Chapitre 37-2

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Je l'embrassai, faisant abstraction de tous ce qui nous entourait. Ma langue franchit doucement la barrière de ses lèvres, partant à la rencontre de la sienne dans un ballet doux, rapide et sensuel. Il répondit à mon baiser en respectant le rythme et la retenue naturelle que je lui imposais. Les secondes se transformèrent en minute et je perdis la notion du temps, me laissant véritablement aller pour la première fois. Nous étions en relative sécurité, j'avais le contrôle de la situation et... cela changeait tout. Avec Connors, les rares baisers que nous avions échangés ressemblaient plus à un besoin urgent et réciproque de réconfort. Alors qu'avec Lynch c'était plus passionnel, réalisai-je alors que mes mains s'aventuraient de leur propre initiative dans ses cheveux et sur ses bras. Il s'enhardit également de son côté, me serrant plus fort contre lui, tandis qu'il approfondissait encore notre baiser. Lorsque ses mains commencèrent à descendre le long de mon dos, envoyant une myriade de délicieux frissons parcourir mes nerfs, je poussais un soupir de contentement, avant de me dégager à doucement et à contrecœur. Lynch était blessé et je n'étais pas prête à aller plus loin, même si j'avais profité autant que faire ce pouvait de cet instant.

— Qu'est-ce qui te dérange ? C'est encore cette stupide différence d'âge ? Cinq ans, ce n'est rien pourtant.

— Il n'y a rien qui me dérange. Mais tu es blessé, tu as besoin de repos et moi d'arrêter maintenant si je veux garder les idées claires, lui répondis-je en me levant doucement.

Mes articulations protestèrent lorsque je me mis debout, sous le regard circonspect de Lynch qui ne savait apparemment pas quoi penser de ma dérobade, qui n'en était pas vraiment une. Même si je n'étais pas prête à m'engager dans une relation sérieuse, j'allais devoir prendre une décision. Je ne pouvais jouer les girouettes indéfiniment. Maintenant qu'ils étaient tous les deux hors de danger immédiat, nous devions retrouver les autres et essayer de planifier la suite des événements.

— Repose-toi, tu en as besoin. Je vais me renseigner sur ce qu'ils comptent faire de nous et tenter de les convaincre de nous aider.

— Nous aider à quoi faire ? me demanda-t-il d'une voix déjà légèrement somnolente. Je crois malheureusement que nous ne trouverons pas ce que nous étions venu chercher.

— On ne sait pas. Repose-toi, c'est un ordre ! Tu seras défaitiste après, lui ordonnai-je gentiment en soulevant le rabat de toile et en me glissant dehors.

Je regardai autour de moi et ne voyant aucun visage connu fis quelques pas, avant d'être soudain prise de vertiges. Je cherchai instinctivement quelque chose à quoi me raccrocher alors que tout se mettait à tourner autour de moi rendant ma tête légère et me donnant la nausée. Je sentis confusément quelqu'un m'attraper par le bras et me soutenir avant de me guider jusqu'au sol où il me fit asseoir.

— Mettez votre tête entre vos genoux et respirez à fond, ça va passer, me dit une voix de femme qu'il me sembla reconnaître comme étant celle de Myna. Tina ! Apporte-nous quelque chose à manger s'il te plait.

J'aurais voulu lui répondre que c'était inutile, mais j'avais tellement mal au cœur, qu'ouvrir la bouche aurait été une erreur. J'avais fermé les yeux par reflexe, mais cela n'avait fait qu'empirer les choses. J'avais toujours la sensation que tout tournoyait autour de moi accentuant ma nausée. Alors que Myna me lâchait, je fus prise d'un terrible haut le cœur, qui me laissa tremblante et épuisée.

— Tenez, avalez-ça, ça va vous faire du bien, me dit-elle en approchant un bol de soupe fumant.

L'odeur, bien qu'appétissante, me retourna l'estomac et un nouveau spasme me tordit le ventre tandis que je me détournai de la nourriture.

— Vous devez manger, insista-t-elle. Vous vous sentirez mieux après, faites-moi confiance.

Elle approcha une cuillère remplie de liquide fumant près de ma bouche et, pour ne pas la décevoir, je me forçai à l'avaler. Curieusement, à peine le bouillon eut-il toucher ma langue, que j'en voulu davantage. A partir de la quatrième cuillère, Myna me tendit le bol, et s'assis lourdement à mes côtés, un petit sourire sur les lèvres.

— Un peu de pain, peut-être ?

Je m'en saisis aussitôt, en la remerciant d'un sourire. Bien consciente à présent que la jeune femme avait vu juste et que mon léger malaise résultait de mon estomac vide.

— Vraiment désolée pour tout ça, lui dis-je une fois que j'eus terminé.

— Pas de quoi. C'est en partie de notre faute, du moins de celle de Josef ! railla-t-elle ce dernier avec un coup d'œil assorti, alors qu'il nous rejoignait.

— De quoi tu parles, encore ?

— La pauvre vient de faire un malaise, tout ça parce que tu n'as même pas pensé à leur donner à manger !

Un éclair de honte traversa fugacement le regard de Joseph avant de reprendre son détachement inquiet habituel.

— Vraiment désolé, mais avec tous ce qu'il s'est passé...

— Ce n'est pas votre faute, le rassurai-je aussitôt en commençant à me relever.

— Comment va votre ami, ça a fonctionné ?

— Oui, il est tiré d'affaire et... Connors ? demandai-je d'une voix hésitante.

— Toujours un peu perdu, il faut lui laisser du temps.

— Vous comptez le laisser dans cette cage ?

— Tant que l'on ne sera pas certain que son état est définitif, oui, me répondit-il d'un ton sans appel.

— Vous pensez vraiment qu'il peut rechuter ?

— Il y a de cela à peine vingt-quatre heures, je n'aurais jamais cru possible ce que vous venez d'accomplir, alors...

Je ne sus quoi répondre, gênée par son regard tout à la fois surpris, inquiet et rempli d'espoir. Ce dernier sentiment était dangereux, car le pouvoir de Connors était unique, lui seul pouvait se servir de ma capacité de guérison pour inverser le processus et je ne pourrais malheureusement rien faire pour tous les autres contaminés. Mais je pense qu'une part de lui le savais.

— Quand pensez-vous que votre ami sera en mesure de se déplacer ? rompit-il enfin le silence d'une voix bourrue.

— ça dépend sur quelle distance ?

— Environ deux heures de marche.

— Pas avant deux jours minimums. Il a besoin de reprendre des forces.   

A l'instant où je prononçai ses paroles je pris conscience que nous n'avions pas deux jours à perdre. Même si nos chances de reussite étaient quasi nulle, je ne pouvais pas me résoudre à abandonner.

— Avec de l'aide et des pauses, ça devrait aller, repris-je dans un soupir. Vous devez bouger c'est ça ?

— Nous ne restons jamais plus d'une dizaine de jours sur le même site, sinon, ils finissent par nous repérer et assiéger l'endroit. Changer régulièrement les perturbe. De plus, vos amis vous attendent au campement principal. Tous le monde doit s'inquiéter.

— Vous prévoyiez de partir quand ?

— D'ici deux heures.

Je me contentai d'acquiescer en silence, avant de retourner vers la tente médicale d'une démarche lente. Restait à savoir si je n'avais pas été trop optimiste sur les forces et l'endurance de Lynch.

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant