers B. Elle m'observa avec un air étrange et triste. Elle me regardait toujours comme ça quand elle sentait que je me replongeais dans les souvenirs de notre enfance. Elle m'entoura de ses bras et murmura :

- Je suis désolé mon frère.

- Ce n'est rien...

- Ne dis pas ça...

- Il... il avait dit qu'il aimait bien mes cheveux... je l'ai cru et...

- Et tu as pensé qu'il t'aimait bien, soupira-t-elle.

Je hochai la tête. B me serra contre elle en souriant puis elle déposa un baiser sur ma joue avant de murmurer :

- Moi, je t'aime mon frère. J'aime tes cheveux uniques, ton physique unique et ton choix d'être qui tu es ! Tu n'as pas besoin de lui, tu m'as moi !

- Merci B, chuchotai-je en fermant les yeux.

- Je ferai en sorte que tu te sentes mieux, que tu trouves ta voie, que tu retrouves ta force...

- C'est impossible...

- Non. Ce n'est pas impossible. Il faut juste virer cette pimbêche prétentieuse d'hôte qui pense que le monde tourne autour d'elle et son connard de Nere...

- Que vas-tu faire ? lui demandai-je en la regardant.

- Déclencher une guerre, répondit-elle avec un sourire sadique.