Chapitre 33-2

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De là où nous nous trouvions et même si nous étions relativement éloignés, difficile de se tromper. Les cheveux bruns légèrement ondulés et la veste militaire ne pouvait appartenir qu'à une seule personne...Connors. Il était terriblement immobile, le visage tourné vers le mur, mais je savais que c'était lui. Par reflexe et pour en être parfaitement certaine, je m'avançai la peur au ventre, avant d'être tout de suite interceptée par Josef qui me retint par le bras.

— Non, n'avancez pas plus près.

— Connors ! criai-je d'une voix inquiète à la limite du désespoir, espérant le voir se retourner vers moi.

— Il ne vous répondra pas, il est tombé dans une sorte de coma.

— Comment est-il arrivé ici et pourquoi, l'avez-vous enfermé dans cette...cage ? demanda Lynch d'un ton suspicieux et agressif.

— Il a été contaminé...je suis vraiment désolé, lui répondit Josef d'une voix sincèrement triste.

— Contaminé...vous voulez dire comme ces...choses dehors ?

Pour toute réponse Josef se contenta d'un bref hochement de tête, sa main enserrant toujours fermement mon bras.

— Je veux le voir, ordonnai-je d'une voix que je reconnu à peine.

— C'est ne pas possible, les risques de contamination sont trop grands.

— Vous plaisantez ? Il se trouve de l'autre côté d'un grillage, lui-même séparé de nous par de l'eau ! Vous savez ce que nous venons de traverser, non ? Je crois que si nous avions dû être contaminé, ce serait déjà fait ! réagit Lynch avant moi, traduisant exactement le fond de ma pensée.

— Il y a des phases plus contaminantes que d'autre. Faites-moi confiance, je sais de quoi je parle.

— Qu'est-ce qui nous prouve que vous dites vrai ?

— Croyez-moi, je suis vraiment désolé pour votre ami et franchement, quelle raison aurais-je de vous mentir ? ajouta-t-il dans un soupir las en désignant ce qui nous entourait d'un geste circulaire du bras.

La détresse et le découragement s'emparèrent de moi et sentant ma résignation dans l'amollissement de mon corps, Josef me lâcha.

— Même si c'est dur, vous ne pouvez rien pour lui dans l'immédiat. En revanche, nous avons beaucoup de choses à nous dire, les uns comme les autres. peut-être même en ressortira-t-il quelque chose de bénéfique pour votre ami et tous ceux subissant la même épreuve que lui ? Qu'en pensez-vous ? ajouta-t-il d'une voix plus douce et persuasive, s'adressant prioritairement à moi.

Je lançai un regard perdu à Lynch, dans le regard duquel je lus peine, peur, détresse, mais surtout de la méfiance. Mes yeux se fixèrent de nouveau presque malgré moi sur Connors, toujours immobile et je compris que discuter avec Josef et les siens était ce que nous avions de mieux à faire dans l'immédiat. Ils étaient terrifiés par cette maladie, ou ce virus qui contaminait les leurs et ne me laisserait pas approcher de Connors. Le mieux était d'en apprendre le plus possible pour pouvoir les convaincre de ma laisser le voir et l'examiner. Peut-être qu'ils s'étaient trompés ? J'acquiesçai à mon tour d'un signe de tête, enjoignant à Gabe d'en faire autant d'un coup d'œil appuyé et nous suivîmes Josef, rebroussant chemin vers le cœur du campement. Il nous conduisit vers une tente faite de draps et de couvertures multicolores superposés, dans laquelle nous pénétrâmes.

A l'intérieur, des tapis et des morceaux de moquettes disparates recouvraient le sol de béton, donnant un aspect étrangement chaleureux. La petite habitation était ouverte sur deux côtés, permettant à la faible lumière de pénétrer à l'intérieur. Un feu d'appoint allumé dans un vieux bidon en métal, brulait doucement non loin de la seconde ouverture.

— Un peu d'infusion ? nous demanda Josef en se dirigeant vers le récipient ressemblant vaguement à une théière, posé sur les braises.

— Oui, merci, lui répondis-je après une seconde d'hésitation.

Sans attendre la réponse de Lynch, il versa la boisson dans trois verres avant de nous les distribuer et de nous inviter à nous assoir.

— Vous savez recevoir, ironisa Gabe de manière toute sauf subtile en se saisissant de son verre du bout des doigts.

— Si vous préférez retourner dans le tunnel, ça peut encore s'arranger ! lui rétorqua Jodef, visiblement à bout de patience.

— Expliquez-nous ? Que s'est-il passé ici ? lui demandai-je en prenant une gorgée du liquide odorant pour lui prouver ma bonne volonté.

— L'horreur, me répondit-il d'un regard hanté.

— C'est arrivé quand ?

— Il y a une vingtaine d'années environ. J'avais 15 ans à l'époque. La vie n'était pas tous les jours facile pour ma famille et moi qui cultivions la terre et je ne rêvais que d'une chose...pouvoir sortir de la zone protégée...qu'est-ce que l'on peut être bête lorsque l'on est jeune...

— Tu n'étais pas bête, tu ne pouvais pas savoir...personne ne pouvait savoir, intervint une femme blonde, sensiblement du même âge que Josef et visiblement enceinte de plusieurs mois.

Même si j'avais étudié la reproduction, la grossesse et la naissance dans le cadre de mes études médicales, c'était la première fois que je voyais une femme enceinte. Mes yeux fixaient avec insistance le renflement rebondis sous le tissus lâche de la robe à fleur de la jeune femme et je sentis une étrange émotion m'envahir.

— Je vous présente Myna, ma sœur.

— Quelque chose vous dérange ? me demanda-t-elle d'un ton incisif malgré son sourire.

— Non, pas du tout, c'est juste que...je ne m'attendais pas à...

— Trouver une femme enceinte dans cet...endroit ? C'est certain qu'il y a mieux comme avenir mais...la nature ne nous demande pas toujours notre avis ! Il y a sept mois, il faut croire qu'elle était d'humeur farceuse ! ajouta-t-elle avec un petit rire cynique avant de ressortir de la tente.

— Excusez-moi, je ne voulais pas être inconvenante, c'est juste que...

— Alors, que s'est-il passé il y a vingt ans ? me coupa Gabe avec un regard d'avertissement, ne voulant apparemment pas que je m'explique sur mon comportement étrange.

— On ne le sait toujours pas, reprit Josef comme si l'intermède n'avait jamais eu lieu. Du jour au lendemain l'un des générateurs du système de confinement à cesser de fonctionner, comme ça, sans raison. Nous avons essayé de le réparer mais même si nous avions réussis, cela n'aurait servit à rien. Au contraire, cela n'aurait qu'empirer les choses pour nous, mais ça, nous ne le savions pas encore.

Il fit une pause, prenant plusieurs gorgées de sa boisson, avant de poser le verre sur le sol.

— Les premiers cas n'ont mis que quelques jours à apparaitre. Des rougeurs, des boutons et une étrange apathie s'emparaient des malades. Nos médecins ont d'abord cru à une réaction allergique dû à la composition de l'air, qui devait être sensiblement différente maintenant qu'il n'était plus filtré par le dôme mais la fièvre est apparu, puis le coma et lorsqu'ils se réveillaient...

— Mais qu'est-ce que s'est ? Un virus, une bactérie ?

— Probablement un virus, mais nous n'en sommes pas certains. L'épidémie s'est répandue trop vite pour que nos médecins aient le temps d'approfondir leurs recherches et depuis, nous ne faisons que survivre, essayant tant bien que mal de comprendre et de trouver une solution. Nous espérons toujours que vous puissiez être cette solution. 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant