Virgin Territory-Isolated System Tome 2

Chapitre 22-1

Je compris que le cri que je venais d'entendre était féminin à l'instant où nous franchîmes la porte. Connors, les traits du visage contractés par la colère, tenait Lévantis en respect, ses genoux clouant les bras de la jeune femme sur le sol dur, tandis qu'il maintenait sa tête en arrière dans une position douloureuse en tirant sur sa queue de cheval.

— Dis-moi à quoi rime tout ce cirque ? lui ordonna-t-il, d'une voix dure assortie d'une nouvelle secousse.

— Au sec...

— A ta place, je n'essaierai même pas ! la menaça-t-il en l'empoignant durement par le cou.

Ses doigts, resserrés autour de la peau pâle et fragile, comprimaient juste ce qu'il fallait pour l'empêcher de crier sans l'étouffer, ni la blesser, même si à l'évidence elle arborerait de beaux hématomes durant quelques jours.

— Tu nous dis exactement ce que tu as derrière la tête, ou je te promets que je te tues.

— Toi ? Le brave et gentil Connors ! ça m'étonnerait ! ricana-t-elle d'une voix étranglée. Surtout que tes braves petits soldats changeants sont aux mains de mes hommes, qui eux, n'hésiteront pas à tirer, contrairement à toi.

— Lui il hésitera peut-être, mais moi non ! annonçai-je froidement en plaquant le canon de l'arme que je venais de ramasser, sur sa tête.

Mon regard, aussi froid que ma voix, se planta dans ses yeux d'où toute moquerie disparue en un éclair. Je bluffais, bien évidemment, mais heureusement assez bien pour donner le change apparemment. Je ne me pensais pas assez abîmée par ce que j'avais vécu ces derniers temps pour être capable de tuer quelqu'un de sang-froid, même une personne telle que Lévantis. Du moins je l'espérais, bien que la rage froide qui tournoyait au centre de mon être me murmure des choses plus sombres.

— Quel était ton plan exactement et pourquoi ? lui demandai-je en enlevant ostensiblement le cran de sureté.

Je vis la peur, brute et primale, traverser son regard toujours fixé sur moi. Même Connors et Rem, me contemplaient comme s'ils ne m'avaient jamais vu.

— Répond à Hayden, Lévantis ! Je te promets qu'elle ne plaisante pas, m'appuya Connors.

— Lovory est une faible ! cracha-t-elle. Elle vous ménage et vous dorlote pendant que la situation devient incontrôlable à l'intérieure de la ville. Les gens se doutent de quelques choses et commencent à paniquer. Encore quelques jours et les émeutes auront raison de ce conseil de pacotille. Monroe n'aurait pas eu les mêmes scrupules, ils vous auraient renvoyé aussitôt de l'autre côté en gardant vos proches en otage pour vous motiver !

— C'est ça ton plan ? Nous forcer à franchir la barrière de nuit, sans aucune arme, matériel, ni provision ? Tu as bien conscience que si nous partons maintenant, nous serons probablement tous mort au lever du soleil ?! Et après il vous restera quoi comme solution, à part crever comme des idiots derrière votre bulle ?

— Hayden à raison, tu as complètement perdu la tête ! souffla Connors un air incrédule et dégouté sur son visage fatigué.

— Arrêtez de dramatiser. Vous y êtes déjà aller une fois et en êtes tous revenu indemne. Ce ne doit pas être si terrible que ce que vous nous avez raconté.

— Elle ment, affirma soudain Rem d'une voix sombre en s'approchant lentement. Elle pense que tout est perdu. Tout ce qu'elle voulait c'était sauver sa peau. Elle voulait vous forcer à l'emmener avec nous de l'autre côté, où elle nous aurait abandonné lâchement sans aucun moyen de nous défendre. Lovory a commencé à avoir des doutes sur sa loyauté, c'est pour cela qu'elle a dû agir sur un coup de tête.

— Ferme-là espèce de monstre de foire ! Tu racontes n'importe quoi, s'écria Lévantis aussitôt rappelée à l'ordre par une claque bien senti de Connors qui n'avait pas hésité une seconde.

— Comment sais-tu tout ça ? demandai-je à Remeï, même si au fond de moi, je sentais qu'elle avait raison. Le visage haineux de Lévantis ne trompait pas.

— C'est un...petit à côté de mon pouvoir, m'expliqua-t-elle avec un petit sourire sans joie. J'acquière un accès temporaire aux pensées des personnes qui me blesse sous ma forme projetée. Ce n'est pas immédiat malheureusement, sinon j'aurais pu vous éviter ce petit interrogatoire.

— Pourquoi tu ne nous as rien dit ? lui demanda Connors.

— Parce que ce n'est que la seconde fois que cela se produit, je n'étais donc pas certaine d'y parvenir et puis...vous m'auriez cru sur parole ?

Nous ne répondîmes pas, le regard que nous échangeâmes étant assez éloquent pour se passer de mot.

— Alors la situation est simple et claire, nous n'avons plus qu'à la livrer à Lovory, dit Connors en relevant Lévantis sans ménagement.

— Mes hommes ne vous laisseront pas faire ! Ils me sont loyaux.

— Plus quand on leur expliquera ton plan...

— Ils sont au courant ! Enfin pour certains, nous informa Rem, le visage plissé sous l'effort de concentration.

— Sorts de ma tête ! grinça Lévantis, ses yeux lançant des éclairs.

« Que fait-on ? » demandai-je à Connors d'un simple regard, qu'il comprit aussitôt. Nous pouvions prendre le risque de sortir de là en tenant Lévantis en respect, en espérant que ses hommes hésiteraient et que nous aurions le temps de les neutraliser. Mais cela faisait beaucoup de « si ».

— Rem, te sens-tu encore capable d'aller jeter un coup d'œil de l'autre côté sous ta forme projetée ? Cela pourrait nous donner un avantage certain.

— Je peux essayer, mais...je ne promets rien, nous avoua-t-elle franchement dans un soupir harassé en se laissant tomber sur le sol, au milieu de la pièce.

Rien qu'à voir la lenteur avec laquelle elle ramena ses jambes sous elle, je sus qu'elle n'y arriverait pas. Voir même que la simple tentative pourrait être dangereuse pour elle.

— Rem, laisse ce n'est pas grave, tu es trop fatiguée, lui dis-je gentiment.

— Il y a une autre solution, nous dit soudain Lévantis. Emmenez-nous, mes hommes et moi, avec vous sans faire d'histoire et tous ce passera sans incident.

— Tu plaisantes là ! Tu nous penses vraiment assez bêtes ?

— Vous avez une autre option, sans risquer la vie précieuse de vos chers amis ? Après c'est un coup de poker ! Moi, je le tenterai mais toi, tu es trop...sentimental ! provoqua-t-elle une nouvelle fois Connors en rigolant franchement cette fois-ci.

— Lui peut-être, mais moi non ! résonna soudain la voix de Lynch, alors qu'un éclair argenté traversait la pièce, atteignant Lévantis, qui s'écroula dans un cri.