Chapitre 38-2

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Une fois la surprise passée, les questions fusèrent de tous côtés. Gabe et moi, plus abasourdis que les autres par cette révélation inattendue, mîmes quelques secondes à encaisser l'info, nos regards braqués sur Connors qui nous fixait d'un air légèrement contrit.

— Vous d'abord, les interrompit Lynch pour couper court à toutes leurs interrogations, légitimes certes, mais nous aussi nous avions les nôtres.

— De notre côté, il n'y a pas grand-chose à raconter ! commença Nel. Lorsque nous avons été séparés, étrangement, les monstres se sont presque aussitôt désintéressés de nous. Nous vous avons cherchés, sans succès. C'est en essayant de sortir de la cité que nous sommes tombés sur Sean et ses hommes. Ils nous ont amené ici et depuis... nous n'en savons guère plus.

— Vous êtes venus de votre plein gré ? ­­­­­­­demanda Lynch la mine sombre.

— Plus ou moins. Disons que je m'interroge encore sur leurs réactions si nous avions refuser de les suivre, lui répondit Nel sur le même ton.

— Ce Sean n'est pas digne de confiance selon toi ?

— Je ne dirais pas ça... tant que nous irons dans son sens, je pense qu'il n'y aura aucun problème. Dans le cas contraire...

— Que vous a-t-il dit ?

— Quasiment rien ! A la seconde où il a appris que vous étiez vivant et en route pour nous rejoindre, il s'est fermé comme une huître.

— Peut-être qu'il n'avait tout simplement pas envie de se répéter ? tempéra Rem de sa voix douce et tranquille qui éclaircie momentanément l'aura de suspicion grandissante de la pièce.

— Peut-être, appuyai-je à mon tour voyant que Nel s'apprêtait à argumenter de nouveau. Tu dis qu'il a changé de comportement quand il a appris que nous étions vivants ? Il a eu l'info quand exactement ? demandai-je subitement à Nel alors qu'un frisson désagréable me traversait.

— A peine quelques heures après notre arrivée ici...

— Oui, mais son comportement a véritablement changé qu'il n'y a une poignée d'heures, la coupa Nel.

La vague appréhension se transforma en certitude à l'entente de leurs réponses, ce ne pouvait pas être une coïncidence.

— C'est toi qu'ils veulent, marmonna Lynch du fond de son pouf, le teint blanc et le souffle court.

— Comment ça ? interrogea Hector.

— Ils veulent l'antidote à cette saloperie, lui répondit lynch qui aura mieux fait de se taire et de garder ses forces.

— Sauf qu'Hayden ne l'a pas, j'ai juste emprunté son pouvoir de guérison et quand ils apprendront...

— Ils n'ont pas besoin de le savoir, rétorquai-je d'une voix résolue. Attendons de voir sa réaction et servons-nous de ça comme monnaie d'échange.

— Monnaie d'échange contre quoi ? Ils sont autant en perdition que nous ! s'esclaffa Hector d'un ton morose et légèrement désespéré.

— Ce n'est pas une raison pour abandonner. On n'a pas traversé tout ça pour laisser tomber sans rien tenter ! m'emportai-je.

— On va rencontrer ce fameux Sean, quand, au juste ?

— Maintenant ! répondit une voix inconnue, alors qu'un homme charismatique pénétrait dans la pièce.

Il n'était pas très grand et âgé tout au plus d'une petite trentaine d'années. Était-ce la détermination lasse lovée au centre de ses yeux couleurs noisette ou ses cheveux châtain coupés très court durcissant les traits de son visage naturellement neutre au demeurant, mais il se dégageait de cette homme une aura de force et d'autorité que l'on n'avait pas envie de contredire. L'idée qu'il possède, comme nous, une aptitude particulière, m'effleura l'esprit alors qu'il s'avançait vers nous, la lumière dévoilant au fur et à mesure les cicatrices nombreuses et variées qui déparaient ses mains et ses avants bras dévoilés par ses manches retroussées. Ce Sean savait soigner ses entrés, commentai-je pour moi-même alors qu'il s'arrêtait à quelques pas de moi.

— Désolé pour ce contre-temps mais j'avais une urgence à régler.

— De quel type ? lui demandai-je du tac au tac et sans me démonter, juste pour voir sa réaction et jauger un peu le personnage.

Un éclair de surprise et d'amusement traversa son regard alors qu'il tournait la tête dans ma direction.

— De type grognant, baveux et pas sympa ! me répondit-il avec humour avant que son sourire ne se dissipe aussi vite qu'il était apparu. Cet endroit est compromis, les infectés s'infiltrent de plus en plus fréquemment et s'aventurent de plus en plus près de nos points d'accès sécurisés.

Sa franchise me surpris et me le rendis tout de suite sympathique, ce qui était certainement le but recherché.

— Vous les avez repoussés ? demanda Nel, toujours pragmatique à l'extrême.

— Oui, mais le problème n'est pas là. Une fois qu'ils savent où nous sommes ils trouvent toujours un moyen de nous atteindre.

— Si vous tuez les éclaireurs à chaque fois, comment cela est-il possible ?

La question de Nel resta sans réponse, tandis qu'une tension sourde envahissait la pièce.

— Vous voulez dire que vous ne les tuez pas ? s'exclama Gabe en tentant de se redresser légèrement.

— Vous pourriez tuer de sang froid un frère, une sœur, voir votre mère ?

— Pour abréger leurs souffrances et protéger les gens sous ma responsabilité, oui et sans aucune hésitation.

— Cela signifie que vous êtes plus fort que moi... ou plus inhumain.

— Ce qui est inhumain, de mon point de vue, c'est de les laisser en vie. Vous attendez quoi au juste ? De tous rejoindre leurs rangs ?!

La colère déforma les traits de Sean le temps éphémère d'un battement de cœur tandis qu'il fixait d'un regard insondable Lynch, en train de péniblement se remettre debout avec l'aide de Rem. Puis sans un mot supplémentaire, il se détourna et en deux grandes enjambées nerveuses rejoignit Connors qu'il attrapa sans ménagement par le bras. Ce dernier ne réagit pas tandis que d'une torsion puissante il l'obligeait à se tourner dos à lui. J'étais sur le point d'intervenir, lorsqu'à la surprise générale, il sortit une petite clé d'une des poches de sa veste et ouvrit les menottes.

— Ce que j'attends, c'est de savoir comment cet homme a pu guérir de cette maladie que nous n'avons toujours pas identifiée. Je veux savoir comment et surtout, je veux un moyen de reproduire ce miracle.

— Et si je vous dis que c'est impossible ? lui répondis-je d'une voix prudente, ne voulant pas l'énerver plus qu'il ne l'était déjà.

— Je vous répondrais qu'il vaudrait mieux pour nous tous que ce ne soit pas le cas. 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant