Chapitre 30.2

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Arenht le lorgna d'un œil mauvais, se rejetant contre le dossier de sa chaise, les bras croisés. C'était manifestement mal parti, mais je connaissais Antonh, il ne lâcherait rien. Ils avaient ce point commun d'être terriblement têtu quand ils le souhaitaient.

— Bon, Aylyn commence, reprit Antonh, car sinon on en sera encore là demain matin.

Je me dandinais sur mon siège, mal à l'aise. Je ne savais même pas quoi dire. On se serait cru à une séance chez un psychologue de couples. Je me mordis la lèvre pour ne pas rire à cette pensée. Sérieusement, il pensait vraiment que sa confrontation allait mener quelque part ?

— Eh bien... J'aimerais que les choses redeviennent comme avant, débitais-je avec précipitation.

Les yeux baissés obstinément sur ma tasse, je n'osais pas les relever, attendant sa réaction la boule au ventre.

— Ce n'est pas si simple quand ma partenaire ne me fait plus confiance, déclara Arenht.

Ses mots résonnèrent douloureusement à mes oreilles. Évidemment qu'il pensait ça, m'avouais-je. Tout avait commencé quand j'étais partie seule en mission, sans rien lui dire. À sa place, je l'aurais aussi mal pris.

— Je te fais toujours confiance, répondis-je tout de même.

— Eh bien ! Tu as une drôle de façon de le montrer !

— Ne sois pas sarcastique, cela ne te va pas, lui reprochais-je, piquée par son ton moqueur.

— Alors, explique-moi pourquoi tu m'as mis de côté cette fameuse nuit. Pourquoi t'es-tu aventurée seule chez cette pourriture ?

Sa voix dure trahissait son ressentiment. Déglutissant péniblement, je cherchais mes mots. À côté de moi, Antonh restait silencieux, tel un témoin impartial. Je ne pouvais pas avouer la véritable raison. Je me voyais mal balancer "Eh bien, je ne voulais pas voir Lahra être ta partenaire". Autant étaler ma jalousie au grand jour et mourir de honte.

— Je ne voulais pas te déranger.

Au moment où je prononçais ces mots, je me rendis compte de ma bêtise. La super excuse ! On aurait dit celle d'une gamine à ses parents.

— En fait je voulais prouver que je pouvais me débrouiller seule, me rattrapais-je.

Et voilà, elle était là la véritable raison. Je plantais résolument mon regard dans celui de mon partenaire. Il eut un rire sans joie, presque cruel.

— C'est une réaction égoïste, tu ne trouves pas ?

— Tu n'as rien compris, m'énervais-je devant son air buté. C'est tout le contraire justement. J'en avais assez de toujours avoir besoin de quelqu'un pour veiller sur moi.

Cette discussion que je voulais avoir depuis un moment avec lui ne se déroulait vraiment pas comme je l'avais prévu. Je savais qu'il m'en voulait, mais chacune de ses paroles m'arrivait comme une accusation et je n'arrivais pas à l'encaisser. La colère prenait le pas sur la culpabilité.

— Ça t'a pris d'un coup cette lubie ? reprit-il d'un ton mordant. C'était totalement inconscient et irresponsable !

— Je m'en suis rendu compte, merci ! Ce n'est pas en remettant ça sur le tapis qu'on va avancer !

Il me mettait hors de moi. Je voulais bien discuter, mais j'avais assez ressassé mes erreurs pour ne pas les entendre une énième fois de sa part. J'avais merdé, OK. J'en avais gardé des marques qui me le rappelleraient longtemps.

— Ce n'est pas moi qui t'ignore et t'évite depuis je te signale, l'attaquais-je à mon tour.

— J'ai l'impression que tu te passes très bien de ma présence, rétorqua-t-il.

Il jeta un coup d'œil à son frère furtivement, mais son geste ne m'échappa pas. Que venait faire son frère là-dedans ?

— N'importe quoi.

Je me rencognais à mon tour au fond de ma chaise, refusant de continuer son jeu de surenchère.

Le silence s'étira alors que nous nous affrontions du regard. Je sentais que son humeur était explosive. La mienne n'était d'ailleurs pas en reste. Je décidais de couper court et de sortir. Valait mieux que chacun aille se calmer les nerfs de son côté avant que les choses ne dégénèrent. Il me suivit du regard jusqu'à ce que je franchisse le seuil de la pièce, j'en sentis le poids sur mon dos tout du long. Antonh essayerait peut-être de lui parler et de faire baisser son énervement.

Protège-moi - T.1 Pleine lune [Terminé]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora