CHAPITRE CLVI - 364 JOURS

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Le feu. Des flammes, partout. Un véritable brasier, un enfer brûlant et étouffant. De la fumée, l'obscurité, le chaos. Sul le sol, des flaques d'un rouge sombre, des traces partout. La douleur, mais aussi la peine et, surtout, la peur. A genoux dans la cendre et la chair, l'enfant pleure. Il est seul et va mourir.

Soudain, deux mains attrapent les siennes. Puis, de grands bras, à la peau blanche et douche, le serrent doucement. Malgré la suie et la chaleur, ces bras semblent faits de porcelaine. Ils sont frais et délicats, lui font du bien. Il lui semble que, tout à coup, tout a disparu. De la douleur, la peine et la peur, il ne reste pas même le souvenir. Il n'y a plus rien. Que l'enfant et ces bras qui le serrent. Il pense qu'il est peut-être mort, accueilli dans un autre monde par une sorte d'ange. Le son qu'il entend alors ne fait que confirmer son hypothèse.

- Je suis là, ne t'en fais pas. Tu ne risques rien, tant que je suis là. Tout va bien.

Cette voix est celle d'un ange. Forte comme celle d'une mère, douce comme celle d'une enfant, charmante comme celle d'une amie. Avant même que l'enfant s'en rende compte, les grosses larmes qui coulaient sur ses joues sont séchées.

- Tu as été très courageux. Tout va bien, désormais. Je suis là.

Ses grands yeux bleus comme le ciel glacial de l'hiver, ses longs cheveux d'un blond doré, sa peau si douce et blanche. Elle est magnifique. Elle le prend par la main, le cueille comme une fleur, l'emmène avec elle. Elle le nourrit, lui offre à boire, soigne ses blessures. Mais il n'a pas faim, pas plus qu'il n'a soif ou mal. Il est bien trop occupé à la regarder. Il l'aime, il l'aime tant. Il l'aime comme une mère, comme une sœur, comme une femme.

Quand elle l'accompagne la semaine suivante à l'orphelinat, il n'a toujours pas osé lui décrocher le moindre mot. Elle le serre encore dans ses bras mais, cette fois, il s'accroche à cette étreinte. Peut-être est-ce la dernière fois qu'il la voit. Alors, avant même qu'il s'en rende compte, les grosses larmes reviennent sur ses joues. Il n'avait plus mal depuis une semaine, mais l'idée de ne jamais la revoir le détruit bien plus que le feu qui faillit le dévorer. Alors qu'elle se relève, elle voit ces larmes sur ses joues et les essuie avec un sourire.

- Ne t'en fais pas. Je serai toujours là. Tout ira bien tant que je serai avec toi.

Et tandis qu'elle commence à s'éloigner, il ne peut s'empêcher de lui crier la question qui lui brûle les lèvres depuis qu'il l'a vue.

- Êtes-vous un ange ?

Dos à lui, elle s'arrête. Le grand manteau jeté sur ses épaules laisse apparaître les caractères du mot « Justice ». Elle se retourne avec un sourire et le salue en riant.

- Non, je ne suis qu'une femme ! Mon est Ygrine. Si tu as le moindre problème, appelle-moi ! Je serai toujours là pour toi.

Et alors qu'il la regarde s'éloigner, les portes de l'orphelinat s'ouvrent.

...

Edouard se réveille en nage. Les draps blancs de son grand lit sont trempés de sa sueur, de même que sa peau. Son souffle est haletant, comme s'il vient de fuir les fantômes qui le poursuivaient. Les restes de son bras gauche, comme grignotés par les flammes de cette nuit-là, le démangent terriblement. Ses dents sont serrées comme les crocs d'un dragon furieux. Chancelant, il se lève et marche jusqu'à son bureau. Du double-fond secret de son tiroir, il tire une photographie jaunie par le temps. On l'y voit très jeune, souriant, aux côtés de sa très chère Ygrine. Elle était si belle. Son poing se crispe en même temps que sa mâchoire. Il l'aimait tant. « Comment avez-vous pu m'abandonner ? »

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant