Chapitre 30-2

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Un poids envahit ma poitrine. Mélange de déception, de désespoir, de peur et surtout de tristesse. Une mélancolie dense et pesante semblait envelopper cet endroit comme une chape de plomb. Un signal d'alerte résonnait dans mon cerveau, me disant que nous devions fuir.

— On sait au moins, qu'eux ont réussi à désactiver leur bouclier, commenta Nel d'une voix basse et sourde qui trancha le silence épais comme un couperet.

— Volontairement, ou non ?

La question de Remeï resta sans réponse tandis que nous continuions à observer ce décor d'apocalypse de nos yeux anxieux et consternés.

— Hector, crois-tu qu'il y ait une chance que tu trouves les informations que nous cherchons ? lui demanda Lynch.

— Cet endroit est maudit, souffla-t-il pour toute réponse, ses yeux écarquillés fixant le vide.

— Hector !

— Nous devons partir d'ici, maintenant.

— Hector ! As-tu compris ma question ?

— Vous ne comprenez pas ? Tout est mort ! cria-t-il, faisant s'envoler deux oiseaux au loin, tandis qu'il tournait les talons, repartant vers la falaise dans une course maladroite.

— Hector calme-toi ! intervint Nel en l'attrapant par le bras. Je peux comprendre que tu sois effrayé, mais paniquer ne servira à rien.

— Je suis le seul à comprendre que nous ne devrions pas être ici ?

— Il a raison.

Mon intervention tomba comme un pavé dans une mare, faisant se retourner tous les visages vers moi.

— Moi aussi je le sens...là, leur expliquai-je en posant ma main sur ma poitrine.

— Nos dons ne fonctionnent pas ici, contra aussitôt Nel d'une voix teintée d'agressivité. Arrête de l'encourager, tu le perturbes.

— Je ne l'encourage pas, je lui dis juste qu'il n'est pas fou de ressentir ce qu'il ressent. Maintenant, Nel a aussi raison en disant que paniquer ne sert à rien, repris-je en m'approchant d'Hector qui semblait reprendre peu à peu ses esprits.

— Tu le sens vraiment aussi ? Il s'est passé quelque chose ici...quelque chose d'horrible...

— On le sens tous Hector, essaya de temporiser Lynch d'une voix apaisante. Mais c'est du passé. Penses-tu pouvoir trouver des infos sur le bouclier.

— Nous ne devons pas aller là-bas...

— Ce sera forcément en périphérie, raisonna Nel à haute voix. Tu n'auras pas besoin de t'enfoncer beaucoup à l'intérieur de la cité.

— Nous serons avec toi, ajouta Rem. Je n'ai pas plus envie que toi d'aller là-bas, mais si nous trouvons ce que nous sommes venu chercher, ça vaut le coup non ?

Il ne répondit pas tout de suite, sa respiration saccadée et ses pupilles dilatées trahissant à quel point il avait peur. Une peur viscérale et incompréhensible que je ressentais aussi, au plus profond de moi. Pourtant Rem avait raison, avertissement subliminaux ou non, peurs ou non, nous devions tenter. Sinon nous n'aurions bientôt plus nulle-part où nous réfugier.

— Respire lentement, lui dis-je en lui posant doucement une main sur le bras. On cherche quoi exactement ? Quelle sorte de bâtiment ?

Ma question terre-à-terre sembla apaiser son trouble. Son regard se focalisa enfin sur moi et sa voix était plus ferme et moins tremblante lorsqu'il me répondit.

— Il ne semble pas y avoir d'enceinte ou de mur autour de la ville. Mais si c'est comme chez nous, le local du générateur doit-être sous terre.

— Comment sais-tu qu'il est sous terre ? Personne ne sait où il se trouve.

— Si, Blake le sait et il me l'a dit avant que nous ne nous séparions. Mais c'est logique, le générateur devait être protégé. Quoi de mieux que de l'enterrer ?

Vu comme cela, c'était en effet une évidence. Maintenant qu'il parlait technologie, Hector semblait avoir retrouvé tout son pragmatisme et sa logique analytique.

— Comment le trouver alors ? lui demanda Lynch, en commençant à se diriger à pas lents vers la ville assoupie.

— Théoriquement, il y en a cinq, nous expliqua-t-il en nous suivant d'un pas incertain. Quatre répartis sur la périphérie de la ville et un en son centre.

— Lequel as-tu besoin de trouver ? lui demanda Nel, manquant tomber lorsque des pierres sèches roulèrent brusquement sous ses pieds.

— Je ne sais pas exactement. Dans un premier temps, n'importe lequel fera l'affaire.

— Très bien, alors restons à la périphérie pour le moment, résuma Lynch. Je n'ai peut-être pas ressenti la même chose que vous deux, mais...quelque chose ne vas vraiment pas ici...soyez sur vos gardes. Et maintenant, silence ! ajouta-t-il dans un chuchotement rauque tandis que nous doublions les premiers bâtiments décrépits.

Nous étions en milieu d'après-midi et le soleil projetait les ombres des murs cassés et éventrés, comme autant de fantômes ternes et effrayants. Partout où se portaient notre regard, ce n'était que bâtiments défoncés, vitres fracassées et mobiliers pourrissants, encombrants ce qui jadis, avait été des rues. La nature avait repris ses droits depuis longtemps, recouvrant tout d'une végétation rampante et luxuriante. Par endroit, un arbre sortait d'une porte ou d'une fenêtre, des fleurs blanches recouvraient le squelette tordu d'un véhicule. Si l'atmosphère n'avait pas été si silencieuse et pesante, cela aurait-été presque beau.

— Mon dieu, mais que s'est-il passé ici ? murmura Nel. On dirait que tout le monde à fuit.

Il n'avait pas plutôt terminé sa phrase qu'une ombre traversa ma vision périphérique, emballant mon cœur. Je me tournai aussitôt pour tenter de comprendre ce que je venais de voir...mais rien.

— Hayden, tu as vu quelque chose ? me demanda Lynch en s'approchant de moi pour ne pas être obligé de parler trop fort.

— Non j'ai...j'ai dû rêver, lui répondis-je d'une voix absente. Je...là ! m'écriai-je en tendant le doigts dans la direction de l'ombre qui venait d'apparaitre de nouveau sur ma droite, durant une fraction de seconde.

Un petit bruit d'éboulis confirma mes dires, tandis que nous nos regards effrayés balayaient tous les bâtiments alentours.

— Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que t'as vu ?

— Je ne sais pas...une sorte d'ombre qui courrait.

— Un animal peut-être ?

Un nouveau bruit de course se fit entendre sur notre gauche, tandis qu'une nouvelle silhouette se découpait dans l'ombre d'un mur. Une silhouette étrange, presque difforme, qui ouvrit la bouche et émit une sorte de cri guttural et effrayant avant de disparaître de nouveau.

— Putain, qu'est-ce que c'est que ça ? commença à paniquer Rem, tandis que de nouveaux bruits de pas, de plus en plus nombreux, se mettaient à résonner autour de nous, bientôt suivit de cris inhumains qui paraissaient se répondre en un écho sinistre.

Nous étions figés, nos cœurs battants à tout rompre dans nos poitrines étrécies par la terreur.

— Courrez ! hurlai-je lorsque la première ombre s'élança vers nous à une allure inhumaine, dans un cri terrifiant. 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant