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Je n'arrive pas à m'empêcher de jeter un coup d'œil à Opale. Celle-ci me fait signe de la tête de me lever, alors je m'exécute d'un air prudent. La plupart des autres adolescents ne pipent mot, mais certains se chuchotent entre eux.

- Maintenant, puisque vous affirmez que mon cours ne vous ennuie pas, répétez-moi ce que je suis en train d'expliquer à la classe depuis le début de l'heure.

Ses yeux rouges brillent d'une lueur indéfinissable, accompagné par un sourire vicelard. Vu le pli sur son front et ses rides sur le visage, il doit avoir dix ou quinze ans de plus que ma mère. Mais je ne pense pas qu'il a des enfants. Ou du moins, je l'espère : car, si c'est le cas, ils ne doivent pas être très heureux de l'avoir comme père.

Des gouttelettes de sueur perlent sur mon front. Je n'ai rien écouté, c'est vrai. Mais c'est seulement parce que je manque de sommeil. Car ce n'est pas dans mes habitudes de rêvasser inutilement, encore moins en cours. Néanmoins, je refuse de perdre la face devant ce professeur qui me méprise tellement que chaque occasion est bonne pour m'humilier devant toute la classe.

- Euh ... Avec tout le respect que je vous dois, je trouve cela un peu bizarre que vous vous interrompiez en plein milieu pour me demander de faire le cours à votre place ?

Du coin de l'œil, j'arrive à voir Opale se retenir de rire. Le visage de Monsieur Richard, le professeur de stratégie, devient rouge pivoine.

- Vous faites bien preuve de désinvolture, pour une fille qui n'a même pas obtenue la moyenne le trimestre dernier. Mais continuez, c'est très bien. Plus vous ferrez le clown dans ma matière, qui est pourtant cruciale pour la réussite de votre mission de juin ... Plus vous aurez de chance d'échouer.

Il me regarde de haut en bas, les narines gonflées, les joues aussi rouges que ses iris. Je reste abasourdie par ce qu'il est en train d'insinuer. Il veut que je me fasse tuer par des bleus en mission. A l'instar de Livia Mancini et de Xavy Daniel.

- Une rouge faible comme vous ne mérite pas d'être qualifiée de rouge, dit-il avant de faire mine de se retourner.

Je sais que c'est stupide. Que je ne devrais pas répondre à ses provocations. Que je devrais l'ignorer, comme j'ai tant l'habitude de faire avec Madeline, Thane et Adriel quand ils viennent me chercher des noises. Mais cette-fois, mon sang bouillonne dans mes veines. La remarque de mon professeur me met dans une rage folle. D'accord, je peux plus ou moins tolérée d'être moquée à cause de ma faiblesse. C'est très humiliant, mais c'est la vérité Mais j'ai beaucoup de mal avec les menaces de mort.

Une phrase acerbe fuse de mes lèvres avant même que je réalise ce que je suis en train de dire.

- Si je n'ai pas la moyenne à votre matière, c'est sûrement parce que vos cours sont à mourir d'ennui.

Je n'ai pas le temps de réagir. Monsieur Richard élance son poing sur mon nez si violemment que je vacille avant de tomber à la renverse. J'entraîne ma chaise avec moi, et il se fracasse sur le sol en un bruit théâtral. J'ai l'impression que les autres élèves gloussent, mais je n'en suis pas sûre parce que tout ce que j'entends, ce sont mes oreilles qui bourdonnent et mon cœur qui bat à cent à l'heure. Je me relève avec prudence et vient porter ma main à mon nez. Il saigne.

- ... Est-ce que je peux aller à l'infirmerie ? demandé-je modiquement.

Je n'aurais pas dû poser cette question, car le professeur me frappe à nouveau. Je vois des points lumineux qui dansent dans mon champ de vision, et je dois me retenir au bord de la table pour ne pas tomber.

- A la fin du cours ! s'écrie-t-il en agitant le bras. Encore une nouvelle remarque et je vous mets à la porte !

NeelaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant