La semaine se déroule très rapidement. Avec Opale, je m'entraîne chaque jour en vue de l'examen du vendredi, si bien que nous sommes toujours très fatiguées lorsqu'il est l'heure de rentrer chez nous. Nous ne sommes pas les seules : la plupart des autres lycéens s'entraînent également, ce qui fait qu'il est parfois difficile d'accéder au champ de tir ou au parcours d'obstacle, tellement il y a de monde.
La nuit avant l'examen, je n'arrive pas à fermer l'œil. Je ne cesse de me dire « et si je n'y arrive pas ? », « et si les professeurs refusent de me faire passer en année de première ? », « et si ... ». Les minutes s'égrènent et je reste là, à fixer l'obscurité. Je ne me lève même pas pour attraper mon carnet de croquis, car je sais qu'il faut que j'essaye de dormir. Mais je n'y arrive pas, et ça m'agace. J'ai à peine fermé les yeux que mon réveil sonne aussitôt. Je me redresse en grommelant. Puis je me prépare et va au salon.
Ma mère est assise sur le canapé, le dos bien droit et les mains croisées sur ses cuisses. J'ai l'impression qu'elle m'attend depuis longtemps.
- Euh ... Bonjour maman, dis-je.
Elle hoche la tête, sans rien dire d'autre. Si son attitude de ce lundi était inhabituelle, celle d'aujourd'hui l'est encore plus. Je vais à la cuisine pour manger du pain avec un peu de la margarine végétale, et une fois que je suis de retour dans le salon, maman se lève et me dit :
- Dépêche-toi, je vais t'amener au lycée.
Elle essaye de garder un air sérieux, mais ses yeux expriment une angoisse mal dissimulée. Comme ce lundi. J'imagine qu'elle s'inquiète pour mon examen de cet après-midi. Ça me fait bizarre de la voir comme ça. Elle était stressée toute la semaine. Elle qui ne se soucie jamais de moi d'habitude ...
- Tu es sûre ? demandé-je. Je peux prendre le bus, tu sais ...
- Ne discute pas. Nous allons prendre la voiture, point. Il ne faut pas que tu sois en retard pour ton examen.
- Mais mon examen a lieu cet après-midi !
- Et alors ? Si tu arrives en avance au lycée, tu ferras bonne impression. Allez, dépêche-toi de manger et va prendre ton sac. Je t'attends en bas.
Je fais ce qu'elle me demande, et quitte l'immeuble pour rejoindre ma mère dans sa voiture. Elle ne me laisse pratiquement jamais monter dessus, car elle l'utilise pour se rendre à son travail. Ça me fait bizarre de m'asseoir à côté d'elle sur le siège passager, et de la voir au volant. Elle ne parle pas de tout le trajet. Une fois que nous sommes devant mon lycée, je suis sur le point d'ouvrir ma portière lorsqu'elle me dit :
- N'oublie pas ma fille. Pas de bêtises.
Je hoche la tête.
- Ne t'inquiète pas maman.
Elle pose une main sur ma joue. Ce contact me fait sursauter. Je n'ai tellement pas l'habitude qu'elle se montre tactile avec moi ... Elle a l'air de vouloir rajouter quelque chose, mais elle hésite.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
Elle lâche un soupir et hoche négativement la tête.
- Obéis aux ordres, d'accord ? Fais ce qu'ils te disent de faire. Il faut ... Il faut que tu réussisses ton examen.
- D'accord.
Elle esquisse un sourire, puis me fait signe de sortir.
- Allez, vas-y. A ce soir Neela.