Chapitre 32.3

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— Comme au bon vieux temps, partenaire, me murmura Arenht en m'attirant contre lui.

Sa bouche chercha la mienne et je me retrouvais plaquée contre le mur, emprisonnée contre son corps chaud. Je lui rendis son baiser avec autant d'ardeur, les doigts noués dans ses mèches soyeuses. Il s'écarta légèrement, posant son front sur le mien, la respiration aussi anarchique que la mienne.

— Allez, plus que quelques capteurs à poser et on rentre, souffla-t-il. On reprendra où l'on s'est arrêtés.

— Je saurais te le rappeler, le taquinais-je.

Un dernier baiser sur le bout de mon nez et il se pencha sur le sac de sport noir qu'il avait amené. À l'intérieur, un coffret rectangulaire reposait. Ouvrant les loquets verrouillant celui-ci, Arenht dévoila six boîtiers de formes ovales dont le centre s'ornait d'un minuscule clavier surmonté d'un écran, petits bijoux de technologie concoctés par Yorsha. Séparant le chargement en deux, j'ouvris mon sac à dos pour y fourrer les capteurs, Arenht faisant de même de son côté.

L'autre équipe s'occupait d'un autre bâtiment plus loin dans la ville. La seconde phase de la mission était prévue dans quelques heures. Les appareils avaient été déposés avec tout le soin requis aux endroits prévus. Yorsha s'occupait de les régler depuis son ordinateur. Ces capacités en informatique ne cessaient de m'épater. En tout cas, grâce à lui, notre travail se résumait à un minimum de gestes, transport et dépôt. Ayant terminé l'installation, nous nous apprêtions à quitter le site. Arenht portait les sacs vides vers la voiture, marchant devant moi. De temps à autre, il se retournait à moitié pour me jeter un regard torride. S'il continuait son petit manège, j'allais lui sauter dessus dans la voiture. Je me demandais si ce n'était pas ce qu'il cherchait, tout en lui rendant le même message. Mais mieux valait attendre d'être hors de la zone.

Mon cerveau lança soudain des signaux d'alarme. Tournant la tête, j'essayais de repérer d'où pouvait venir cette sensation de danger. J'entraperçus une silhouette sombre sur le côté. J'ouvris la bouche pour avertir Arenht juste devant moi, mais un coup brutal assené sur l'arrière de mon crâne me fit basculer dans l'inconscience.

Oh le mal de crâne.

J'entrouvrais douloureusement mes paupières. Point de soleil pour heurter mes yeux sensibles. On était à l'intérieur d'un bâtiment sombre. Je voulus masser l'arrière de ma tête qui m'élançait avec insistance, mais je fus freinée par des chaînes entravant lourdement mes membres.
— Qu'est-ce que..., balbutiais-je, incrédule.
Les yeux à présent grands ouverts, je reconnus le lieu. On était à l'intérieur de l'entrepôt principal, celui-là même dont Sheren avait fait le tour. Le Groupe L. ce ne pouvait être que lui le responsable. Je cherchais mon partenaire. Il n'était pas à côté de moi. J'imaginais de suite le pire, et s'il l'avait... je ne voulais même pas songer à cette éventualité. Balayant les lieux du regard, je finis par le repérer, dans un coin obscur. La tête affaissée, il ne bougeait pas. Mon rythme cardiaque s'emballa immédiatement, je manquais me trouver mal.

— Arenht, l'appelais-je, la voix légèrement éraillée.

Il demeura immobile. À cette distance il ne m'était pas possible de distinguer s'il respirait encore. Je grondais contre mes liens, tirant vigoureusement dessus. Je pris une profonde inspiration. Il fallait que je garde l'esprit clair. Fixant la silhouette de mon homme, un détail percuta mon esprit. Il était enchaîné lui aussi. Je respirais plus librement. Il était en vie, prisonnier comme moi, mais en vie. Il s'agissait à présent de découvrir où se trouvaient nos agresseurs. Leur identité ne faisait aucun doute. Il fallait que je gagne du temps pour laisser à la meute le soin de rappliquer comme prévu, voir plus tôt. Sheren s'apercevrait de notre absence. J'espérais qu'ils n'aient pas mis la main sur les appareils que nous avions soigneusement installés. On pourrait en avoir besoin.

J'étais en train d'analyser l'agencement du local et les possibilités de sorties si nous réussissions à nous défaire de ses liens quand un éclat de rire résonna dans l'entrepôt, envoyant des frissons désagréables courir le long de mon échine. Un rire féminin. La personne à qui il appartenait entra dans mon champ de vision. Le choc. Si j'avais cru la revoir un jour... Ma louve gronda nerveusement, en écho à ma propre stupéfaction.

— On en reste bouche bée, n'est-ce pas ?

Je déglutis péniblement, ne la quittant pas du regard. Un large sourire plaqué sur ses lèvres rouges, elle portait ses longs cheveux blonds attachés, dégageant ses traits fins. J'avais tout fait pour oublier ce visage et voilà qu'il réapparaissait, ici. Mon esprit s'efforçait de faire les connexions amenant à cette situation improbable.

— J'attendais avec impatience de voir la tête que tu ferais lorsque ce jour arriverait. Je dois dire que je ne suis pas déçue de l'attente.

— Lahra, crachais-je.

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Where stories live. Discover now