Après les ruines (Dramione)

By Gliocas

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La lutte contre Lord Voldemort est enfin terminée. Brisée par la guerre mais décidée à reprendre sa vie en ma... More

Un petit mot
Partie I : Obliviate
Chapitre I - Rentrée 9 3/4
Chapitre II - A la maison
Chapitre III - Le cours d'Horace
Chapitre IV - Mauvais rêve
Chapitre V - L'anniversaire
Chapitre VI - L'entorse
Chapitre VII - En retenue
Chapitre VIII - Le Club des Survivants
Chapitre IX - L'Halloween de Slughorn
Chapitre X - La Bibliothèque
Chapitre XI - Hypnotique
Chapitre XII - Le Journal d'Hermione
Chapitre XIII - 14 Février
Chapitre XIV - Sur le banc
Chapitre XV - Theodore Nott
Chapitre XVI - L'aide de Malefoy
Chapitre XVII - Soirée arrosée
Chapitre XVIII - Le retour de Harry
Chapitre XIX - Dernière minute
Chapitre XX - Les ASPIC
Chapitre XXI - Le premier
Chapitre XXII - Toc, toc.
Chapitre XXIII - Dispute
Chapitre XXIV - Sans regret
Chapitre XXV - Un nouveau départ
Partie 2 : Finite
Chapitre I - Le Bulgare
Chapitre II - A Ste Mangouste
Chapitre III - Vipère et fleurs
Chapitre IV - Miss Parfaite
Chapitre V - Les retrouvailles
Chapitre VI - Interrogatoire
Chapitre VII - La nouvelle de Ginny
Chapitre VIII - Pimlico
Chapitre IX - Pansement
Chapitre X - Oui
Chapitre XI - Crise
Chapitre XII - Faux pas
Chapitre XIII - Arrogance et décibels
Chapitre XIV - Confrontation (partie 1)
Chapitre XIV - Confrontation (partie 2)
Chapitre XV - Potins & Potion (partie 1)
Chapitre XV - Potins & Potion (partie 2)
Chapitre XVII - Remords
Chapitre XVIII - Le Gala de Bienfaisance
Chapitre XIX - Point de rupture
Chapitre XX - Maman
Cette super nouvelle que je vous cachais...
Chapitre XXI - Disque rayé (partie 1)
Chapitre XXI - Disque rayé (partie 2)
Chapitre XXII - L'attaque (partie 1)
Chapitre XXII - L'attaque (partie 2)
Chapitre XXIII - Pour tout
Partie 3 : Nox
Il Est Enfin Là !
Prologue
Chapitre I - Prudence
Chapitre II - Le médicomage
Chapitre III - Premiers soins
Chapitre IV - Obstinée
Chapitre V - Sens dessus dessous
Chapitre VI - Sous contrôle
Chapitre VII - Incessant
Chapitre VIII - Rien de plus
Chapitre IX - Cauchemardesque
Chapitre X - Pharma boy
Chapitre XI- L'autre prisonnier (partie 1)
Chapitre XI - L'autre prisonnier (partie 2)
Chapitre XII - Orage
Chapitre XIII - Rancune et rancœur
Chapitre XIV - Insomnia

Chapitre XVI - Inquiet(s)

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By Gliocas

Bonjour à toutes et à tous,

CW : Comme vous pouvez le deviner par rapport aux chapitres précédents, celui-ci comporte une scène d'avortement (du moins, le début).

J'ai fait certains choix narratifs concernant la manière dont est représenté l'avortement dans le monde magique et j'ai décidé de les expliquer plus longuement en fin de chapitre si cela vous intéresse. :) 

Bonne lecture.

.

            Dès la fin de sa journée, Hermione s'empressa de rentrer chez elle. Cette fois-ci, elle préféra transplaner au lieu de marcher dans Londres parmi la cohue. Elle était si stressée qu'elle était au bord de la nausée en permanence et pour le coup, la grossesse n'avait rien à voir. Hermione referma la porte de l'appartement derrière elle et contempla le loft vide avant de pousser un soupir. Quelle galère.

Elle et Viktor avaient toujours été prudents pourtant. Mais visiblement, même quand on était dans le monde magique, cela ne faisait pas des miracles. La sorcière retira son manteau et ses chaussures avant de s'allonger sur le sofa, jouant avec la petite fiole que Malefoy lui avait donné. Malefoy... elle ne pouvait qu'être reconnaissante qu'il ait accepté de lui donner cette potion sous le manteau et en même temps, la jeune femme mettrait un certain temps avant d'ôter de son esprit l'attitude qu'il avait pu avoir à son égard... Comment pouvait-il faire preuve d'une telle condescendance ?! Pensait-il vraiment que sa demande désespérée était l'œuvre d'un caprice ?! Et puis cette manière ô combien infantilisante de lui rappeler les effets secondaires de cette fichue potion... bien évidemment qu'elle était au courant ! Elle n'était pas stupide à ce point !

Hermione décapsula la minuscule bouteille et la huma. L'odeur n'était pas immonde comme elle s'y attendait. Elle était même plutôt... neutre. Elle remua légèrement le contenu d'un mouvement de poignet. La potion était d'un noir d'encre et visqueuse. Elle soupira, ferma les yeux et l'avala d'un trait. Elle n'avait aucun goût. La sorcière resta étendue sur le canapé, bras en croix, attendant que les premiers signes apparaissent, une boule d'appréhension grossissant au creux de son estomac.

Elle entendit un miaulement et tourna la tête. Pattenrond venait de se glisser dans le salon et la regardait avec méfiance. Il s'approcha lentement du canapé et y grimpa avant de se frotter à Hermione qui le caressa d'un geste automatique.

« Ca va bien se passer, tu verras. Ca va bien se passer... »

Ses paupières devinrent lourdes et elle tomba dans un sommeil profond.


* * *


Une douleur aiguë si violente la réveilla en sursaut. Hermione se releva brusquement, les sens en alerte. Elle mit un certain temps à réaliser où elle était et il lui fallut plisser les yeux pour reconnaître son appartement plongé dans la pénombre. D'une main tremblante, elle passa une main sur son front. Il était brûlant. Hermione tâcha de se lever du canapé mais ses membres étaient si engourdis qu'elle abandonna.

« Oh bon sang... marmonna-t-elle d'une voix pâteuse. »

Une nouvelle douleur, cette fois-ci encore plus désagréable que la précédente vinrent lui broyer les tripes et elle se recroquevilla sur elle-même. La jeune femme serra les dents. Elle savait que ce n'était pas une partie de plaisir mais pas à ce point. Une larme  incontrôlable coula le long de sa joue et elle l'essuya d'un mouvement de sec. Ce n'était clairement pas le moment de pleurer. Il fallait qu'elle réfléchisse et qu'elle trouve un moyen de traverser tout l'appartement jusqu'à la salle de bain. Elle n'était pas idiote, elle savait très bien ce qu'il était en train de se passer et ce que son corps désirait expulser.

Elle pouvait sentir une fine pellicule de sueur envelopper chaque parcelle de sa peau et coller ses vêtements. Hermione réprima un haut le cœur et retira son t-shirt : elle commençait à mourir de chaud. Et en même temps... c'était comme si un voile glacé l'enveloppait. Elle frissonna. Etait-elle en train de tomber malade ?

La sorcière serra à nouveau les dents et se força à se lever. Elle resta quelques minutes debout, cherchant son équilibre sur ses jambes flageolantes. Puis elle se mit à marcher avec lenteur, pliée en deux, ses bras croisés sur son ventre. Elle traversa le salon, titubante, et s'arrêta devant le gigantesque miroir qui ornait l'un des murs. Malgré l'obscurité, elle parvint à distinguer son visage. Elle était si pâle, deux grosses cernes soulignaient son regard éteint et jamais ses joues n'avaient paru aussi creusées.

« Mais quelle tête épouvantable... murmura-t-elle avec une grimace. »

Ding. Ding.

Hermione sursauta à nouveau et tourna lentement la tête vers la porte d'entrée. Il devait être presque 21h ! Elle serra les dents. Peut-être que si elle ne disait rien, la personne n'insisterait pas ? Elle n'était très clairement pas en état de recevoir qui que ce soit.

Ding. Ding. A nouveau.

Qui sonnait chez elle à cette heure-ci ?

Oh, pitié que ce ne soit pas...

« Hermione ? »

Le sang de la sorcière se figea. Ron. C'était la voix de Ron qu'elle entendait à travers la porte !

« Hermione, t'es là ? »

La jeune femme se frappa la main contre le front. Quelle idiote ! Avec tout ce qu'il s'était passé dernièrement, elle avait complètement oublié qu'ils avaient rendez-vous ce soir pour son cours de danse, celui où ils s'entraînaient à valser pour son mariage avec Verity ! Hermione se tordit les mains, regarda la porte d'entrée avec désespoir. Elle ne pouvait clairement pas lui ouvrir, c'était impossible.

Merlin, comment avait-elle pu omettre leur rendez-vous ? ! Elle n'oubliait jamais rien d'habitude.

Un bruit sourd attira son attention et elle tourna la tête vers le canapé. Son chat venait de bondir du canapé et de filer vers la porte d'entrée en trottinant avant de se mettre à miauler.

« Pattenrond, non ! souffla Hermione d'une petite voix aiguë. »

Mais l'animal se contenta de feuler, lui jetant un regard empli de défi. Au même moment, une douleur lui transperça à nouveau l'estomac et elle lâcha un cri de douleur.

« Hermione ? demanda la voix paniquée de Ron à travers la porte. C'est toi ?! Tout va bien ? »

Elle plaqua une main sur sa bouche.

« Hermione ? répéta Ron. Hermione tu peux me répondre ?! »

La jeune femme serra les poings.

« Ou...Oui, Ron. Tout... tout va bien, rentre chez toi. Je... je suis juste un peu fatiguée. »

A nouveau, la douleur irradia dans tout son buste et cette fois-ci, Hermione capitula. Elle tomba à genoux sur le sol dans un bruit fracassant.

CRAC !

« Lumos ! »

Ron venait d'apparaître dans le salon, baguette en l'air. Son faisceau lumineux balaya la pièce avant de se poser sur le corps d'Hermione à même le sol. Il agita sa baguette magique et tout l'appartement s'éclaira. Le jeune homme s'empressa de s'agenouiller à sa hauteur.

« J'étais sûr qu'il se passait quelque chose d'étrange ! s'exclama-t-il en lui attrapant le poignet. Tu n'as jamais oublié un seul de nos rendez-vous !

- Dé... désolée, murmura Hermione.

- Ne sois pas bête, ce n'est pas grave, marmonna Ron d'un air soucieux. »

Il se mit à vérifier son pouls et Hermione resta silencieuse, cherchant à paraître en meilleure forme qu'elle ne l'était. Ses lèvres étaient sèches, elle mourait de soif mais là n'était pas le plus important. Il fallait que Ron s'en aille, qu'il la laisse tranquille, il n'était pas censé la trouver ainsi.

« On a dû t'empoisonner, dit-il après quelques secondes de réflexion. Je vais t'enfiler un t-shirt, on va transplaner à Ste-Mangouste et...

- Non ! »

Le cri d'Hermione avait résonné dans tout le salon. Ron la fixa avec de grands yeux, surpris.

« Qu'est-ce que tu racontes ? grommela-t-il. Hermione, je ne sais pas ce que tu as mais tu n'es clairement pas dans ton état normal ! Quelqu'un te veut du mal !

- Je... personne ne m'a empoisonné. C'est... c'est l'effet d'une potion que j'ai prise. »

La douleur s'empara de son estomac pour la énième fois et elle lâcha un rugissement de douleur avant d'entourer son ventre de ses bras.

« Mais de quoi tu parles ? lâcha Ron à voix basse. Qu'est-ce que tu as pu prendre qui te... »

Il s'interrompit et regarda successivement le visage crispé de son amie puis son bas-ventre. Son regard s'éclaira avant de se rembrunir aussitôt. Il venait de comprendre.

« Oh... dit-il. Oh. D'accord. »

Hermione lui attrapa le bras.

« Personne n'est au courant, chuchota-t-elle entre ses dents. Tu entends, Ron ? Si tu dis quoi que ce soit à Ginny ou Harry ou même à Vikt...

- Je ne dirai rien ! s'exclama le jeune homme. Et encore moins à Viktor ! Promis. »

Ron se pencha vers elle. D'un geste lent et doux qu'elle ne lui avait jamais connu, il effaça les gouttes de sueur qui perlaient sur son front.

« Qu'est-ce que je peux faire ? finit-il par demander.

- M'emmener jusqu'aux toilettes, ça pourrait être pas mal, dit la jeune femme en essayant de prendre une voix dégagée.

- Oh ! Oui... oui bien sûr. »

Ron passa un bras par-dessus ses épaules et un autre autour de sa taille puis il la releva et se mit à marcher à pas lents jusqu'à la salle de bain.

« Sur une échelle de 1 à 10, tu as mal comment ?

- 'Sais pas. 8 je dirais. Peut-être 9, grogna la sorcière.

- Bon sang, je ne savais pas que c'était aussi douloureux un...

- ... Avortement. Tu peux dire le mot tu sais, ça n'a rien de tabou. »

Elle glissa un regard vers le jeune homme. Ses oreilles étaient devenues écarlates.

« Oui, oui... je sais que... ce sont des choses qui arrivent. Plus souvent qu'on ne le pense d'ailleurs. La preuve ! »

Hermione ne put s'empêcher de lâcher un petit rire.

« Tu savais que certaines sorcières du Magenmagot voulaient qu'on octroie la possibilité aux femmes demandant un avortement d'ingérer également une potion anti-douleur mais ça a été interdit. D'où le fait que les effets secondaires soient aussi douloureux.

- Hein ?! s'exclama Ron, interdit. Mais pourquoi ?

- Pour éviter qu'on voit cela comme un avortement de confort, un truc qu'on pourrait faire tous les 4 matins.

- Parce qu'il y a des sorcières qui aimeraient avorter tous les 4 matins ?

- Tu te doutes bien que non.

- On vit vraiment dans un monde magique d'arriérés, si tu veux mon avis... Ca se passe mieux côté Moldu ? »

Hermione secoua la tête.

« Oui et non. Disons que chaque... méthode a ses bons et mauvais côtés, je suppose. Si on nous laissait avoir le choix sur ce qu'on veut de A à Z au lieu d'entourer ça de lois malhonnêtes et de protocoles complexes, tout irait mieux dans le meilleur des mondes. Moldu ou Sorcier. La salle de bain est juste sur la droite, indiqua-t-elle.

- Ah oui, c'est vrai. »

Ron ouvrit la porte d'un mouvement d'épaule. Hermione s'engouffra dans la salle de bain, soulevant la cuvette des toilettes avec son pied. Elle glissa un regard vers son ami.

« Tu peux rester, s'il te plaît ? Je n'ai aucune idée de combien de temps cela va prendre.

- Bien sûr, répondit-il sans la moindre hésitation. »

Ron lui tourna le dos et Hermione en profita pour dégrafer son pantalon. Elle s'assit sur la cuvette et soupira, épuisée.

« Tu peux te retourner, marmonna-t-elle. Assis-toi où tu veux... Ca ne sert à rien que tu restes planter là à fixer le mur. Au point où on en est... »

Toutes les limites d'une quelconque pudeur venaient d'être franchies. Ron obéit et se glissa contre la baignoire où il s'installa.

« C'est dangereux ce que tu as fait, finit par dire Ron en contemplant le carrelage. Toute seule... sans personne pour t'aider... si je n'avais pas été là...

- Oui et bien disons que les sorcières comme moi n'ont pas le luxe de pouvoir se présenter à Ste-Mangouste pour ce genre de choses. Tu sais parfaitement que personne n'aurait respecté ma vie privée. »

Ron acquiesça, toujours silencieux. A la manière dont il mâchouillait sa lèvre inférieure, Hermione devina que son ami se retenait de poser une myriade de questions.

« Pourquoi tu n'es pas allée avorter côté Moldu ? finit-il par demander, non sans une certaine précaution dans sa voix.

- Parce que... parce que je ne sais pas si tu peux comprendre.

- Essaie toujours. »

Hermione inspira profondément, puis posa son front moite sur ses genoux.

« J'en aurai eu pour 500£ minimum. Tu ne te rends pas compte mais c'est une grosse somme, ça représente presque 2 500 Gallions. »

Ron manqua de s'étouffer.

« Si j'avais voulu être prise en charge, il aurait fallu que je remplisse tout un tas de formulaires mais ça veut dire prendre le risque qu'on réalise que depuis plusieurs années, je n'existe quasiment plus. Il est impossible de remonter ma trace, je n'étais plus sur aucun registre scolaire, je ne suis pas allée à l'Université, je n'ai pas d'emploi Moldu, aucun médecin traitant... Ma vie Moldu s'est mise sur pause dès mes 11 ans et est devenue inexistante à partir de mes 17 ans. Alors je sais ce que tu vas dire, s'empressa-t-elle d'ajouter en voyant Ron ouvrir la bouche, je peux lancer des sortilèges de confusion, ensorceler des papiers et faire croire ce que je veux... mais je n'ai pas envie. »

Elle marqua une pause avant de reprendre, la voix tremblante :

« Pour toi, le Monde Moldu c'est un monde à part. Pour moi, les Moldus c'est une partie de moi que je déteste berner et quand je m'y confronte, ça me rappelle sans arrêt que je suis ballottée entre ces deux sociétés. Celle non-magique où je suis née et puis l'autre, où j'ai découvert ma vraie nature. Quand on arrive chez les sorciers, Ron, on te dit d'office que ça y est, tu fais partie de ce monde. On ne t'y accueille pas vraiment, pour beaucoup tu n'es même pas la bienvenue, tu dois tout apprendre par toi-même et te débrouiller... et on te coupe du reste. 

Pendant des années j'en ai été plus qu'heureuse parce que malgré la Guerre, toutes les horreurs survenues... c'est ma place ici. Mais quand tu débarques dans le Monde Magique, le passé disparaît. Il y a Poudlard où tu es la majeure partie du temps, les secrets qui s'empilent auprès de tes proches, des subtilités que toi seule comprends des deux côtés... et on te demande de composer. Personne ne te guide, personne ne te dit comment faire en sorte que tu existes encore de l'autre côté, parmi ceux que tu as toujours connu. C'est fini. Et petit à petit Ron, je réalise qu'il m'est difficile d'y retourner, là-bas. Là où vivent mes parents, où j'ai grandi. Je perds certaines références, il y a des subtilités que j'ai du mal à cerner. Je suis Née Moldue, mais c'est si dérisoire par rapport au fait d'être une sorcière. »

Elle se tut. Elle avait tant parlé et sa bouche était toujours aussi sèche.

Sans un mot, regardant toujours le sol, Ron leva son bras vers elle. Hermione fut d'abord décontenancée mais elle comprit ce qu'il faisait. Il lui tendait sa main. Alors elle posa sa paume contre la sienne, ses doigts s'entrelacèrent et ils restèrent ainsi une longue minute. Ron assis sur les carreaux froids de la salle de bain, Hermione sur la cuvette, leurs deux bras suspendus en l'air, les mains étroitement liées.

Les yeux de Ron se posèrent enfin sur Hermione qui le regarda en retour. Et soudain, sans réfléchir, ils se mirent à éclater de rire. Un fou rire nerveux et interminable qu'ils furent incapables d'arrêter. Un fou rire qui résonna contre les murs de la salle de bain. Ils rirent à gorge déployé, s'étouffant à moitié. Leurs mains s'éloignèrent, Ron se mit à hoqueter en se tenant les côtes, Hermione essuya une larme qui venait de couler le long de sa joue.

« Bon sang, mais qu'est-ce qu'on a l'air pathétique. Je te jure que si tu racontes ça à qui que ce soit...

- Je t'ai promis que je ne dirai rien ! dit Ron en levant les bras en guise d'innocence.

- Tant mieux. »

Ron eut un dernier petit rire avant de reprendre son sérieux.

« Comment t'as réussi à obtenir la potion, d'ailleurs ? Je veux dire, sans attirer l'attention. »

Hermione hésita quelques secondes.

« Ca n'a pas d'importance. »

Ron se contenta d'un hochement de tête. Hermione poussa un long soupir.

« Ron, est-ce que je suis un monstre ?

- Qu... quoi ?! Bon sang, Hermione ! Bien sûr que non. Tu as bien le droit de faire ce que tu...

- Je ne parle pas de ça, coupa la jeune femme. Je parle de... Viktor. J'allais très clairement l'épouser pour les mauvaises raisons. Je me mentais à moi-même mais lui... comment pourrait-t-il ne pas me haïr ? Comment aura-t-il à nouveau confiance en quelqu'un ? »

Ron ne répondit pas.

« Quand j'ai brisé ton cœur, combien de temps as-tu mis avant de ne plus me détester ? »

Ron ferma les yeux.

« Pas longtemps, dit-il à voix basse. »

Il les rouvrit, ses yeux bleus n'avaient jamais eu l'air aussi décidé.

« Il se détestera parce qu'il n'aura rien vu non plus. Mais il finira par l'oublier. On ne peut pas te détester bien longtemps, Hermione. C'est impossible.

- Dis pas n'importe quoi...

- C'est vrai. Je t'en ai voulu un certain temps mais je ne t'ai pas détesté. Et quand ça a été le cas, je me haïssais de ressentir une telle chose. Parce que je savais que tu ne m'avais jamais voulu de mal. Au bout du temps, j'ai compris que tu avais deviné bien plus de choses que moi. Tu as toujours été la plus intelligente. »

Hermione tenta de sourire, mais ce qu'il venait de dire l'avait bien trop émue pour qu'elle n'y parvienne sans que ses lèvres ne tremblent.

« Ron, pourquoi ne suis-je pas capable d'être... d'être comme toi ?

- Tu veux dire, d'être celui qu'on largue du jour au lendemain parce que y a erreur sur la marchandise ? demanda-t-il avec un petit rire faux. »

Hermione secoua la tête.

« Je te vois avec Verity. C'est une évidence qu'elle est faite pour toi. Et lorsque je regarde Ginny et Harry... il n'y a pas de doutes. Un jour ils se marieront, eux aussi auront des enfants. Et puis...  y a moi. »

Ron haussa les épaules, visiblement gêné.

« Peut-être que tu n'as pas trouvé le bon, tout simplement. Mais ça viendra, un jour. Un jour toi aussi tu voudras te marier et avoir des enfants. Tu croiseras celui avec qui tu voudras vivre cela et... voilà. Tout simplement. »

Hermione acquiesça. Tout simplement.

À l'entendre, c'était si simple. Mais Hermione n'y arrivait pas. Rien que de se projeter dans une robe blanche marchant jusqu'à l'autel lui provoquait des bouffées d'angoisse. Viktor ou non.

« Ca va ton ventre ? s'enquit son ami. »

La sorcière regarda entre ses jambes au fond de la cuvette. Des traînées de sang glissaient le long des parois, venant s'écraser dans l'eau. Hormis ça, son ventre ne la faisait plus souffrir, elle n'était plus trempée de sueur et la fièvre avait disparu. Elle était incapable de dire quand tous ces symptômes s'étaient envolés mais elle ne ressentait plus rien de désagréable. Au contraire, un certain soulagement s'était emparé de sa poitrine.

Ron attrapa une serviette de bain entre ses mains et la lui lança. Elle s'y enveloppa : elle n'était qu'en soutien-gorge et elle commençait à avoir la chair de poule.

« Ca va mieux, dit-elle d'un ton tranquille. Merci d'être resté, d'ailleurs.

- Y a pas de quoi, répondit son ami d'un ton dégagé. Tu sais, je ne vis pas assez de trucs originaux en étant Auror au quotidien... j'ai besoin d'un peu plus de rebondissements. »

Il lui jeta un regard malicieux.

« Tu penses que ça ira mieux ? questionna-t-il. Je ne sais pas trop comment ça se passe ce genre de trucs.

- Je crois que ça ira, c'est qu'un avortement après tout, répondit Hermione avec un haussement d'épaules. 

- Oui, répondit Ron avec le plus grand sérieux. C'est qu'un avortement. »

Ils se regardèrent à nouveau et se mirent à pouffer de rire en silence.


* * *


Il transplana et atterrit dans la rue sombre, à peine éclairée par les lampadaires.

Cela ne devait pas être très loin. Du moins, s'il se fiait à l'adresse qu'il avait trouvé dans son dossier médical.

Drago Malefoy regarda à droite puis à gauche, avant de jeter un œil vers les fenêtres de l'immeuble adjacent. Fort heureusement, personne n'avait remarqué son apparition. Les Moldus ne remarquaient jamais rien de toute manière. Il remonta le col de son manteau et se mit à arpenter l'allée à grandes enjambées, regardant chacun des numéros.

Il n'avait clairement pas le temps pour ça, merde. Il avait passé une journée épuisante, terminé 2 heures plus tard que prévu et Astoria l'attendait. Et comme d'habitude, elle serait en train de tirer la gueule parce que « Monsieur était encore en retard ». Il devait bien admettre que rentrer à l'appartement pour croiser son regard boudeur lui donnait surtout envie de prendre ses jambes à son cou et de retrouver Blaise et Pansy dans un bar. Mais bon, puisqu'il devait absolument faire des... comment on disait déjà ? Ah oui, des efforts.

De toute manière, qu'il ait 2 heures ou plus de retard, c'était fichu. Ils finiraient par s'engueuler. Alors, au point où ils en étaient... Il pouvait bien s'attarder quelques minutes juste pour faire un rapide détour, n'est-ce pas ? Il allait juste sonner à sa porte, s'assurer que tout allait et il partirait aussi vite qu'il était arrivé. En 2 minutes, c'était bouclé. « Salut Granger, tout se passe bien ? Tu te vides pas par tous les trous ? Parfait. Bonne soirée. » Voilà ce qu'il dirait, pas un mot de plus. Ensuite il rentrerait chez lui, il se prendrait le chou avec Astoria et il finirait par dormir sur le canapé.

Comme d'habitude.

« Fichue Granger, marmonna-t-il en serrant les poings au fond ses poches. Si on te retrouve dans une mare de sang, c'est moi qui serais dans la merde ! Mais ça, t'en n'as même pas conscience. »

Quand il l'avait vu quitter Ste-Mangouste à la hâte, il avait bien compris qu'elle ne resterait pas à l'hôpital pour prendre cette potion de merde. Malefoy était resté planté comme un con, mâchoire serrée. Il n'était personne pour lui dire quoi que ce soit. En réalité, il avait même fait tout l'inverse : il avait peut-être un peu trop ouvert sa gueule. Vu comme elle était susceptible, il aurait dû le deviner.

En réalité, ce n'était même pas son problème. Il avait déjà été bien sympa d'aller lui chercher cette potion pendant qu'elle le fixait avec ses yeux de merlan frit. Qu'est-ce qu'il aurait pu faire d'autre ? Ce n'était même pas sa patiente ! Il avait respecté le protocole, il lui avait dit de rester à l'hôpital et de la prendre le soir. Mais non, forcément, Madame s'était barrée aussi vite qu'elle était venue.

« Un jour, elle sera si bornée qu'elle se fracassera contre un mur et y aura personne pour rattraper les morceaux. »

Pourquoi ne pouvait-elle pas écouter les autres deux secondes au lieu de n'en faire qu'à sa tête, hein ?! C'était lui le Médicomage, non ?!

« Un Médicomage qui lui a dit d'arrêter de l'emmerder après avoir refusé de l'aider. »

Il secoua la tête. Déjà, il n'avait pas refusé de l'aider. Il s'était même glissé dans la Réserve n°3 pour aller lui voler cette potion ! Bon, OK. Il avait été un peu... abrupt. Mais qui ne l'aurait pas été quand on venait vous emmerder avec une histoire de grossesse non désirée ?! Granger pouvait être vraiment pénible quand elle insistait à ce point.

« Au final, elle a eu ce qu'elle voulait donc elle devrait être contente, non ? »

Malefoy accéléra le pas. Qu'est-ce qu'il fichait là, bon sang ? C'était Granger, il n'en avait rien à foutre de Granger. Oui, c'est ça, il en avait rien à carrer. Il allait juste frapper vite fait pour s'assurer qu'elle respirait encore et voilà, c'est tout. Il allait juste faire son métier de Médicomage jusqu'au bout et ensuite, il rentrerait enfin chez lui. Parce que peu importe ce qu'elle pouvait penser de lui –et Merlin qu'il s'en fichait de ce qu'elle pensait de lui-, Malefoy était professionnel. Et comme tout Guérisseur professionnel, il était logique qu'il allait voire sa patiente, heu... non-patiente, chez elle. Pour s'assurer que tout était OK. Pour ensuite rentrer chez lui.

Ce qu'il allait faire. Point barre.

Il regarda les chiffres devant les immeubles. 27...29... le 33 n'était plus très loin. C'était sûrement l'immeuble dont la porte d'entrée venait de s'ouvrir sur un homme qui n'était nulle autre que... Drago se stoppa net et fit deux pas sur le côté pour se dissimuler dans la pénombre.

Ronald Weasley venait de sortir de l'immeuble et de s'arrêter sur les marches. Il agita sa baguette magique et transplana dans un craquement sonore.

Malefoy resta une longue minute immobile, hésitant.

Puis, il l'imita, disparaissant à son tour.

.

« Si vous demandez aux citoyens d'être responsables de leurs enfants, accordez-leur le droit de décider s'ils auront des enfants ou non.»

L'œuvre de Dieu, la part du Diable – John Irving

.

Hahaha, vous aviez vraiment cru que ce serait Drago qui viendrait à sa rescousse ?! ;) 

Comme quoi, j'arrive encore à vous surprendre malgré les mois qui passent ! :D

.

Pour comprendre certains de mes choix narratifs autour de l'avortement dans cette fanfiction, je vous invite à lire les éléments ci-dessous. C'est peut-être un peu long mais je préfère être transparente sur ce que j'écris. Libre à vous de continuer cette histoire ou de l'arrêter suite à ces explications :

- J'ai décidé de faire du Monde Magique un monde aussi sexiste que le Monde Moldu, d'où le fait que la potion d'avortement ait connu des changements de statuts au fil des siècles, en fonction des avancées politiques. Certaines d'entre vous ont trouvé le parallèle intéressant mais avaient l'air de considérer le monde sorcier plus "en retard" que le monde moldu sur cette question. Ce n'est pas totalement exact. Il y a des tas d'éléments qui montrent dans la saga HP que c'est un monde sexiste (peu de femmes Ministres de la Magie, peu de femmes Directrices de Poudlard, etc.) : il ne semble pas idiot d'imaginer que l'avortement est un enjeu féministe pour les sorcières. 

- Par contre, il n'est pas plus compliqué d'obtenir la potion d'avortement  qu'un avortement moldu : il faut se rapprocher du personnel soignant et ensuite se rapprocher d'une structure adaptée (ici l'hôpital) pour y procéder. C'est également le cas dans tous les pays où l'avortement est légal. Si sa légalisation a justement permis aux femmes d'interrompre leur grossesse en toute sécurité, il faut aussi se plier aux critères de chaque pays qui sont plus ou moins sévères. Dans certains pays, on ne peut avorter qu'en cas de viol ou d'inceste. Dans d'autres, on ne peut avorter que jusqu'à 3 mois (comme en France) alors qu'au Royaume-Uni par exemple, c'est possible jusqu'à 6 mois (voire plus). Les Pays-Bas et la Suède proposent quasiment le même délai que le Royaume-Uni. Dans d'autres états, les délais ont tendance à se réduire de plus en plus, jusqu'à même disparaître (la Pologne est sur cette voie). Pour certains, ce droit vient à peine d'être acquis (on pense à l'Irlande en 2018 et enfin à l'Argentine tout récemment). Et une fois qu'il est légalisé, le combat ne s'arrête pas : en France, le délai de réflexion concernant l'avortement n'a été supprimé qu'en 2016. Bref, c'est un droit qui n'est pas ancré et qui témoigne de la fragilité des libertés des femmes. 

- C'est parce que l'avortement est un enjeu qui reste crucial que j'ai décidé d'en faire une question compliquée. L'avortement d'Hermione ne se passe pas super bien, non pas parce que c'est un avortement mais parce qu'on ne lui a pas offert de bonnes conditions pour. Malefoy n'a pas été un bon médecin pour le coup (et il l'a compris) : elle se retrouve toute seule à subir des effets indésirables. Cependant, je n'ai pas non plus voulu faire de cet avortement un film d'horreur : je ne vois pas l'intérêt de faire d'un épisode si courant dans la vie d'une femme une espèce de boucherie qui pourrait dissuader des lectrices si un jour elles font ce choix. Je tiens tout de même à rappeler que si les effets secondaires de cette potion ne sont pas agréables, ils ne durent que très peu de temps et c'est surtout la solitude d'Hermione durant cet épisode qui les rendent si interminables. Une fois que Ron est là, elle va mieux et ce n'est plus sur cet élément qu'elle se focalise. 

- Si je tenais à raconter cet avortement et à ne pas faire "d'ellipse", c'est parce que c'est un sujet encore tabou dans les œuvres culturelles actuelles. L'avortement est très peu abordé dans les films et les séries, on choisit toujours l'option de la "fausse couche" qui survient subitement (je l'ai moi-même fait dans les Années de la Terreur avec Alice qui était enceinte de Frank et qui perd son enfant suite à une chute dans les escaliers #classique). 

- Enfin, suite à certains commentaires, je tiens à souligner qu'il est évident qu'Hermione allait avorter et n'allait pas garder l'enfant. C'est le choix le plus vraisemblable par rapport à la manière dont j'aborde son personnage. En France, l'avortement concerne 1 femme sur 3 (qui, dans la grande majorité des cas, utilisait une contraception durant l'acte) : je ne connais pas les chiffres au RU mais je suppose qu'on est sur un nombre similaire. Imaginer Hermione faire partie de ces femmes m'a semblé une bonne idée pour aborder ce sujet. Vous êtes peut-être déçue qu'Hermione avorte... mais j'ai du mal à comprendre pourquoi. Si je considère que chaque femme fait comme elle souhaite, je pense que la concernant, c'est le choix le plus logique. Hermione a déjà déclaré à plusieurs reprises qu'elle ne désirait pas d'enfants, elle vient de se séparer de Viktor et n'a pas prévu de se remettre avec lui, elle souhaite avant tout s'épanouir professionnellement ce qui est loin d'être le cas pour le moment (son jeune âge y étant pour beaucoup). Le choix le plus pragmatique qu'il lui reste est d'avorter. Je ne pense pas que cette décision soit triste : Hermione n'en souffre pas, elle n'est pas traumatisée, elle sait ce qu'elle veut. Elle n'a pas honte non plus car elle n'a pas à éprouver ce sentiment. Toutes les femmes qui subissent un avortement ne sacralisent pas forcément cet épisode de leur vie. Il y a des raisons légitimes de le faire (qui sont souvent liés à un sentiment de honte qu'on nous inculque ainsi qu'à une mauvaise prise en charge par un corps médical moraliseur) mais de plus en plus de femmes qui témoignent de leur avortement revendiquent le fait qu'elles l'ont bien vécu, qu'elles ne regrettent pas et se sont mêmes senties heureuses et soulagées d'avoir accès à ce droit. Pour beaucoup, c'est quelque chose auquel elles ne pensent plus et qui n'est pas un élément fondamental de leur vie, ce qui est tout à fait leur droit. Considérez qu'Hermione fait partie de cette team ;). 

Je suis désolée, c'est super long mais au moins, vous savez tout ! 

.

Prochain chapitre : Dimanche 14 février ! 


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