Chapitre 14 ; partie 3

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                                                              * * *

Lorsque je rouvris les yeux, je me rendis compte que je m'étais endormie après ma crise auprès de Ruben qui était toujours là et qui somnolait. La seule différence depuis tout à l'heure, c'était qu'il avait remis ses vêtements.

J'entendis des chuchotements dans le couloir, juste à côté de la cellule, ce qui m'intrigua et me fit relever la tête. Au travers de l'ouverture de la porte, je réussis à distinguer Cadeig et Tigus affichant tous les deux des sourires maléfiques. Je me mis debout en essayant de ne pas faire trop de bruit avec la chaîne à ma cheville et cela fit rire le Haut-Ministre d'Espérance.

« Il ne fallait pas vous lever Mathing, dit-il d'une voix forte. Vous étiez tellement mignons l'un contre l'autre. Je suis sûr que Deoletti serait ravi d'apprendre ce que vous faites pendant qu'il a le dos tourné.

-Ne vous avisez même pas de l'approcher, le menaçai-je.

-Sinon ? sourit-il un peu plus. De toute façon, tout le monde vous croit morte dans un fâcheux accident. Votre cher Deoletti a même tenté de mettre fin à ses jours après votre décès. »

Je chancelai un peu. Même si je savais déjà que Romain avait essayé de se suicider, cela faisait toujours aussi mal de l'entendre. Est-ce qu'à un moment ces deux hommes pourraient avoir un peu de compassion ? Apparemment non. Ils rigolèrent même un peu plus en voyant le trouble dans mes yeux. Heureusement qu'une porte nous séparait sinon j'en aurais cogné un, voire peut-être même les deux.

Leurs rires réussirent à réveiller Ruben qui se rendit immédiatement compte de leur présence. Il se releva trop vite et manqua de tomber. J'allais aller l'aider quand il m'arrêta d'un geste, il voulait se débrouiller seul et montrer que le Projet ne l'avait totalement brisé. Il vint se mettre à côté de moi devant la porte et interpella les Haut-Ministres à travers l'ouverture :

« Qu'est-ce que vous voulez ? leur demanda-t-il sur la défensive.

-Nous avons pris notre décision pour la suite, expliqua Tigus avec un rictus mauvais. Vous avez de la chance, nous avons décidé de ne pas vous tuer.

-C'est trop d'honneur, rétorquai-je en levant les yeux au ciel.

-Vous voyez bien que nous sommes tout de même gentils, reprit-il. »

Cette fois, ce fut moi qui eue un rictus. Comme s'ils avaient encore un peu bonté en eux. J'essayais de rester calme mais en réalité j'avais peur de ce qui allait nous tomber dessus. S'ils ne nous tuaient pas, c'est qu'ils avaient trouvé quelque chose de pire à nous faire endurer. Instinctivement, j'attrapai la main de Ruben et même s'il fit comme rien ne s'était passé, je sentis la pression de ses doigts sur les miens.

« Alors ? questionna Ruben agressif. Qu'est-ce que vous avez prévu si vous ne nous tuez pas ?

-Vous serez envoyés à l'extérieur pour continuer les recherches du Projet, répondit Tigus. Vous partirez demain matin pour Renaissance. »

Cette annonce fit l'effet d'une bombe à l'intérieur de moi. Je me remis à chanceler, cette fois plus violemment, et Ruben eut juste le temps de me rattraper avant que je ne bascule complètement en arrière.

Il me garda contre lui et je pus poser mon front sur son épaule sous les regards amusés de Cadeig et Tigus. Je fermai les yeux, je ne voulais pas les voir. Ils savaient que je n'étais pas une Survivante et que je tiendrais pas longtemps à l'extérieur. S'ils m'envoyaient dehors, je mourrais.

« Pas Kaya ! protesta Ruben furieux. Ramenez-moi à Echec, servez-vous de moi pour vos tests stupides si vous voulez mais laissez-la tranquille ! Elle n'arrivera pas à survivre à l'extérieur, elle est sensible à vos foutues radiations à la con !

-C'est justement pour ça ! se justifia Cadeig. Nous pourrons voir pendant combien de temps elle arrive à tenir sans protection dehors.

-Espèce de salauds ! »

Ruben donna un énorme coup de poing dans la porte ce qui fit sursauter les Haut-Ministres et les forcèrent à reculer un peu. Je tressaillis aussi mais je restai collée contre lui, si je le lâchais, j'allais tomber.

Je vis Tigus fils arriver en courant vers son père et Cadeig. Il leur dit qu'ils valaient mieux qu'ils s'en aillent pour leur sécurité. Ils acceptèrent en nous lançant des regards noirs. Tandis qu'ils partaient, Tigus fils se tourna vers nous. Lorsqu'il me vit un peu perdue, il sourit.

« Qu'est-ce qui se passe ma jolie ? me demanda-t-il. Tu n'es pas contente d'aller dehors ?

-Fiche-lui la paix, répliqua Ruben toujours énervé. Et je t'interdis de l'appeler ma jolie.

-Ferme-la Survivant, siffla-t-il, ce n'est pas à toi que je parle. Tu sais qu'il y a un moyen de t'éviter la torture de l'extérieur ?

Je vis les yeux de Ruben s'éclairer d'un seul coup, son intérêt envers Tigus fils était en train de se réveiller alors que ce dernier allait sûrement lui raconter n'importe quoi juste pour nous énerver.

« Quel est ce moyen ? demanda Ruben, sûr de lui. »

Je le remerciai intérieurement de vouloir me protéger en les empêchant de m'envoyer dehors mais connaissant un peu son interlocuteur maintenant, je savais que ce moyen de m'éviter l'extérieur n'allait pas lui plaire, et à moi non plus.

« Il faut m'épouser, répondit Tigus fils. Mon père sera ravi que j'ai trouvé une femme et il acceptera de te laisser à l'intérieur ma jolie.

-Hors de question ! rugit Ruben en me serrant un peu plus contre lui. Jamais elle n'épousera un type comme toi !

-Je ne t'ai toujours pas parlé Survivant, ferme-la une bonne fois pour toute, s'énerva-t-il. Alors que choisis-tu ma jolie ?

-Je préfère mourir à l'extérieur, pestai-je. Allez-vous-en. »

Tigus fils parut irrité de ma réponse mais partit sans protester. Dès que j'entendis la porte au bout du couloir claquer, je me laissai glisser jusqu'au sol. Ruben, qui me tenait toujours par la taille, me suivit. Je me calai contre lui, j'avais vraiment besoin de quelqu'un auprès de moi à ce moment-là.

« Ça va aller Kaya, chuchota-t-il. On va trouver une solution.

-Tu les as entendu, quoiqu'il arrive, ils nous enverront dehors, murmurai-je choquée.

-Il y a forcément un moyen pour les empêcher de faire ça. »

Non, il n'y avait aucun moyen, aucun recourt possible pour m'éviter l'extérieur. C'étaient les Haut-Ministres et le Projet contre moi. Certes, Ruben était de mon côté mais il n'avait pas assez d'influence pour changer les décisions de nos gouvernements.

Il fallait que je me résigne à mourir. Il fallait que je me résigne au fait d'avoir perdu et de ne pas avoir réussi à sauver Malo en plus de cela. Mon ennemi était beaucoup plus fort que moi et je le savais dès le début. Pourtant, j'avais foncé tête baissée en espérant que j'arriverais à déjouer leurs plans. Il fallait que j'accepte les conséquences de mes actes maintenant.

« On se débrouillera à l'extérieur, soufflai-je. Il faut réfléchir à comment nous allons faire une fois dehors. Ne cherche pas à me protéger, c'est trop tard.

-Je ne peux pas les laisser te condamner à mort, répondit-il dans un murmure.

-Laisse-les faire, s'il-te-plaît, le suppliai-je. On se débrouillera, je te le promets. »

Ruben soupira bruyamment, il n'était pas content de ce que je lui disais pourtant il savait que j'avais raison, nous ne pouvions plus compter que sur nous-mêmes car on finirait à l'extérieur d'une façon ou d'une autre.

« D'accord, finit-il par dire tristement. On se débrouillera mais je te laisserai pas mourir Kaya, je t'en fais la promesse. »

Cobayes : Expériences - Tome 1Where stories live. Discover now