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- Viens ! me crie Keo en m'attrapant le bras.

Il me tire avec force, et je n'ai pas d'autre choix que de le suivre. De nouveaux tirs se font entendre, et cette fois, j'entends un hurlement à me glacer le sang. Je jette un coup d'œil par-dessus mon épaule, et c'est avec stupeur que je vois Laslo à terre, la jambe en sang. Les traits tirés par la douleur et la bouche crispée, il continue de me regarder malgré tout. Je suis sur le point de tourner ma tête lorsque je l'entends me crier au prix d'un ultime effort :

- ... Je ... Je me vengerais Neela. Tu m'entends ? Je me vengerais de tout le mal que tu m'as fait ! Ne l'oublie pas ! Ne l'oublie jamais, je ...

Il ne finit pas sa phrase. A la place, je l'entends pousser un nouveau cri avant d'essayer de s'éloigner du champ de bataille en rampant. Mon cœur bat toujours la chamade lorsque nous commençons à nous rapprocher de l'entrée du lycée, trop bien gardée par des bleus. Je suis tellement secouée par les évènements que je m'oblige à m'adosser contre un mur au coin d'un couloir désert et à reprendre mon souffle. J'inspire et j'expire profondément en fermant les yeux.

- Ça va ?

Je rouvre mes paupières pour m'apercevoir que Keo me regarde en arquant un sourcil. Il doit me trouver bizarre de réagir comme ça alors que Laslo a littéralement essayé de m'atteindre avec son pistolet.

- Va-t'en, dis-je laborieusement. Va-t'en avant que je te tue.

Le garçon se mord la lèvre inférieure en me regardant avec attention.

- Pourquoi est-ce que tu veux que je parte ?

- ... Parce que tu es un bleu ! Par ta faute, Laslo ne me fait plus confiance et il me pense même que je suis de ton côté !

Il essaye de poser une main sur mon épaule, mais je l'esquive aussitôt. Ma vision devient une nouvelle fois floue, alors je ferme les yeux et je respire à nouveau. Lorsque je sens que ça va mieux, je m'extirpe des ténèbres et explique calmement :

- Ecoutes Keo. Quelques couloirs me séparent de la sortie. Je vais pouvoir me débrouiller toute seule maintenant, d'accord ? Alors rends-moi un service : laisse-moi tranquille. Je n'ai pas envie d'épuiser mes munitions en essayant de te tuer.

D'accord, j'ai exagéré dans ma dernière phrase. C'était du sarcasme. Mais Keo me regarde avec un air ahuri, donc j'en conclus qu'il m'a pris au sérieux. C'est une bonne chose, j'imagine.

- Pourquoi tu changes soudainement d'avis ? C'est à cause du mec de tout à l'heure hein ?

- Ça n'a aucun rapport, clarifié-je. Je n'ai jamais été d'accord pour te suivre. C'est juste que je n'en ai pas eu le choix !

Je fixe le regard bleuté de mon interlocuteur pour lui faire comprendre l'importance de mes paroles.

- Ecoutes, je trouve que j'ai assez tué pour aujourd'hui. S'il te plaît, facilite-moi les choses. Va-t'en.

Il lâche un petit rire, et hoche la tête sans conviction. Mais il n'a pas le temps de me répondre, car une violente déflagration se fait entendre au-delà des parois.

- C'est quoi ce délire ... marmonne Keo en se mettant à scruter l'autre bout du couloir mal éclairé.

De la poussière dégringole du plafond mal éclairé. Je me mets à paniquer.

- ...Ils utilisent des explosifs ?!

- On dirait bien, me répond-il, tous les sens en alerte. Mais j'étais pas au courant. Les profs nous avaient pourtant dis qu'on en utiliserai pas ! Ils ont dû le décider à la dernière minute.

Je n'ai pas de mal à le croire. Les explosifs ne sont pas trouvable aussi facilement, et il est rare que des lycées en possèdent. J'essaye de me rassurer en me disant qu'ils ne doivent pas en avoir beaucoup sur eux.

Keo m'attrape le poignet et malgré ma réticence, j'accepte de le suivre une nouvelle fois. Dans les moments comme celui-ci, je ne réfléchis plus à ce qui est juste ou non. Je ne pense qu'à une chose : me réfugier dans un lieu sûr.

NeelaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant