♡CHAPITRE 67♡

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— Ei...jiro...?! Prononça une voix grave dans un ton à mi-chemin entre l'incrédulité et l'ahurissement. L'interpellé se figea immédiatement. Ses yeux écarquillés fixant l'étal de légumes sans vraiment le voir, la prise resserrée autour de la main d'Izuku et de la manche qu'ils tenaient à deux. Il se retourna, après ce qui avait semblé être une éternité pour le vert, juste pour que la lueur de doute qui demeurait encore dans son regard ne s'en aille définitivement.

— ...hiro... ? Répliqua faiblement le rouge, sidéré à son tour.

Bien avant de les entendre, Izuku s'était déjà préparé à faire de nouveau face à ces syllabes. Rien qu'aux expressions qui défilaient sur le visage de son homme, aux reflets dans ses yeux, il avait su que le moment tant redouté était arrivé. Plus que le savoir, il l'avait ressenti, anxieux et craintif, comme un animal qui s'agiterait pour trouver un abri à l'approche d'une tempête. Sauf qu'aucun abri ne pourrait préserver ni lui, ni Eijiro et en aucun cas leur couple des ravages que cette tempête laisserait sur son passage.

Il détacha, avec difficulté, son regard du rouge, pour le poser sur le propriétaire du prénom qui avait longtemps hanté ses nuits. Un ennemi invisible, méconnu, dont il avait dû combattre l'influence pendant presque deux années. Cet ennemi aurait dorénavant une forme et un visage, au grand déplaisir du vert ; car l'inconnu était certes terrifiant, mais plus facile à ignorer que cet homme plus grand, à l'aspect moins impubère et au style plus responsable que lui. Sa chevelure sombre, lisse et parfaitement plaquée semblait narguer ses boucles verdâtres qui ne restaient jamais couchées bien longtemps sur son crâne.

— C'est vraiment toi ! Ça alors, tu as tellement changé... Je ne t'ai presque pas reconnu !

L'inconnu –qui ne l'était plus tellement– arborait un sourire crispé et parlait d'une voix faussement contrôlée, comme pour se convaincre lui-même de la frivolité de cette rencontre. Tandis qu'Eijiro de son côté, ne parvenait pas à camoufler une once de ses émotions. La stupéfaction était visible sur son visage aussi clairement que le soleil l'était dans le ciel à midi. Sa voix bataillait pour passer ses cordes vocales serrées et sa posture, avait l'air aussi rigide et incommode que celle d'un animal inerte rembourré de paille.

— T-toi aussi t-tu as beaucoup changé... Put finalement souffler le rouge après maints efforts pour trouver ses mots. Les secondes s'étiraient dans un silence malaisant et complotaient pour faire perdurer ce moment à l'infini. Izuku vit le regard de son compagnon pivoter du grand gaillard face à lui, à la femme menue à ses côtés. Ce mouvement n'échappant pas à leur vis-à-vis qui se dépêcha de réagir.

— Ah ! Oui, que veux-tu ? Les années passent, l'âge augmente et le style change... Répondit le brun avec son éternel ton faussement joyeux et détendu. Il se tourna légèrement vers la dame à ses côtés, posa sa main visiblement dans le creux de son dos et la présenta comme "Mme Itō", son épouse. « Chérie, voici Eijiro, un très bon ami du lycée. C'est le dernier fils de la famille Kirishima. »

— Oh... Je ne savais pas que la famille Kirishima avait un autre fils. Nota-t-elle, plus pour elle-même que pour le monde autour d'elle. « R-ravie de vous rencontrer ... » Se rattrapa-t-elle lorsqu'elle se rendit compte de son commentaire un tantinet déplacé. Un éclat de contentement radoucit les traits crispés de son époux, lorsque ses joues se teintèrent de rouge, alors qu'elle s'agitait pour les saluer poliment. Le sourire de ce dernier sembla moins contracté, inné et naturel, lorsqu'il guida sa main, plus haut, autour de ses épaules pour tenter de l'apaiser.

Izuku, accompagné d'Eijiro, abaissèrent à leur tour leurs têtes pour saluer la petite dame, qui, malgré son effort de discrétion, ne se privait pas de les considérer avec curiosité. Son regard pivotant de droite à gauche, avant de s'arrêter sur leurs mains jointes qui stabilisaient le panier de course. Le vert sentit son homme se crisper un peu plus sous le regard scrutateur de ces individus rattachés à sa ville d'origine, à son histoire. Izuku ne la connaissait pas entièrement, mais il devinait la position de son cadet. Car personne n'appréciait les rencontres hasardeuses. Surtout pas lorsqu'il s'agissait d'un homme qu'on avait tant aimé autrefois que son influence perdurait jusqu'à ce jour. Et encore moins lorsque ce dernier était accompagné de sa parfaite épouse. Il pouvait deviner le désarroi de son cher et tendre que l'on présentait en "très bon ami du lycée", même s'il était clair aux yeux de tout passant que cette désignation n'était qu'un euphémisme pour quelque chose de plus tordu, de plus vil.

Il pouvait presque visualiser le cœur d'Eijiro se briser un peu plus à la mention de sa famille. Au rappel effrayant qu'il n'était plus rien pour eux, qu'une mésaventure à étouffer. Son existence reniée par une ville entière, juste parce qu'il avait eu le malheur de naitre différent.

Izuku pouvait deviner tout cela, et même plus. Pour cette raison, il prit les devants dès l'instant où les regards se posèrent sur lui, la seule personne inconnue au bataillon, l'intrus. Il réaffirma sa position et fit taire les balbutiements d'Eijiro, car personne ne devrait faire face à tout cela sans soutien. Le jugement, les regards de travers et les expressions désapprobatrices, il n'en avait que faire. Tout ce qui lui avait toujours importé, c'était de conserver et de protéger jalousement ce en quoi il tenait le plus. Avec obstination, même si cela signifiait se tirer une balle dans le pied ou aller à l'encontre des êtres qui lui étaient chers.

— V-voici Izuku Midoriya, c'est..... I-il est...... O-on est ...... J–

— Je vis avec lui. Conclut Izuku, la main délaissant la manche du panier de course, pour se refermer sur le poignet d'Eijiro dans un geste qui se voulait ferme et rassurant.

Je veux t'aimer ♡ KIRIDEKUΌπου ζουν οι ιστορίες. Ανακάλυψε τώρα