Chapitre 15-1

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Le temps sembla s'épaissir et ralentir tandis que nous réagissions tous par réflexe. Isy s'empara immédiatement du tintement ténu que firent les couverts et l'amplifia en un son suraigu insupportable, en même temps qu'elle se jetait au sol pour éviter les projectiles acérés qui filaient vers nous.

J'allais l'imiter, les mains plaquées sur mes oreilles, lorsque j'avisai Connors, étrangement statique, apparemment indifférent à la menace aiguisée qui volait vers lui. Au moment où je m'élançai dans sa direction pour l'entraîner au sol, je vis que ses yeux avaient de nouveau cette teinte bleuté étrange. Ses pouvoirs étaient en train de s'éveiller sans qu'il s'en rende compte ! réalisai-je soudain, ce dont j'eu une confirmation cinglante à l'instant où nos corps entrèrent en contact.

Une décharge violente me traversa, me coupant le souffle tandis que nous tombions tout deux sur le sol avec brutalité. J'entendis les couverts nous frôler dans un chuintement, bientôt suivit d'une série de bruits secs lorsqu'ils heurtèrent le mur derrière nous. Maladroitement, je m'empressais de me dégager du corps de Connors, encore hébété par la décharge que je venais de me prendre. J'étais sonnée et mes membres étrangement engourdis ne m'obéissaient plus totalement. L'écho du son amplifié d'Isy résonnait toujours, ajoutant à ma confusion.

— Arrêtez ça ! entendis-je quelqu'un crier dans un gémissement douloureux.

— Seulement si vous cessez de nous attaquer ! rétorqua aussitôt Isy, de nouveau campée sur ses jambes, un air déterminé et concentré sur le visage.

— Vous avez notre parole, répondit Nel en s'avançant vers nous, les mains croisées au-dessus de sa tête en signe de bonne foi.

Le son strident qui nous saturait le cerveau, cessa aussitôt et des soupirs de soulagements s'élevèrent d'un peu partout dans la pièce.

— Vous avez là un don puissant, mademoiselle, reprit Nel en approchant encore, avant de s'arrêter à quelques pas de Connors qui était en train de se relever.

— Arrêtez votre cinéma, vous êtes plus jeune que moi ! Je m'appelle Isy et oui, je suis au courant, merci ! ajouta-t-elle sur un ton volontairement condescendant.

— Pardonnez ma réaction...excessive, mais par la force des choses nous sommes devenus un peu...méfiant.

— Parano, plutôt, maugréa Isy entre ses dents son regard toujours méfiant braqué sur Nel.

— Vous avez compris que ce n'était pas un piège ? lui demandai-je, d'une voix un peu agacé.

— Oui, heureuse de te revoir Hayden, s'éleva la voix de Remeï alors qu'elle se levait pour nous rejoindre.

— J'aurais dû me rendre compte tout de suite que vous étiez des nôtres, je suis désolé, s'excusa Nel en se tournant vers Connors.

— Je peux comprendre votre réaction, lui répondit-il sur un ton néanmoins un peu sec. Mais la prochaine fois, laissez les gens s'expliquer avant d'essayer de les cribler de fourchettes !

De petits rires discrets et nerveux, s'élevèrent des canapés, alors que l'atmosphère s'allégeait de manière significative.

— Il faut dire qu'un changeant parmi les gardes, c'est la première fois que l'on voit ça ! Normal que je me sois laissé surprendre !

L'incompréhension envahit les traits de Connors, qui à l'évidence, ne s'était rendu compte de rien !

— Il y a méprise, je suis entièrement de votre côté mais je n'ai aucun don particulier...

— Il n'est pas au courant ? me demanda Nel, en tournant son regard étrangement pénétrant vers moi.

— Au courant de quoi ? me demanda Connors en faisant volte-face tandis que je répondais à Nel d'un bref signe de tête.

— Tu n'as rien ressentis d'étrange ?

— Comment ça ? Quand ?

— Lorsque Nel a attaqué.

— Mis à part le fait que tu m'aies plaqué au sol avec la force d'un bulldozer, non ! me répliqua-t-il sur la défensive.

— J'ai fait ça, parce que tu t'étais figé et ...

— Vos yeux avaient changé de couleur, me coupa Nel. C'était la première fois ?

— Non, la seconde, répondis-je à la place de Connors, de plus en plus perplexe et agité. La première fois c'était quand Gab s'en est pris à toi tout à l'heure.

— Pourquoi tu ne m'a rien dit ? m'accusa-t-il.

— Je ne sais pas, lui répondis-je avec franchise, trop consciente que tout le monde nous écoutaient. Nous venions juste d'apprendre par Lovory que tu étais un changeant mais sans pouvoir déclaré...je crois que je voulais être absolument certaine avant de t'en parler.

— Quoi ? Mais...pourquoi ne m'en ont-il jamais rien dit ?

— Pour vous garder sous contrôle, lui répondit Nel. À moins que vous ne leur serviez de cobaye ?

— Bon, pour les théories du complot c'est tout sauf le bon moment ! intervint Isy. Je peux parfaitement comprendre votre méfiance et votre colère mais si vous pouviez la mettre de côté durant quelques minutes que l'on puisse discuter, ce serait bien.

Je vis Nel accuser le coup, tandis que Rem se mettait à sourire avant de lui asséner une claque amical sur l'épaule. Profitant de la diversion d'Isy, j'envoyai un bref regard à Connors, toujours perturbé par la nouvelle, pour lui faire comprendre que l'on en parlerait plus tard, avant de m'avancer vers les canapés d'un pas prudent mais décidé. Je me dirigeai vers l'une tables et me saisis d'un appétissant sandwich au jambon, avant de mordre dedans avec appétit.

— Il est délicieux, vous pouvez manger sans crainte ! leur dis-je dérangée par leurs joues creuses et leurs airs maladifs.

Il y eu un instant de flottement, les regards passants des victuailles à Nel en un ballet rapide et nerveux. Puis Rem vint me rejoindre et se servit à son tour, anéantissant les dernières réticences de ses compagnons.

— Ils ne vous donnaient rien à manger ? demanda finalement Connors d'une voix emplit de tristesse et de colère.

— Si nous mangions à peu près à notre faim, mais la nourriture était basique et surtout affreusement mauvaise, aucun risque de surpoids ! répondit un jeune homme avec humour, la bouche pleine de salade.

— Je ne savais pas que vous étiez détenus ici contre votre volonté, sinon j'aurais tenté quelque chose...

— Ce qui est fait, est fait, lui répondit Nel un peu brutalement. Si vous êtes là, c'est que le conseil a besoin de quelques choses, non ? Car vous pourrez me dire ce que vous voudrez, je ne pourrais jamais croire qu'ils nous ont relâché par bonté d'âme.

— En effet, ils m'ont envoyé pour que je sollicite votre aide, leur dis-je honnêtement en essayant de croiser tous les regards au moins une fois.

— Ils envois une des nôtres pour nous convaincre d'accepter ! Typique, répondit une jeune femme d'une voix méprisante.

— En théorie oui. Du moins c'est ce qu'ils croient, car à mon avis, vous devriez refuser. 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant