Les Maraudeurs et le Retour du Némésis (tome 5)

Chapitre 120 - LILY EVANS

Ce soir-là, Lily s'effondra littéralement sur son lit et s'endormit assez vite. La journée avait été dense avec les épreuves théoriques et pratiques de la Défense contre les forces du mal mais elle avait été aussi très épuisante émotionnellement. Après s'être enfouie sous ses couvertures, elle s'efforça de ne pas repenser à l'horrible scène qui s'était déroulée dans le parc, peu avant midi.

Elle ne savait même pas ce qui la rendait autant hors d'elle. Était-ce le comportement méprisable de cette petite brute de James Potter et de ses amis ? Non, cela pouvait la mettre hors d'elle mais elle s'en était habituée. C'était le visage dévoré par la haine de Severus qui revenait la hanter, lorsqu'il s'était écrié : « Je n'ai pas besoin de l'aide d'une sale petite Sang-de-Bourbe comme elle ! ». A ce moment-là, elle avait clairement senti quelque chose en elle se briser. Sa confiance en ce garçon... Son amitié avec, aussi.

Mais elle ne devait plus y penser. Toute cette première semaine de BUSE avait été épuisante. Ce soir, c'était le début du week-end. Ne l'attendaient que deux jours de pause bien mérités – agrémentés de quelques séances de révision – avant de reprendre la seconde semaine de BUSE.

Cependant, après s'être endormie dans son lit, elle eut l'impression de n'avoir profité du sommeil que quelques secondes avant qu'on ne la réveille. Quelqu'un la secouait doucement par l'épaule.

- Mmh, grommela Lily en se retournant dans son lit, qu'est-ce qu'il y a ? Mary ? Quelque chose ne va pas ?

Vêtue d'une robe de chambre, Mary était penchée sur son lit, l'air soucieux.

- Il y a Rogue qui demande à te voir, Lily, lui chuchota-t-elle.

- Quoi ?

- Il attend devant le portrait de la Grosse Dame.

Lily se redressa et s'assit en tailleur, le cœur battant. Mary s'était assise sur son lit, juste à côté du sien. Que voulait Severus ? Inutile de poser la question. Lily le savait bien. Et il n'avait pas fait tout ce chemin des cachots à la salle commune de Gryffondor à deux heures du matin pour parler de tout et de rien. Il allait faire comme d'habitude. Demander pardon.

- Je n'ai pas envie d'aller lui parler, décréta-t-elle finalement, qu'il dégage.

- C'est bien ce que je lui ai dit, fit Mary, il m'a répondu qu'il allait t'attendre toute la nuit. Qu'il était prêt à dormir dans le couloir, s'il le fallait.

- Oh, c'est pas vrai, souffla Lily en se frottant les yeux.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ? Tu n'as pas envie de parler à Rogue ? Rendors-toi et laisse-le passer la nuit dans ce couloir, si ça lui chante. Il se fera prendre par Rusard et ça lui passera l'envie de recommencer.

Lily fut sérieusement tentée de suivre le conseil de Mary. Mais elle ressentait aussi le besoin de mettre le point sur les i avec Severus. Il fallait qu'il comprenne quelque chose d'important qu'il n'avait pas l'air de saisir.

Elle sortit de sous ses draps et jeta un peignoir par-dessus sa robe de chambre.

- Je vais lui parler, dit-elle.

- Tu es sûre ? Rien ne t'y oblige...

- Je le sais. Et ne t'inquiète pas, je ne serai pas longue. Je serai de retour dans ce dortoir avant même que tu ne t'endormes.

Elle glissa ses pieds dans ses pantoufles et quitta silencieusement le dortoir. Après avoir descendu les cinq étages dans l'escalier en colimaçon, elle arriva dans la salle commune, vide à cette heure-ci de la nuit. Elle ouvrit alors le portrait de la Grosse Dame...

Il était là, en train de faire des cent pas nerveux dans le couloir. Il se figea soudainement lorsqu'il remarqua sa présence. Un sentiment d'urgence noyait son regard noir, comme s'il jouait sa vie, ce soir.

- Lily ! souffla-t-il. Lily, il fallait que je te...

- Retourne dans ton dortoir, Severus, le coupa-t-elle d'un ton sec.

- Q-quoi ?

- Retourne-dans-ton-dortoir, répéta-t-elle plus lentement, je n'ai aucune envie de te parler. Et encore moins de t'écouter.

Severus eut l'air désemparé.

- Non... Non, attends ! Il faut qu'on parle de ce qui s'est passé aujourd'hui. On ne peut pas... On ne peut pas laisser cet évènement gâcher notre...

- Un évènement ? Un évènement ? Non, ce n'est pas un évènement qui a gâché quoique ce soit. C'est toi. J'ai pris l'habitude que tes amis de Serpentard utilisent ce terme pour parler de moi. Mais s'il y avait bien une personne chez laquelle je ne pensais jamais l'entendre, c'était bien toi.

- Je suis désolé, dit Severus d'une voix haletante, désespéré.

- Ça ne m'intéresse pas.

- Je suis désolé !

- Epargne ta salive.

Lily croisa les bras, hostile à l'avance face à tout ce que Severus pouvait bien dire pour sa défense.

- Je suis sortie seulement parce que Mary m'a dit que tu menaçais de dormir ici, reprit-elle.

- C'est vrai, répondit Severus, je l'aurais fait. Je n'ai jamais eu l'intention de te traiter de Sang-de-Bourbe, ça m'a simplement...

- Echappé ? grinça Lily en l'assassinant du regard. Il est trop tard. Pendant des années, je t'ai trouvé des excuses. Aucun de mes amis ne comprend pourquoi j'accepte encore de te parler. Toi et tes chers amis Mangemorts... Tu vois, tu ne le nies même pas ! Tu ne nies même pas que vous avez tous l'ambition de le devenir ! Vous avez hâte de rejoindre Tu-Sais-Qui, n'est-ce pas ?

Lily avait bien remarqué comment Avery et Mulciber se comportaient quand ils lisaient dans La Gazette du sorcier des articles sur les derniers méfaits des Mangemorts. Et même si Severus n'avait jamais témoigné de sympathie pour les sbires de Celui-Dont-On-Ne-Devait-Pas-Prononcer-Le-Nom, Lily avait eu la désagréable sensation qu'une certaine attirance pour ces mages noirs commençait à poindre en lui. Et sa réaction agit comme une confirmation de ces soupçons.

Il ouvrait la bouche puis la refermait, comme s'il ne parvenait pas à trouver une réponse à la fois sincère et acceptable aux yeux de Lily.

- Je ne peux plus faire semblant, reprit-elle alors avec résignation, tu as choisi ta voie, j'ai choisi la mienne.

Severus sortit enfin de son mutisme.

- Non... Ecoute, je ne voulais pas...

- ... me traiter de Sang-de-Bourbe ? Mais tu traites de Sang-de-Bourbe tous les gens qui sont de même naissance que moi, Severus. Pourquoi serai-je différente ?

Là encore, ce n'était que des soupçons. Lily ne l'avait jamais entendu insulter un autre élève ainsi. Mais elle s'était demandée s'il ne le faisait pas, lorsqu'elle avait le dos tourné, lorsqu'il traînait avec Avery et Mulciber. Et encore une fois, le silence de Severus lui confirma ses doutes.

Après lui avoir jeté un dernier regard chargé de mépris, Lily tourna les talons et claqua le portrait de la Grosse Dame derrière elle, fichant hors de sa vue ce Severus fébrile et toxique.

Alors qu'elle traversait la salle commune vide vers son dortoir, elle se fit la réflexion que, cette fois, cela n'avait rien à voir avec toutes les disputes qu'elle avait eu avec Severus par le passé.

Cette nuit, son amitié avec lui était définitivement morte.