Chapitre 40-1

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— Il a l'air d'avoir retrouvé toutes ses capacités, Roméo ? railla Lynch en jetant un regard noir en direction du rideau.

— Arrête de persiffler et allonge-toi ! le rabrouai-je gentiment en m'approchant du lit.

— Persifler ? Tu nous sors les grands mots dis-moi ! En quel honneur ?

— J'espérais un peu que cela ferme ta grande bouche, mais... il faut croire que j'ai eu tort ! continuai-je sur le même ton léger et plaisantin.

Il fallait que je lui parle, je le savais, ne serait-ce que pour dissiper cette tension nocive et idiote entre lui et Connors. Avec ce qu'il nous attendait certainement comme lots de danger dans les quelques heures à venir, mettre les choses au clair ne pouvait être que bénéfique. Sauf que, je ne savais pas comment m'y prendre.

— Apparemment tu as des choses à me dire ? Enfin d'après Mister Zombie ressuscité ! me tendit-il opportunément la perche d'une voix sombre, s'attendant visiblement au pire. Tous ses souvenirs lui sont revenus ?

— Oui, me contentai-je de lui répondre ne pouvant m'empêcher de l'asticoter tandis que je me penchais vers lui. Laisse-moi regarder si les sutures ont tenu.

— Vu que je ne sens rien de chaud et visqueux couler sur ma peau, j'en déduis que oui !

— Tu peux arrêter d'être toujours aussi...

— ... ironique ? Caustique ?

— J'allais juste dire chiant, en fait !

Je crus qu'il allait sourire, mais il se reprit, se contentant de me fixer d'un regard noir.

— Et si toi tu cessais de tourner autour du pot ? Balance-moi donc l'info capitale que ton chéri veut que je sache.

— Ce n'est pas mon chéri.

— Argh ! Arrête de jouer avec mes nerfs et...

— C'est ça l'info capitale, idiot !

— Quoi ? Tu veux dire... qu'il... il ne se souvient plus de toi ? De vous ?

Le pauvre avait l'air tellement perdu, que j'eu pitié de lui et décidai d'arrêter mon petit jeu.

— Si très bien au contraire mais, quelque chose nous a ouvert les yeux à tous les deux. On s'apprécie beaucoup mais ce que nous ressentons, ce n'est pas vraiment de l'amour, lui expliquai-je sommairement et à toute vitesse, bizarrement gêné de devoir exprimer quelque chose de si intime et personnel à voix haute, comme une explication de texte. C'était tellement bizarre.

Gabe me fixait avec des yeux ronds ne sachant, de toute évidence, pas comment prendre l'information. Sans rien dire et presque timidement, il tendit la main vers moi m'invitant à revenir près de lui.

— Je, je vais aller me reposer dans le salon avec les autres, je te laisse le lit.

— Hayden ! Ce matelas est bien assez grand pour nous deux. On n'est même pas obligé de se toucher, si c'est ce que tu veux.

— Pourquoi tu dis ça ? Tu n'as pas compris ce que je viens de te dire ?

— Pour être franc, c'était un peu bizarre, m'avoua-t-il avec un petit sourire. Je ne parviens pas bien à déterminer ce qui est vrai et ce qui tient de la blague, continua-t-il d'un ton incertain alors qu'un éclair de douleur et de fatigue voilaient momentanément son regard.

C'est cela plus que le ridicule de la situation qui me ramena vers le lit, sur lequel je m'assis avant de poser fermement ma main sur le torse de Gabe pour l'empêcher de bouger.

— Maintenant tu dois te reposer. Tes points non pas lâché mais la suture est rouge et un peu gonflée, reste tranquille.

— Alors allonge-toi près de moi, comme cela je n'aurais pas à me dévisser la tête pour te parler.

Épuisée et bien trop consciente du matelas moelleux appelant au repos sur lequel je me trouvais, je ne me fis pas prier longtemps.

— Alors Hayden, j'ai vraiment bien compris ce que tu as essayé si maladroitement de me dire ?

N'ayant plus envie de me ridiculiser d'avantage, je me contentai d'effleurer ses lèvres des miennes d'un baiser tendre et léger, résistant lorsqu'il voulu approfondir notre étreinte.

— C'était quoi ça ? Un baiser d'adieu ?

— Non c'était ma réponse subtile et prudente à ta question. Tu es blessé, je suis épuisée et je me sens terriblement cruche aussi, lui avouai-je alors que malgré mes avertissements sur son état, il m'attirait dans ses bras pour me serrer contre lui.

— Soyons franc, il y a un peu de quoi, me murmura-t-il à l'oreille dans un petit rire rauque en commençant à parsemer ma peau d'une myriade de petits baisers légers.

Rattrapés par l'épuisement, nous restâmes enlacés, mon dos contre son torse, laissant le sommeil et la quiétude de ce moment de paix nous envahirent.

***

Une secousse m'ébranla dérangeant mon rêve. A la seconde, je cherchai à chasser l'importun d'une main molle et sans force, pour carrément grogner lorsque l'on me secoua encore plus fort.

— Hayden, il faut te réveiller ! me disait Remeï d'une voix agacée.

Cette nuance d'énervement dans son ton me tira du sommeil mieux que n'importe quelle gifle. Pour que Rem s'agace, c'est qu'il devait y avoir un problème.

— Quoi, que se passe-t-il ? lui demandai-je en me redressant comme un ressort.

— Rien, à part que cela fait au moins un quart d'heure que j'essaie de vous réveiller ! De vraies marmottes tous les deux !

L'inquiétude, qui n'était jamais vraiment loin, fondit sur moi, me prenant instantanément aux tripes. Craignant le pire, je me tournai vers Gabe, vérifiant immédiatement son rythme cardiaque, mais à mon grand soulagement tout allait bien. Il était juste profondément endormi.

— Les autres vous attendent, c'est bientôt le moment de partir. Tu te charges de réveiller Gabe ?

Je m'apprêtais à me pencher vers lui pour le réveiller d'un baiser, lorsque quelque chose me retint. Sa blessure avait déjà meilleure allure qu'il y avait quelques heures, mais son aspect n'était pas encore brillant. Ça et le fait que notre conversation ne l'ait toujours pas réveillé prouvait bien que son corps était loin d'avoir récupéré.

— Non, laissons-le dormir, il en a besoin, dis-je en me levant doucement, trop consciente de ce que j'étais en train de faire.

— Tu es sûre ? Je doute qu'il apprécie d'avoir été laissé à l'écart !

Personnellement je n'en doutais pas, j'en étais certaine. Mais à voir l'aspect de sa blessure et l'aura de fatigue qui l'entourait, j'étais de plus en plus certaine qu'il ne pourrait pas nous suivre, du moins, pas sans danger pour sa santé et je me refusais à lui faire courir le moindre risque superflu.

— Oui, j'en suis sûre, lui dis-je dans un murmure hésitant qui démentait mes paroles, tout en quittant rapidement la pièce avant de changer d'avis. 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant