100 façons de dire "Je t'aime"

On peut partager

La venue de Lucius Malefoy à Poudlard, ainsi que son insistance à se rendre dans la maison Serpentard pour y récupérer son fils avait précipité les événements.

Il était désormais évident que le moment où Harry devrait faire face à Voldemort approchait à grands pas, et les membres de l'ordre étaient particulièrement nerveux.

Les attaques de Mangemorts avaient cessé totalement, et le monde magique était comme figé, en attente.

Dumbledore était soucieux. Harry faisait de son mieux pour ignorer les regards appuyés qu'il recevait de ses camarades. Ses amis faisaient bloc autour de lui pour empêcher les autres élèves de l'approcher, Gryffondor et Serpentard mêlés.

Crabbe et Goyle se pavanaient en bombant le torse, un air supérieur plaqué sur leurs visages porcins.

La nuit, quand Harry ne se réveillait pas en hurlant d'un cauchemar, il s'imaginait se jeter sur les deux aspirants Mangemorts et les frapper pour faire disparaître leurs airs satisfaits...

Drago avait fini par être invité à rester parmi les Gryffondor. Harry avait refusé qu'il ne quitte son dortoir, et ni Ron ni Neville ne l'avaient contredit. Dean et Seamus avaient haussé les épaules, habitués au remue-ménage provoqué par la cohabitation avec le Sauveur en personne.

Certains Gryffondor d'autres années avait tenté de s'y opposer mais Harry avait hurlé qu'il allait devoir se battre pour les sauver et qu'il avait bien droit à quelques compensations.

Ainsi avait été réglé la question de l'accueil d'un serpent parmi les lions.

Si les Gryffondor ne revenaient pas sur l'altercation qui avait eu lieu, Drago ne se privait pas de rappeler à Harry qu'il était "sa compensation". Le vocabulaire utilisé par le brun faisait hurler de rire le blond, tandis qu'Harry rougissait de honte et de gêne mêlées.

Désormais, les deux garçons évitaient autant que possible la Grande Salle, craignant l'arrivée surprise de Lucius. Ils mangeaient dans la salle commune des Gryffondor et les elfes de Poudlard se faisaient une joie de leur apporter tout ce dont ils avaient besoin. Souvent, leur groupe d'amis se joignait à eux, et ils retrouvaient la complicité qu'ils avaient eu Square Grimmaud.

Harry et Drago se rendaient en cours aussi régulièrement que possible, mais ils n'étaient pas très attentifs, plus concentrés sur les bruits à l'extérieur de la salle que sur le cours même.

En Potions, alors qu'ils avaient fait exploser deux fois de suite leur potion, Rogue leur avait hurlé de sortir. Il les avait rejoint dans le couloir d'un pas rageur, ses capes volant autour de lui comme des ailes de corbeau, les yeux étincelants.

Harry avait échangé un regard nerveux avec Drago et avait attrapé la main du blond machinalement, prêt à le mettre en sécurité.

Severus Rogue nota le geste et l'attitude de Potter, prêt à défendre son filleul calma sa colère. Pour la première fois depuis qu'il le connaissait, Harry Potter n'était ni le fils de James, ni le fils de Lily. Il était un adolescent broyé par la guerre, aussi innocent que Drago l'était. Et ce gamin qu'il avait détesté dès le premier regard essayait de protéger son propre filleul contre sa colère...

Ce fut ce constat tout simple qui l'horrifia le plus. L'avenir du monde - son avenir - reposait sur les épaules de gosses innocents.

Il les dévisagea l'un après l'autre.

- Tous les deux. Rentrez à votre dortoir. Vous êtes dispensés de cours. Je viendrai en personne vous donner ce que vous avez à savoir.

Harry ouvrit la bouche stupéfait. Puis finit par réagir.

- Merci, professeur.

Rogue hocha la tête, et se tourna brusquement. Cependant, Harry entendit distinctement les mots de l'homme austère alors qu'il retournait en classe.

- Je parlerai à Dumbledore pour les autres cours.

De retour chez les Gryffondor, ils s'installèrent face à la cheminée en silence. Ils étaient tous les deux moroses, mais pas forcément pour les mêmes raisons.

Harry voyait la bataille finale se profiler, et s'inquiétait de ce qui allait se passer. Affronter Voldemort était sa destinée, et il l'avait plus ou moins accepté. Il avait peur d'échouer, plus encore qu'auparavant. Si face à Voldemort il tombait, ses amis seraient les premiers à en souffrir et la pression qui pesait sur ses épaules augmentait à chaque instant.

Drago voyait l'inquiétude de Harry. Il voyait les cernes de Hermione et l'air parfois perdu de Ron. Ces trois là avaient survécu à tant de choses que les voir aussi... stressés lui serrait le coeur. Il savait que Harry allait se retrouver face à des tueurs sans pitié, qui n'hésiteraient pas. Harry était juste trop gentil pour faire face...

Il savait que le Sauveur pouvait être implacable, il avait conscience de sa puissance. Mais Harry n'était pas un meurtrier. Il ne pourrait pas attaquer dans le dos ou sans prévenir.

Les heures passèrent, et ils restèrent silencieux, prenant des livres qu'ils ne lisaient pas vraiment.

Les autres passèrent, puis partirent manger dans la grande salle. Ils grignotèrent, leurs regards s'évitant, trop inquiets pour discuter comme à leur habitude.

Les autres revinrent, et trouvèrent les deux garçons assis côte à côte, leur livre dans les mains sans que les pages ne se tournent.

Hermione et Ron échangèrent un regard inquiet, puis tout le monde monta se coucher.

Harry était en plein cauchemar. Il faisait face à Voldemort, au milieu d'un désert aride et noirci par les sorts. Le Mage noir semblait amusé, alors que le Harry du rêve était épuisé, en sueur et blessé. Malgré tout, ses yeux verts brillaient de détermination et il s'accrochait à sa baguette avec l'énergie du désespoir.

Il levait le bras pour jeter un sort à Voldemort quand soudain, Lucius Malefoy apparut, traînant un Drago échevelé et sanguinolent. Il était évident que le jeune homme avait été battu et qu'il était mal en point. Leurs yeux s'accrochèrent, gris contre vert, argent contre émeraude, pour ne plus se quitter.

Harry se mit à hurler en voyant Voldemort lancer un sort en direction du blond.

Il se réveilla haletant, un cri encore sur les lèvres, gémissant de désespoir.

Avant qu'il ne reprenne ses esprits, il sentit quelqu'un se glisser à ses côtés dans le lit et l'enlacer.

- Potter. Tu as fait un cauchemar. Ce n'était pas réel.

Harry essaya de calmer son souffle et s'agrippa convulsivement aux mains de Drago.

- Calme-toi. Je reste près de toi.

Harry reprit ses esprits peu à peu et se sentit gêné d'avoir encore réveillé quelqu'un par ses hurlements.

- Le lit est trop petit.

- On peut partager.

- Mais...

- Potter... C'est la seconde fois que tu as un cauchemar cette nuit. Donc, ferme-la et dort.

Bien malgré lui, Harry sourit et se réinstalla, se blottissant dans la chaleur réconfortante de Drago.