♡CHAPITRE 57♡

117 13 0
                                    

Entre chaque monologue repentant siégeait un calme morbide qui étirait le temps à l'infini. Loin du bruit exaspérant et omniprésent des aiguilles d'une horloge, c'est le sifflement aigue du silence dans les oreilles d'Eijiro qui augmentait la pression dans son crâne, déjà en proie à un tumulte sans nom. Le cocktail épais de l'anxiété obstruait ses veines, déréglant sa circulation sanguine, et par la même occasion son rythme cardiaque.

À la recherche d'une certaine sérénité, il décrocha son regard de celui empli de douleur de son vis-à-vis, puis soupira lourdement, les yeux rivés vers le ciel. Plus que les mots du vert, c'est son air désemparé qui finissait de lui retourner l'estomac. Le poids de tous ces moments qu'il passait à ruminer sur ses choix de vies s'affichait sur ses épaules voûtées, tandis que son regard autrefois si lumineux exhalait le désespoir. Par son discours, l'on pouvait déceler son épuisement. Une envie si flagrante d'abandon y transparaissait que le plus jeune en restait sans voix, au bord de la suffocation.

S'il avait su que sa simple remarque mènerait à tout ce foutoir, il se serait sans doute contenté d'ignorer les signaux d'inconfort du vert, comme à son habitude. La culpabilité et le dégoût pour soi-même auraient continué de ronger les quelques miettes restantes de son âme, mais il était persuadé qu'aucun supplice ne pouvait égaler ce qu'il vivait actuellement. Le pire n'était pas tant dans les révélations proférées, mais plutôt dans ce qu'elles impliquaient. Ils surfaient tous les deux sur des vagues de culpabilité et de regrets qui menaçaient de les renverser à chaque instant. Et même si le rouge ressentait un véritable soulagement car, comme l'avait proclamé Hanta, ils étaient les mêmes. Ce dernier semblait s'étouffer sous des couches de peur indicible. Plus que n'importe quand, c'était maintenant que le devenir de leur vie à deux se jouait. Et à en croire l'allure que prenait cette conversation, Eijiro les voyaient très mal retourner à la vie insouciante de ces quelques jours.

— Tu as raison. Souffla-t-il le regard toujours rivé sur les poutres apparentes du plafond. Il ferma les yeux le temps de reprendre sa respiration, avant de les diriger vers les prunelles de jade. Dans un petit sourire, il continua. « À cette époque, je n'étais pas vraiment certain de ce que je voulais. Je crois que tout ce que je souhaitais, c'était d'être heureux. Quelle que soit la forme que ça aurait prise, je voulais oublier mes soucis, passer à autre chose, et c'est là que tu es arrivé. »

Se rappelant de leurs mains toujours soudées, le plus jeune renversa la prise afin de tenir les mains d'Izuku à son tour. Il caressa le dos des paluches plus petites de son pouce juste avant de continuer.

« Je mentirais en disant que je nous voyais finir en couple toi et moi. Mais... ce ne serait pas vrai aussi si je te disais que je ne l'avais pas espéré. Il n'y avait pas un jour qui passait sans que je ne me dise que j'aurais bien aimé que tu sois mon premier amour. Que tu sois là à chaque étape de ma vie, même les plus banales. »

De leurs membres liés, il sentit l'agitation légère d'Izuku suite à ses aveux, mais ne s'en formalisa pas. Continuant simplement dans sa lancée, le pouce retraçant toujours chaque veinure apparente sur les mains de son partenaire.

« Alors c'est vrai, ce n'était peut-être pas ce dont j'avais besoin. Tout se serait sans doute passé mieux si on était resté amis, ou si on s'était laissé plus de temps. Mais, maintenant avec du recul, je ne regrette pas mon choix. Et si c'était à refaire, je ne referais pas tout de la même façon, mais j'accepterais toujours de sortir avec toi. Parce que tu étais et tu resteras ce que j'ai toujours désiré dans la vie. »

Il n'y avait pas de mots pour exprimer ce qu'il pouvait ressentir en cet instant. Le stress et la peur tiraillaient ses entrailles, mais l'envie de bien faire l'emportait. Il avait toujours rêvé de dire ces mots à Izuku, alors maintenant que c'était sorti sans qu'il ne craque ou que sa voix ne déraille en chemin, le jeune homme énamouré qu'était Eijiro ne pouvait qu'en être fier.

En dirigeant son carmin vers l'émeraude, il ne s'attendit pas à y trouver des gouttelettes d'eau menaçant de passer la barrière de cils sombres. Alerté, il se dépêcha de délaisser sa place pour aller étreindre son homme. Il guida sa tête contre son épaule et le serra si fort contre lui, comme pour le prévenir de ses propres larmes. Sa main droite tapotait le dos du plus vieux gentiment, tandis que les doigts de celle de gauche s'emmêlaient dans la chevelure frisée.

Engager des actions de réconfort dans leur couple lui semblait toujours si étrange, car il avait toujours été celui qu'on réconfortait. La plupart du temps, le vert faisait le premier pas, puis il lui suffisait de fondre sous les caresses ou dans les étreintes. Peut-être était-ce parce qu'il était l'aîné, mais Izuku avait toujours été la tête forte. Il était le socle, le pilier qui ne s'ébranlait pas facilement. Alors le voir accroché ainsi, tremblant de toute part était assez déroutant, bien qu'il ait déjà eu l'occasion d'assister à une scène similaire.

Son esprit lui rappela une fois de plus les mots d'Hanta et, tout en balayant la situation dans son ensemble, Eijiro se dit qu'ils n'auraient pas pu être plus vrais. Non, Izuku n'était pas parfait. Ce n'était qu'un être humain, tout comme lui, qui s'efforçait de faire les meilleurs choix possibles pour lui et son entourage. Parfois il doutait aussi, était effrayé et pouvait se sentir désemparé.

C'était dans des moments comme ceux-ci, qu'en tant qu'un de ses proches, il se devait d'être là pour lui. Pour le rassurer et lui montrer qu'il n'avait pas à tout porter seul.

« Tu es bien plus qu'un petit ami Izuku. Bien plus. Que tu le croies ou non, même dans ta façon la plus égocentrique, maladroite ou prétentieuse, tu as fait des choses incroyables pour moi. Tu fais toujours des choses incroyables pour tout le monde. »

Je veux t'aimer ♡ KIRIDEKUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant