Chapitre 17.2

123 8 1
                                    


Je cillais, figée autant par la surprise que par la poigne qui me maintenait en place. Cette voix...

— Pour une surprise, soufflais-je en tentant de reprendre contenance.

Toujours plaquée au mur, je n'en revenais pas. Pour un retour dans le passé ! C'était bien l'une des dernières personnes que j'aurai pensé rencontrer aujourd'hui. Il n'avait pas vraiment changé. Ces mèches brunes étaient toujours aussi indisciplinées. Mais son regard... Si dur. Il semblait loin l'étudiant réservé qui adorait me taquiner. Ethan. Son prénom résonnait dans ma tête, entraînant une multitude de souvenirs, dont celui de Cassie. La culpabilité resurgit, celle engendrée par ma disparition inexpliquée, des mensonges entourant mon absence soudaine de leur vie. Je baissais les yeux, incapable de soutenir plus longtemps le sien chargé de rancœur.

— Comment...

— Cela a été dur de retrouver ta trace, mais ma persévérance a fini par payer. Tu as disparu du jour au lendemain, sans autre signe que cette lettre. Elle ne venait même pas de toi, tu n'aurais jamais formulé un tel texte, tu étais plus douée que cela avec les mots.

— Ethan, je...

Il pointa un doigt vers moi pour m'imposer le silence.

— Tu n'as pas vu à quel point ta disparition a touché Cassie. Elle n'était plus la même après ça. On s'est perdu de vue à la fin de cette année-là. Elle a changé d'université, s'est rapprochée de celle de ses parents.

Les larmes me brouillaient la vue. Chacun de ses mots me faisait souffrir, refaisant remonter à la surface toutes les conséquences de mon drame sur les autres.

— À présent je sais ce que tu cachais, les raisons de ton absence. Je connais ton secret.

J'ouvris la bouche, la refermais. Que répondre ? Il savait, vraiment. Comment ? Ce n'était pas le moment de me poser ce genre de question. L'argent me brûlait la peau dès qu'il appuyait un tant soit peu l'arme contre ma peau. J'avais l'impression d'être dans un cauchemar. Un cauchemar tout ce qu'il y avait de plus réel. Je cherchais le moyen de l'atteindre, de retrouver ne serait-ce qu'une parcelle de son amitié envers moi. Il ne m'avait pas tué, c'était déjà ça.

Il me plaqua l'écran de son portable sous le nez avant de faire défiler des photos. La plupart me voyaient y figurer, toutes prises à mon insu. Un sentiment de trahison me fit frémir que je tempérais aussitôt en me rappelant les circonstances de ma disparition. Il me suivait depuis un moment, nous suivait. D'autres clichés immortalisaient Arenht, Sheren, Doc. Tous ceux que je côtoyais. Je les avais mis en danger. Même si ce n'était pas intentionnel, le résultat était là.

— Tu vas me mener à eux. J'ai besoin de réponses.

Je le fixais incrédule. Croyait-il vraiment que c'était aussi simple ? Je frissonnais en songeant à la réaction d'Arenht quand il le découvrirait en train de me menacer. Le connaissant, il n'hésiterait pas à s'en prendre à lui et il n'y avait pas de doute sur l'issue d'une confrontation entre les deux hommes. Je tenais encore à Ethan, je ne le croyais pas capable de me faire du mal volontairement.

Quelques minutes à peine, voilà ce dont je disposais pour prendre une décision. Arenht ne tarderait pas à arriver et j'anticipais déjà sa réaction.

— Ce n'est pas en me menaçant que tu leur donneras l'occasion de t'écouter. Enlève ce couteau de ma gorge.

Il cilla devant mon air déterminé. Oui, cela devait lui changer. Innocence et timidité disparues, nouvelle Aylyn en action.

Soudain, je tournais la tête, humant l'air. Je devais avoir l'air folle ou ridicule, mais ce n'était pas le moment de m'inquiéter de la façon dont il me voyait. Ma louve l'avait perçu bien avant moi. Son odeur, irrésistible. Arenht. Mon corps fut traversé par deux pulsions opposées. Une envie instinctive de courir vers lui et celle de l'éloigner d'Ethan.

— Lâche-moi, tout de suite, répétais-je à mi-voix. Fais-moi confiance.

Il ancra son regard dans le mien. J'y lus la confusion, le doute et une infime trace d'admiration. Profitant de son indécision, mes doigts s'enroulèrent autour de son poignet et j'éloignais la lame de ma gorge. Ma force dut le surprendre aussi. Un sourire en coin apparut sur son visage et je retrouvais mon ami d'autrefois. Il se recula d'un pas et d'un mouvement leste, il rangea son couteau dans l'intérieur de sa veste, pile au moment où la silhouette d'Arenht apparaissait au détour du couloir. 

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Where stories live. Discover now