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Puis elle se retourne pour se diriger dans la petite cuisine. Je hausse un sourcil, mais décide de ne rien dire. Après avoir pris ce qu'il reste de mon petit-déjeuner - c'est-à-dire le pain que j'ai fait tomber et un peu de thé -, je rejoins ma mère qui fouille les placards à la recherche de quelque chose à manger. Je m'assieds sur une chaise.

- Il paraît que tu as un examen ce vendredi, me lance-t-elle en coupant deux morceaux de pains.

- Euh ... Oui. Comment tu le sais ?

- Ton professeur de stratégie m'avait appelé, ce week-end.

Elle fait volte-face et je remarque aussitôt l'inquiétude qui ronge son visage. Un pli barre son front, ses sourcils sont légèrement arqués et sa mâchoire est tendue. Voilà pourquoi elle se comporte de cette façon. Maman est angoissée par ma faute.

- Qu'est-ce qu'il a dit d'autre ? dis-je en sentant mon pouls s'accélérer.

Elle lâche un soupir et vient s'installer en face de moi. A ma grande surprise, elle me tend un morceau de pain.

- Il a dit que tu t'étais battue avec une fille de ta classe.

Je ne savais même pas que Monsieur Richard faisait partie des spectateurs. Je grince des dents pour éviter de déferler ma haine devant ma mère. Étonnamment, celle-ci n'a pas l'air en colère contre moi. Elle continue d'arborer sa mine anxieuse.

- C'est elle qui m'avait cherchée maman, elle ... Elle était en colère parce que je n'avais pas partagé mon repas avec elle, et ...

- Je n'aurais pas dût d'inscrire dans un lycée militaire, dit-elle à mi-voix.

Je ne sais pas ce que ses yeux rouges reflètent. De la déception ? Du regret ? Mais en tout cas, j'en ai le ventre noué. Je me ratatine sur ma chaise, embarrassée. Je ne cesserai jamais d'être un boulet pour ma mère.

- Non, tu as bien fait. Je peux toujours me rattraper ! Il reste encore trois examens, tout n'est pas perdu ...

- Tu n'as pas l'étoffe d'une soldate, continue ma mère sans se soucier de moi. Tu es faible et indisciplinée. Je ne sais pas quoi faire de toi, ma fille.

Ces mots me font l'effet d'un poignard planté dans ma chair. Ma mère doit se rendre compte que ses paroles sont blessantes, car sa voix s'adoucit aussitôt.

- Allez, finit ton petit-déjeuner. Nous reprendrons cette discussion une autre fois.

- Je n'ai plus faim, dis-je d'un ton las. J'y vais, à ce soir.

Je me lève avant qu'elle n'ait eu le temps de me répondre et lui tourne le dos. Une chance que j'ai déjà préparée mon sac à dos et enfilée mes Rangers aux pieds. Je suis sur le point de m'éloigner vers le vestibule quand j'entends ma mère m'appeler.

- Neela, attends.

Je me retourne en fronçant les sourcils. Elle ne tarde pas à venir.

- Oui ?

Elle croise ses bras sous sa poitrine et me dévisage un petit moment sans rien dire. Quand elle parle enfin, sa voix chevrote un peu.

- Ne t'attire plus d'ennuis ma fille. D'accord ?

Je commence vraiment à trouver son attitude bizarre. Ce n'est pas dans ses habitudes de me dire ça, et encore moins de s'inquiéter à ce point pour moi. Monsieur Richard a vraiment dû lui faire peur. Peut-être qu'elle pense que je ne réussirais pas l'examen de ce vendredi.

- D'accord.

Elle se détend un tout petit peu, et hoche la tête avant de s'en aller sans prévenir.

NeelaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant