Chapitre 31.4

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Durant le trajet, je le regardais à la dérobée, encore sous l'effet de ses baisers. Il ne quitta pas la route des yeux, mais sa main vint effleurer ma cuisse avant de saisir ma main. Le bien-être m'envahit. Une fois arrivés, j'eus peur qu'il ne monte pas avec moi. La seule fois où il avait remis les pieds dans l'ancien appartement de sa sœur, il était sous l'influence de l'alcool. Pourtant il ne marqua aucune hésitation. Il vint m'ouvrir la portière, m'enlaça avant d'entrer et de monter les marches.

À l'intérieur, je me débarrassais de ma veste et allais chercher des serviettes pour nous sécher. Quand je revins, je le trouvais légèrement perdu dans ses pensées. Laissant le tout sur la table basse, j'allais faire chauffer de l'eau, lui laissant l'espace nécessaire pour affronter ses souvenirs. Son odeur le précéda. Ses bras vinrent entourer ma taille, sa tête vint se nicher dans mon cou. Je me laissais aller contre lui. Puis un tissu moelleux entoura ma tête. Je souris alors qu'il me séchait les cheveux.

— Je la voyais en toi, dit-il tout à coup.

Zariah. Juste en l'évoquant, je sentais toute la souffrance qu'il s'efforçait de contenir, la douleur de sa perte toujours aussi présente.

— Je revivais cette incapacité à la protéger. Toutes ces fois où je n'étais pas là pour toi...

Je me tournais lentement vers lui, ancrant mon regard au sien.

— Chaque fois que le danger te frôlait, chaque tir dans ta direction, chaque fois où tes larmes coulaient, où la peur assombrissait ton regard... Tous ces moments me rendaient fou, me tuaient à petit feu.

— Arenht...

Ma main caressa sa joue. Comme j'aurai voulu absorber sa souffrance, la faire disparaître de ses prunelles ambrées. Tout au moins partager son fardeau. Il embrassa mes doigts avant de s'écarter légèrement.

— Vaudrait mieux te changer.

Je hochais la tête avant de me diriger vers mon armoire. Je saisis un tee-shirt propre avant d'aller vers la salle de bain. Il me saisit le poignet doucement. Mes yeux s'arrêtèrent sur son torse nu. Oh. Je me figeais sous cette vision déstabilisante. Il en profita pour déboutonner lentement mon chemisier. Au dernier bouton enlevé, je retins son geste, non par pudeur, mais par honte de mes cicatrices.

— Ne te cache pas de moi, me supplia-t-il.

Je suspendis mon geste, le cœur battant la chamade. Le tissu glissa, avec lenteur. Il avait déjà eu un aperçu le soir du bal, pourquoi me cacher maintenant ? Les yeux baissés, mes mains tiraillèrent nerveusement mon jean. Le silence augmentait mon malaise. Je sentais mes joues brûler, les larmes poindre à mes paupières. S'il ne disait rien dans les prochaines secondes je comptais aller m'enfermer dans la salle de bain. Il relâcha sa respiration en un soupir lourd de sens.

— Ayl...

Je mordillais ma lèvre pour ne pas craquer sous la fêlure de sa voix. Il s'approcha plus près, lentement, comme pour me laisser le temps de décider si je restais ou reculais. Il était si près désormais que son souffle venait percuter ma peau, l'électrisant. Je le sentais vibrer, se contenir. J'osais relever la tête vers lui. Ses yeux flamboyaient. Colère, rage, culpabilité. Je les sondais à la recherche d'une trace de dégoût, même infime. Aucune. Je relâchais la tension, un soupir tremblotant m'échappa.

— Je vais les tuer.

Sa déclaration sonna comme une sentence, irrémédiable. Puis sa main alla à la rencontre de mes cicatrices. Je me figeais à ce contact pourtant léger. Il attendit avant d'en suivre les contours. J'avais fermé les yeux. Sous ses doigts, ma chair meurtrie revenait à la vie, chaque terminaison nerveuse vibrant à son passage.

— Tu es tellement forte.

Je secouais la tête, incapable de parler. Comme il se trompait. Je ne m'étais jamais senti aussi fragile que ces dernières semaines, incapable d'aider, incapable de me transformer, tourmenter par mes faiblesses.

Ses mains se posèrent sur ma taille, m'attirant contre son torse. Sa chaleur me happa, échauffa mes sens. Peau contre peau. Il courba la tête, posa ses lèvres contre la peau sensible de mon cou en un effleurement léger. Mes yeux se fermèrent, ma bouche s'entrouvrit sur un soupir, ma tête bascula pour lui offrir davantage d'accès. Son rire à demi étouffé envoya des ondes de sensations dans tout mon corps. Comme avançant en terrain inconnu, il prenait son temps, son souffle me chatouillant délicieusement la peau, engendrant des frissons involontaires.

— La forêt, murmura-t-il à mon oreille. La pluie d'été, légèrement sucrée.

Je ne m'étais jamais penché sur l'odeur que je pouvais dégager. Ses mots s'ancraient en moi, caresse sur mon âme, aussi douce et électrique que ses gestes.

— J'ai l'impression de rêver, avouais-je dans un chuchotement.

— Je peux t'assurer que je suis tout ce qu'il y a de plus réel, m'assura-t-il en entrecoupant sa phrase de légers baisers.

Il me fit face, poussa un soupir résigné et attrapa mon tee-shirt propre. Lorsqu'il me l'enfila, je découvris à quel point se faire habiller, pouvait être un acte sensuel. Il remettait mes vêtements tout en augmentant mon désir. Des signaux contradictoires que j'avais du mal à saisir. Il dut se rendre compte de mon trouble.

— Je pense qu'il est l'heure de dormir ma belle au bois dormant.

Au même instant, j'étouffais un bâillement. Peut-être bien, oui. Sauf que je ne voulais pas qu'il s'en aille.

— Tu restes ? lui proposais-je d'une voix mal assurée.

Il se passa une main dans les cheveux, me sonda du regard avant de saisir son portable. Il pianota rapidement dessus avant de le poser sur un meuble.

— Je suis tout à toi.

Mes joues rougirent aux pensées qui s'invitèrent dans mon esprit à ces paroles. Il ria doucement avant d'aller éteindre la lumière et m'entraîner vers le lit à la lueur de la lune. Dans la demi-pénombre, nos pantalons finirent sur le sol.

Une fois allongés, il m'attira contre lui. Je frissonnais de nouveau lorsque ses jambes se glissèrent contre les miennes. Je me nichais contre son torse, inspirant son odeur. Il me caressa les cheveux en un mouvement apaisant. Je fermais les yeux, laissant le sommeil me gagner. Juste avant de sombrer dans les bras de Morphée, je sentis son souffle effleurer mon oreille. « Bonne nuit mon ange. » 

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Where stories live. Discover now