CHAPITRE CXLIV - L'HONNEUR DU CHEF POWATH

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Jorge essuya le sang qui lui ruisselait dans les yeux et tenta, tant bien que mal, de se concentrer. « Aller, se répétait-il, tu peux le faire ! ». Depuis son combat contre Hopper, dans les catacombes du palais de la nuit, il n'était jamais parvenu à retrouver sa forme hybride. Il avait sans doute réussi à l'atteindre grâce à l'adrénaline de ce moment où il avait manqué de perdre la vie, si bien qu'il lui était impossible d'y parvenir à tête reposée. Pourtant, celle-ci lui était essentielle pour rivaliser avec Pagliacci : tout en atteignant le niveau de force d'un ours, elle lui permettait de garder sa morphologie d'homme galbé et ainsi d'être agile et rapide.

- Cavallo corsa ! s'écria le colosse en se ruant sur son adversaire.

L'Incision de Jorge lui permit d'esquiver l'assaut ennemi en bondissant sur le côté, mais Pagliacci avait prévu son coup. Avant même que Jorge ait pu reprendre ses appuis, il se rua sur lui une nouvelle fois et le percuta de plein fouet, l'écrasant contre le mur de marbre de la salle de spectacle. Jorge se releva tant bien que mal, massant ses côtés fêlées. Son vêtement était maculé de sang.

- Comment fait-il, ce foutu gorille-cheval ? maugréa-t-il. L'Incision est pourtant...

- ... si rapide qu'elle te permet de disparaître momentanément, en effet, souffla Pagliacci en s'approchant de son adversaire. Malheureusement pour toi, petit, mon fluide est suffisamment entraîné pour suivre le moindre de tes mouvements.

« Fluide » ?. Comme Haru, ce colosse avait donc la possibilité d'anticiper les actions de ses adversaires.

- Mais il me permet aussi d'être solide comme l'acier ! ajouta Pagliacci en levant ses deux bras au-dessus de sa tête. Gorilla gong !

- Metallium !

Jorge avait été suffisamment vif pour réagir et préparer ses défenses, mais cela n'était pas suffisant : les bras surpuissants de Pagliacci, recouverts du plus noir des fluides de l'armement, l'écrasèrent et le broyèrent contre le sol. Tandis qu'il hurlait de douleur, son adversaire le saisit à la gorge et le souleva pour amener son visage dans la lumière.

- Tu as une belle gueule, ça ne va pas. Le public aime la laideur et le ridicule de mes Freaks. Mais ne t'en fais pas : je vais t'arranger. Tu seras mon chef-d'œuvre.

...

Les artistes de la Supra Nostra n'en revenaient pas : eux qui étaient réputés pour leurs talents spectaculaires et leur force, suffisante pour être reconnue par les officiers de Circus eux-mêmes, ne parvenaient pas à vaincre les misérables bêtes de foire du Freak Show. Loin d'être juste ridicules, leurs bizarreries se révélaient même redoutables : la peau naturellement épaisse de Wilson le rendait aussi résistant qu'un crustacé géant, les plumes de Koo-Koo la protégeaient des attaques ennemies et les siamois Chang et Eng se battaient avec une coordination exceptionnelle.

Rosa demeurait dans l'ombre, armée d'un poignard au cas où elle aurait à se défendre, Hataro dans ses bras. Tremblant comme une feuille, le pauvre enfant semblait terrifié par la mêlée chaotique qui se déroulait sur la scène. Mais alors qu'elle était occupée à le rassurer, des clowns la repérèrent et se précipitèrent sur elle.

- Reculez ! leur cria-t-elle en pointant son poignard vers leurs visages hilares. Je n'hésiterais pas !

- Ah ! ricana l'un d'eux. Voilà que la vedette veut se battre. Mais maître Pagliacci a été très clair : on doit te garder vivante, mais on est autorisés à utiliser la force s'il le faut. Tu pourras toujours chanter avec un masque quand on t'aura refait le portrait !

Et tandis qu'ils se jetaient sur elle, Hataro sanglotant de peur, Annie les attrapa tous les trois par le col. La femme à barbe, bien que charmante et très féminine, avait également la force d'un bœuf. D'un mouvement souple du bassin et des épaules, elle les tira en arrière avant de leur balancer sa longue barbe tressée au visage. Puis, elle l'attrapa des deux mains et, à la manière d'un fouet, la fit tourbillonner pour frapper les sbires en fuite.

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant