♡CHAPITRE 68♡

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La compréhension se lut immédiatement sur le visage de Mme Itō, en dépit de sa volonté chronique de paraître discrète. Ses sourcils levés en un arc de cercle, ses yeux noisette légèrement arrondis, ainsi que ses lèvres qui échappèrent un "oh" silencieux, en étaient une indication assez claire. Non sans une irritation grimpante, Izuku se demanda si son intervention avait été assez parlante pour apaiser sa curiosité déplacée. Peut-être qu'il était un peu injuste à son égard, peut-être qu'il dirigeait ses humeurs vers la mauvaise personne. Mais, la fatigue, la colère, la tristesse, toutes ces émotions accumulées depuis sa rencontre avec Eijiro bouillonnaient en lui maintenant qu'il avait des cibles en ligne de mire. Les réactions de la petite dame, n'étaient en rien inédites. Il interagissait quotidiennement avec assez de personnes curieuses qui se croyaient peu invasives pour en être immunisé, mais l'histoire en était tout autre lorsqu'un de ses proches était l'objet de cette attention.

— Et vous avez bien raison ! S'exclama Takahiro avec son éternelle fausse joie. « La vie est assez chère comme ça et les loyers à Sapporo ne sont données. »

Passant outre la maladresse de l'épouse, il était clairement celui qui l'agaçait le plus avec ses faux-semblants. Son sourire forcé l'irritait, sa voix qui se voulait contrôlée et ses petites phrases prétendument sages et réfléchies enrageaient Izuku, qui ne pouvait pas faire autrement que tenir le regard de ces étrangers démolissant leur récente quiétude sans aucun remord.

« Bon, nous allons vous laisser... Ma chérie et moi sommes attendus quelque part. »

Après une dernière salutation que ni Izuku, ni Ejiro ne purent, ou ne voulurent, répliquer, le couple se retira aussi brusquement qu'ils étaient apparus. Ils restèrent plantés là, fixant l'intersection marquant la fin du rayon des légumes, bien après la disparation du couple Itō. Izuku prit une longue inspiration pour calmer le torrent en lui, avant de se retourner vers Eijiro qui semblait emprisonner dans ses pensées obsessives. Izuku sentit ses derniers résidus de colère se dissoudre lorsqu'il encadra le visage torturé du rouge de ses mains. Il prit le soin de couvrir ses oreilles pour le coupé des stimuli externes, puis tourna gentiment sa tête vers lui. Il s'arma de patience et massa des pouces les tempes d'Eijiro en attendant que ce dernier puisse rediriger son regard sur lui. Lorsqu'Eijiro sortit enfin de sa torpeur et se concentra sur lui, Izuku ne put s'empêcher de sourire de fierté et peut-être un peu d'attendrissement aussi. Un petit rire lui échappa face au regard stupéfait d'Eijiro.

— Rentrons. Chuchota-t-il tout simplement, non sans un doux sourire sur ses lèvres. Il ne put qu'entrevoir les yeux brillants et la mâchoire tremblantes de son cadet, avant que ce dernier ne dépose sa tête contre ses épaules et ne s'accroche à lui, désespérément, comme s'il était le seul rempart qui prévenait son monde de s'écrouler. Le corps d'Eijiro tremblait sous son étreinte et si Izuku l'avait deviné, maintenant il était sûr que son homme combattait ses angoisses et donnait tout pour se contenir. Pour ne pas se donner plus en spectacle et exposer sa vulnérabilité à tous ces passants, friands d'une anecdote à raconter à leurs proches. 

Izuku n'en avait que faire des murmures et des regards en coin, il garda ses bras autour du corps tremblant de son homme, la main droite tapotant doucement le haut de son dos. Après plusieurs minutes, il le sentit reprendre contenance contre lui. Les tremblements à peine perceptibles et la respiration moins erratique. 

« Est-ce que ça va mieux ? » La gorge nouée, Eijiro ne put que hocher la tête. Il se délia d'Izuku, non sans garder une certaine proximité entre eux.

L'aîné garda la paume de son cadet fermement contre la sienne alors qu'ils réglèrent la facture de leurs courses et se dirigèrent vers leur moyen de transport. Généralement, pour plus de praticité, ils réservaient toujours une course pour ne pas avoir à trimballer leurs achats entre mille et un arrêts de bus. Et bien que cela soit assez coûteux, Izuku ne put s'empêcher de remercier leur côté dépensier pour y avoir pensé. Être à l'abri des regards indiscrets hormis ceux du conducteur, permit aux deux hommes de reprendre un peu de contenance et d'organiser leurs idées. Bien que plongé dans ses pensées et absorbé par le brouhaha d'émotions qu'il tentait d'énumérer, Izuku ne dérogea pas à sa tâche et continua d'apporter son soutien à Eijiro pendant tout le trajet.

Cette rencontre, qu'il avait tant redoutée autrefois, marquait sans doute le début de nouvelles complications pour leur couple, mais au-delà de la peur et de l'angoisse, son cœur était rempli de quiétude. Sa colère s'amenuisait petit à petit et ses pensées qui n'avaient cessé de tourner autour d'un seul et même prénom pendant des mois, se tournaient maintenant vers son amour et uniquement vers lui. Cet Eijiro qui soignait tous les jours un peu plus ses plaies, tout en s'échinant à construire une vie digne. C'est celui-là qu'il voulait épauler et accompagner. C'est également celui-là qu'il continuerait de combler d'affection, quel que soit ce que leur réservait l'avenir.

Je veux t'aimer ♡ KIRIDEKUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant