Chapitre 34-2

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Il me lança un regard furibond avant de s'éloigner rapidement, me laissant seul avec Josef dont l'expression oscillait entre l'espoir, le questionnement et l'exaspération.

— C'est quoi son problème à votre ami ?

— Il s'inquiète pour moi, c'est tout, lui répondis-je en buvant une nouvelle gorgée de thé.

— Si vous le dites. Sincèrement son caractère soupe-au-lait me tape sur les nerfs mais, il n'a pas tout à fait tort ! Vous êtes certaine de vouloir entrer dans une cage avec...l'un d'entre eux ?

— Oui, lui répondis-je sans la moindre hésitation. C'est toujours Connors et s'il y a une chance, je dois la tenter.

Je le fixai intensément, avant de poser mon verre sur le sol. Attendre plus longtemps ne servait à rien. Si je devais agir, c'était maintenant. Dire que je ne ressentais aucune peur aurait été un mensonge, mais je devais le faire.

— Vous avez la clef ?

— Je vous accompagne, les autres ne vous laisseront pas approcher sinon, me répondis Josef dans un soupir résigné. Si vous êtes sûre de vous...

Puis, sur ces paroles encourageantes, il partit en direction de la cage de quarantaine. Tandis que je le suivais, je cherchais Gabe au milieu des tentes, mais ne croisais que des regards inconnus, angoissés et vaguement curieux. Je savais qu'il avait peur pour moi, mais je pensais aussi qu'il avait appris à avoir confiance en mon instinct et je devais bien l'avouer, ne plus l'avoir à mes côtés me manquait. Perdue dans mes pensées, je faillis percuter Josef qui venait de s'arrêter devant le canal de béton. Il se pencha et commença à tirer sur une corde que je n'avais pas vue. Une petite barque apparue du coin gauche, arrivant vers nous en clapotant doucement sur l'eau claire.

— C'est le seul moyen de traverser, m'expliqua-t-il, en sautant souplement à bord de l'embarcation qui tangua à peine sous son poids.

A l'invitation de sa main tendue, je le rejoignis à mon tour, manquant tomber lorsque la coque roula sous mes pieds.

— Première fois sur un bateau ?

— Oui, ça se voit tant que ça ? lui répondis-je avec un petit sourire, profitant de ce bavardage pour faire baisser un peu mon stress.

Alors que Josef s'emparait d'une longue perche de bois, posée dans le fond de l'embarcation, et s'apprêtait à s'en servir pour nous pousser de l'autre côté, Lynch apparut. Légèrement essoufflé, il ne s'embarrassa pas d'explications ou de paroles inutiles et se contenta de nous rejoindre à bord, sans même attendre ou demander d'invitation.

— Où étais-tu ?

— Parti palier ta précipitation, me répondit-il d'une voix réfrigérante.

— Que veux-tu dire par là ?

— Que tu agis toujours par instinct, sans réfléchir et surtout sans aucune préparation ! Ton idée n'est pas bête et ton entreprise louable, mais si ça ne marche pas, tu feras quoi ?

Josef qui s'apprêtait à intervenir lors de la première réponse de Lynch, eut soudain l'air très intéressé par la tournure que prenait les évènements.

— Je le sentirai tout de suite de toute façon et...s'il est déjà trop tard et bien...je sortirai.

— S'il vous laisse faire ! intervint Josef qui reposait la gaffe et s'emparait d'une nouvelle corde pour arrimer la barque, la traversée n'avait prit qu'une minute. Votre ami a raison. Vous êtes bien consciente que si ça se passe mal, personne ne viendra vous aider ?

— Si, il y aura quelqu'un ! Je l'accompagne, dit Gabe d'un ton rageur en sortant une dague rouillée de derrière son dos.

— Qu'est-ce que tu veux faire avec ça ?

— Ce qu'il y aura à faire si tu échoues...

— Tu veux dire que...tu comptes tuer Connors ?!

— Si ta tentative n'aboutit pas et s'il te menace, sans la moindre hésitation, me répondit-il d'une voix désagréable et agressive.

— On n'en arrivera pas là...

— Je l'espère de tout cœur, mais...on se doit d'avoir un plan B.

— C'est vrai tu as raison, répondis-je à contre-cœur, du bout des dents. Donne-moi la dague, je saurais me défendre si besoin.

Il me fixa de son regard sombre pendant une demi-seconde, avant d'éclater d'un bref rire cynique.

— Non, tu n'y arriveras pas. Pas face à Connors ! Raison pour laquelle, j'ai dû me résoudre à l'horrible idée de devoir exécuter froidement mon ami si tu échoues...chose à laquelle tu n'avais même pas réfléchi !

Je crois que ce qui m'interpela le plus dans sa tirade fut le mot « ami », tellement incongru dans sa bouche surtout pour désigner Connors, encore plus que la douleur réelle qui émanait de son ton et de sa posture. L'envie de répliquer sur le champ était forte, mais je me retins essayant d'analyser la situation. Avait-il raison ? Serais-je incapable de tuer Connors s'il se transformait sous mes yeux en un monstre inhumain ? Je ne le pensais pas, mais n'en étais pas certaine non plus. De toutes les manières, il était trop tard pour reculer.

— On va vite le savoir, répondis-je dans un murmure à peine audible en laissant Josef m'aider à sortir de l'embarcation mouvante.

Nous avions accosté à plusieurs mètres de la cellule de confinement et je compris à sa posture que Josef n'irait pas plus loin.

— Voici la clef. Surtout, quoiqu'il se passe, en bien ou en mal, ne le laisser pas sortir de la cellule. Tant que nous ne serons pas cent pour cent certains qu'il ne présente plus de danger...nous tirerons à vue, nous avertit-il en nous désignant les tireurs postés à des points stratégiques.

Traversée d'un glacial et funeste frisson d'appréhension, j'acquiesçai en silence et pris la grosse clef en fer des mains de Josef. Les quelques mètres qui nous séparaient de la porte me parurent interminable. La peur semblait s'installer et se renforcer à chaque pas supplémentaire que nous faisions. L'odeur rance et typique de la maladie nous parvint avant même que nous ne puissions distinguer Connors. Lorsque nous l'aperçûmes enfin, la peur et le découragement me saisirent. Il était méconnaissable. Il dormait, inconscient de ce qui l'entourait, mais sa respiration heurtée émettait un sifflement sinistre à chacune de ses inspirations.

— Tu es certaine ? me demanda une nouvelle fois Lynch, une main agrippée aux barreaux.

— Je dois essayer, on lui doit bien ça.

Le bref signe de tête qu'il me fit valant tous les discours, je pris une grande inspiration et introduisis la lourde clef dans la serrure. Nous entrâmes, refermant aussitôt la porte derrière nous dans un claquement sec. Nerveux, nous nous tournâmes instantanément vers Connors, qui était toujours immobile. Gabe s'éloigna de quelques pas et sortit son arme, près à agir en cas de besoin. N'ayant pas le temps, ni le luxe d'hésiter, je fis les deux pas qui me séparait du lit de Connors et sans réfléchir pour ne pas renoncer à la dernière seconde, attrapai ses mains déformées dans les miennes. 

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Voilà c'est la rentrée :-) Donc reprise d'un rythme de publication régulier complètement impossible pendant les fêtes ;-) 

J'en profite pour vous souhaiter une très belle et heureuse année 2019 !!*o*!! Qu'elle vous apporte, santé, joie et bonheur ^.^ 

Gros bisous, bisous <3 <3 <3 

Virgin Territory-Isolated System Tome 2 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant