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- Je ne peux pas vous laisser sortir, votre Altesse.

Je lance un regard froid aux gardes à l'entrée du palais. Cela fait depuis plusieurs minutes que je tente de les convaincre de me laisser sortir. Sans succès.

- Je dois sortir et chercher le remède pour son Altesse ! Dis-je, en colère. Ne comprenez-vous pas ? Il pourrait mourir !

- Ordonnez à un serviteur d'amener ce dont vous avez besoin, me répond-il. Les ordres sont clairs.

Je me tourne vers Birsan, frustrée. Je dois réussir à sortir de là, avant qu'Azref ne soit remis sur pieds. Aujourd'hui est une opportunité, il avait de la fièvre depuis hier soir, et je n'y avais fais simplement pas attention. J'ai appelé le médecin, et je les ai avertis que je sortirais chercher des herbes afin de le guérir.

- Je suis avec son Altesse, s'exclame Birsan. Nous allons chercher des herbes pour le prince, les mêmes herbes qui ont servis de remède à ton enfant.

- Birsan, ce n'est... commence le garde.

- Souhaites-tu réellement que le seul héritier d'Althea périsse ? Le coupe-t-elle.

Il soupire puis jette un coup d'œil à l'autre garde. Et enfin, les deux ouvrent les portes.

- Bien. Mais je vous laisse deux heures, après cela, j'enverrais des gardes vous chercher.

Birsan hoche la tête, et avant qu'ils ne changent d'avis, nous quittons rapidement le palais. Une calèche nous attendait à l'extérieur, et nous y montons.

Dame Luzia m'a envoyée une lettre, m'invitant à prendre le thé, et Reynald en a profité pour me passer un message. Entre les lignes, il m'écrivait les formes des lettres que je devais déchiffrer. Bien heureusement, c'est une technique connue et maîtrisée par la famille royale.

Il m'a donné quelques adresses d'endroits bien précis, des couvertures. Une pharmacie, des restaurants, des maisons, des écoles. Je pouvais me rendre dans chacune d'entre elles selon mes besoins et chacun avait un code secret.

Alors nous nous rendons à une pharmacie ; elle est connue pour vendre des herbes rares. Enfin, c'est ce qui est dit à Althea. Personne ne sait, ou tout le monde préfère ignorer que ces herbes proviennent d'Inimia.

- Nous sommes arrivés, me prévient Birsan.

Je hoche la tête, et descends de la calèche à l'aide du cocher. Avant que Birsan ne puisse descendre à son tour, je la retiens d'un geste.

- Reste là, lui dis-je. Tu surveilleras la calèche.

Elle acquiesce, ne posant pas plus de questions et je m'enfonce alors à l'intérieur de la pharmacie, le cœur battant rapidement dans ma poitrine. La pièce est vide à mon arrivée. Je m'approche du comptoir, la cape recouvrant mes cheveux.

- Bonjour, ma Dame, en quoi puis-je vous aider ? Me demande-t-il, apparaissant d'un coup.

- Mon mari s'est fait poignarder, il a été soigné cependant il ne peut bouger et la fièvre ne le lâche pas, auriez-vous un remède pour cela ?

Il hoche la tête, tentant de voir mon visage. Ma tenue pourrait lui faire penser que je suis une femme noble.

- Évidemment, je vous prépare cela tout de suite.

- Cependant, je cherche également une chose... une fleur noire, teintée de rouge écarlate.

Un silence pesant s'installe dans la pièce alors que le pharmacien se fige, son regard scrutant le mien avec méfiance pendant un instant. Il se reprend ensuite en se raclant la gorge.

- Uhm... cela est une demande très rare, suivez-moi.

Je hoche la tête. Il ouvre une porte dissimulée derrière une étagère, m'invitant à le suivre à travers un passage sombre. Il referme la porte après nous, cependant au lieu de me guider vers là où je voulais être, je sens un objet froid et pointu contre mon dos.

- Qui vous a envoyé ? Demande-t-il, le ton froid.

Je reste imperturbable, un sourire en coin étirant mes lèvres. Bien. Ils ne sont pas si dupes. Ils sont vigilants. En réponse, je retire ma cape avec grâce, laissant mes cheveux retomber en cascades sur mes épaules. Immédiatement après, je ne ressens plus l'objet contre moi, ce qui me permet de me tourner vers lui.

- Mon Dieu... Vous... vous êtes... Dit-il, en s'inclinant. Je... je suis désolé, terriblement désolé... votre Altesse.

Et il tombe à genoux face à moi, des larmes coulant de son visage. Je le fixe sans rien dire, ne m'attendant pas à une telle réaction. Étions-nous autant attendue ?

- Que vous soyez bénis... vous êtes venus, dit-il, la voix tremblante. Notre sauveuse... notre princesse !

- Relève-toi.

Il m'obéit, se relevant rapidement. Son regard a changé, il est si surpris, mais à la fois si ému... je peux comprendre, ils doivent se sentir seuls dans ce royaume qui leur est si hostile. Et voir un membre de ma famille...

- Reynald m'a indiqué cette adresse, lui dis-je. Est-ce là que je puisse trouver les tunnels ?

Il hoche vivement la tête, confirmant ce que je pensais. Reynald n'a pas été véritablement clair dans la lettre, au cas où elle aurait été intercepté. Le pharmacien m'amène alors dans une porte qui semble mener à l'extérieur, cependant il y avait une trappe dans le sol.

- Nous avions construits une quinzaine de cela, m'informe-t-il. Je suppose que sire Reynald vous a mis au courant de chaque emplacement.

- Il m'a mise au courant, effectivement, lui répondis-je. Je suis désormais responsable de la protection de nos tunnels.

Il me sourit chaleureusement. Je les protègerai de l'intérieur. Je vais devoir trouver un moyen d'intercepter les documents qu'Azref reçoit, si jamais cela concerne les tunnels, je vais devoir détruire ces documents.

Enfin, je remarque que la trappe était recouverte d'un tapis, d'un faux parquet, de pierres également. Le pharmacien me presse doucement à descendre et je m'y engage. Il referme ensuite la trappe derrière nous, et le son sourd de sa fermeture résonne dans les couloirs étroits. Nous avançons alors dans l'obscurité, guidés par le faible éclat des torches lointaines. Chaque pas résonne dans le silence pesant et mes yeux s'habituent lentement à l'obscurité des tunnels.

Et lorsque l'obscurité redevient lumière, je comprends que nous sommes arrivés. Les fameux tunnels souterrains de la résistance, des "rebelles".

L'ombre écarlateWhere stories live. Discover now