Chapitre 28.2

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Il se rapprocha de moi et m'effleura du bout des doigts. Ce geste suffit à me déstabiliser. Il n'était vraiment pas dans son état normal ce soir. Il fallait que je prenne mes distances et le plus vite serait le mieux, sinon je ne donnais pas cher de ma santé mentale. Malgré l'odeur entêtante de l'alcool, je n'avais que trop conscience de son parfum familier, sans compter sa façon troublante de me regarder en cet instant. Bon d'accord, ses yeux étaient légèrement voilés par la boisson, mais cela ne m'empêchait pas d'en être chamboulée. D'un pas, il réduisit de nouveau l'espace entre nous. Pour la distance, c'était râpé. Malgré moi, mon souffle s'accéléra en même temps que mon rythme cardiaque. Pourquoi était-il venu chez moi dans cet état ?

— Arenht, tu ne veux pas t'asseoir, que je te serve un thé ou un chocolat chaud ?

Intérieurement je me mettais des baffes. Et pourquoi pas une tisane pendant que j'y étais ? Quelle gourde je faisais, vraiment ! Et voilà qu'il se mettait à sourire, dans le genre à se faire damner un saint. Ce n'était pas juste qu'il soit aussi sexy tout en étant à peine capable de se tenir debout.

— Tu n'as rien de plus fort partenaire ?

Oh si, j'avais bien une bouteille de whisky traînant dans un placard, mais pas question d'aggraver son état. Par contre, j'en aurais bien pris une ou deux gorgées pour tenter de me détendre.

— C'est moi ou il fait une chaleur terrible ici, dit-il tout à coup en tirant sur le col de sa chemise.

Il en déboutonna quelques boutons et je sentis à mon tour la température grimper. Rien à voir bien sûr avec l'air ambiant frôlant les dix-huit degrés. Il avait prévu de me faire mourir à petit feu ce soir ou quoi ?

Je pris la décision de le faire dormir ici. Pas question qu'il reparte dans cet état. Le canapé, trop étriqué pour son gabarit, n'était pas une option. Il ne me restait donc qu'à m'y installer. Je ne me voyais pas passer la nuit, ou ce qu'il en restait, allonger à côté de lui. Comment aurais-je alors empêché mes mains de le toucher, mon corps de se rapprocher du sien, mes doigts de s'enfouir dans ses mèches de jais ? Mieux valait éviter toute tentation supplémentaire. Refoulant les images que mon esprit enfiévré s'obstinait à faire apparaître, j'allais chercher une couverture dans mon armoire.

— Vaux mieux que tu dormes ici, tu n'es pas en état de rentrer, lançais-je tout en bataillant avec les portes récalcitrantes de ma penderie.

Au moins, il ne voyait pas mes joues virer à l'écarlate alors que je prononçais ces mots.

— Je ne vais pas t'embêter plus longtemps, t'inquiètes j'arriverai à retrouver mon appart.

— Je préfère que tu restes sinon je ne serais pas tranquille. Tu risques de te faire écraser ou de t'effondrer Dieu sait où.

— OK.

J'avais lancé la proposition sans forcément m'attendre à ce qu'il capitule. Je prenais conscience de ce que cela impliquait. Il allait dormir chez moi, en tout bien tout honneur, mais tout de même. 

— Je te laisse le lit, je prendrais le canapé. Et c'est non négociable, précisais-je en le voyant hausser un sourcil. Tu ne rentrerais jamais sur ce fauteuil.

— À vos ordres, partenaire, dit-il tout en esquissant un salut militaire.

Je m'esclaffais en le voyant tituber juste après celui-ci. Il était vraiment temps qu'il se couche. Je balançais la couette sur le fauteuil avant de lui saisir le bras et de l'amener jusqu'au lit. Je m'efforçais de ne pas profiter de la situation alors qu'il était à demi dénudé et qu'il s'appuyait contre moi. Des frissons me courraient tout le long de ma colonne vertébrale, ma peau comme électrisée à son contact. Le trajet jusqu'au matelas me parut trop bref. Déjà nos corps se détachaient et il basculait dans mon lit. Il batailla avec les derniers boutons de sa chemise avant de la retirer complètement. Je détournais promptement la tête pour éviter de loucher sur celui-ci. En tout cas, Arenht ne se formalisa pas de la situation et dès que sa tête toucha l'oreiller, il sombra dans le sommeil, comme une masse. Je soupirais après avoir retenu pendant quelques minutes ma respiration. Je l'observais quelques instants, me gorgeant de son visage qui prenait au repos un aspect plus enfantin. Je rabattis la couverture sur lui, osais toucher délicatement ses cheveux avant de reculer. Allez, il était temps d'aller me coucher. Je m'installais tant bien que mal dans le canapé, repliant mes jambes, m'enroulant dans la couette.

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Where stories live. Discover now