Chapitre 3.1

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Quelques mois avaient suffi pour me faire sortir de ma coquille, me débarrasser de mes barrières mentales. J'arpentais le campus avec une aisance dont je ne me serais jamais cru capable au début de l'année universitaire. Mes cauchemars ne me hantaient plus toutes les nuits, j'étais apaisée. La présence de ma colocataire était clairement l'une des raisons m'ayant permis de surmonter les troubles relatifs à mon traumatisme. Elle en ignorait toujours l'existence. Je préférais garder le naturel avec lequel elle se comportait et ne pas risquer de la voir me traiter comme une chose fragile ou défectueuse.

La fin des partiels marquait une transition. Une courte période de relâchement avant le début du second semestre. On sentait dans l'air la tension qui s'évaporait, les visages plus détendus, les étudiants s'éparpillant sur les espaces verts du campus, profitant enfin des rayons du soleil et de l'air plus doux. Allongée à côté de mon amie sur l'herbe derrière la BU, je savourais cette bouffée d'air pur. Ces derniers jours, je les avais passés en compagnie exclusive de mes cours et des livres. Même si j'adorais étudier, mon esprit appréciait de pouvoir de nouveau s'évader librement. Pourtant cet état de calme ne devait pas durer longtemps. Cassie avait une idée derrière la tête.

Une fête étudiante. L'idée de me retrouver au milieu de jeunes en transe, entre musique assourdissante et alcool coulant à flots, n'avait rien d'attrayant. J'allais formuler un non en bonne et due forme quand mon amie m'arrêta d'office en me posant un doigt sur les lèvres.

— Je n'accepte pas de refus. Ce n'est pas toi qui voulais décompresser ? Vois ça comme un cadeau d'anniversaire en avance, plaida-t-elle.

Celui-ci avait lieu dans moins d'une semaine. Je la foudroyais du regard, car elle savait qu'elle touchait une corde sensible. Je levais les mains en signe de reddition. Elle me sauta au cou et me claqua un baiser sonore sur la joue.

— T'es la meilleure ! Alors, que va-t-on se mettre ? C'est moi qui choisis OK ? Un peu de changement ne te fera pas de mal.

Alors qu'elle sautillait partout autour de moi, je commençais déjà à regretter ma décision.


La nuit nous accueillit à la sortie de la résidence. Légèrement mal à l'aise après être passée par l'étape relooking façon Cassie, j'essayais de refouler mon stress à l'idée du lieu où nous nous rendions. Je ne cessais de tirer sur le fin tissu de mon haut pour le descendre. Au moins avais-je réussi à éviter la jupe, non qu'elle n'ait pas tenté le coup. Je m'étais prêtée de mauvaise grâce à la séance de maquillage, insistant pour qu'il reste le plus discret possible. Après un coup d'œil dans le miroir, je devais avouer qu'elle avait su rehausser mon regard sans excès.

À l'entrée de la discothèque, un grand baraqué se saisit de ma main pour y plaquer un tampon. J'observais le grossier dessin sans y trouver une forme reconnaissable. On n'était clairement pas dans l'artistique ici. Imitant Cassie, je glissais le bracelet fluorescent offert à mon poignet avant d'entrer dans l'antre.

Le contraste entre le relatif calme de la nuit et le volume sonore démesuré à l'intérieur faillit avoir raison de ma bonne volonté. J'esquissais un mouvement de recul. La main de mon amie se posa sur mon avant-bras pour me rassurer et contrer une éventuelle fuite. Pouvait-on vraiment s'amuser dans cette ambiance ? Les jeux de lumière zébraient l'obscurité, éclairant par intermittence les corps entassés qui se trémoussaient en rythme ou non. La musique, si on pouvait qualifier ainsi ces basses vibrantes qui ébranlaient mon corps, le traversant telles des vagues avant de repartir, était bien loin de mes goûts habituels, mais apparemment Cassie appréciait. Je pris une inspiration avant de la suivre, veillant à ne pas lui lâcher la main de peur de la perdre dans cette foule anonyme.

— Tu crois qu'Ethan va nous retrouver parmi tout ce monde, lui demandais-je en me penchant vers elle.

— Quoi ? me cria-t-elle.

Parler allait se révéler extrêmement difficile songeais-je en répétant ma question directement dans son oreille pour couvrir le bruit ambiant.

— Ne t'inquiète pas. 

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Where stories live. Discover now