CHAPITRE CXXVI - LA TÉNACITÉ DE KIKKAKU

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Haru et Jun hissèrent Arthur à bord du navire et il s'écroula aussitôt, haletant.

- C'est pas vrai, s'écria la vigie en regardant les multiples blessures de son camarade. Regarde dans quel état tu t'es encore mis !

- Tu peux parler ! souffla-t-il en désignant les plaies de la jeune femme d'un mouvement du menton. Je ne savais pas que les officiers du G2 étaient assez féroces pour te pousser autant à bout...

- Jody Lee, grinça-t-elle en levant les yeux au ciel. Cette peste s'est améliorée depuis la dernière fois.

- Pareil pour Charlie Blue et Kaju Da, dit Jun en déposant un pansement sur sa joue lacérée. Leroy a su exploiter leurs forces au mieux. Ils m'ont donné un de ces fils à retorde, vous n'imaginez pas !

Malgré leurs jérémiades, Arthur ne pouvait s'empêcher de sourire. Il était ravi que ses amies soient saines et sauves, mais bien plus heureux encore qu'elles ne soient pas les seules. Les survivants Powathis s'organisaient en urgence sur le pont : la plupart d'entre eux étaient blessés, même légèrement, et s'affairaient à prendre soin les uns des autres. Ils étaient sauvés.

- Tout va bien, chef ? s'écria Zell en tapant dans la main de son ami. Ravi de te voir aussi en forme.

- La bataille a été plus rude que prévue. Ce salopard de Bang s'est amusé à pourchasser les Powathis jusqu'à la dernière minute. Tout va bien de votre côté ?

- Ne t'en fais pas pour nous, répliqua l'autre en hochant doucement la tête. Je crois que quelqu'un attend de te voir...

Plus loin, sur le pont, Kegaro aidait son frère à poser une atèle à une jeune powath blessée. Dès qu'il vit Arthur arriver, le chef laissa la tâche à Mugaro et se leva pour accueillir son sauveur. Avant même que le chevalier d'or puisse dire le moindre mot, Kegaro lui tendit la main. Sur son visage, un respect profond était affiché.

- Mon peuple ne sera jamais assez reconnaissant de ce que vous avez fait pour nous, Arthur. Vous êtes notre sauveur. L'homme le plus brave et loyal que j'ai jamais connu.

- Je suis bien triste de vous voir si peu nombreux, souffla Arthur en contemplant les quelques survivants blessés. Si seulement nous avions pu en sauver plus, si seulement nous...

- Si vous ne vous étiez jamais rebellés sur notre île, l'interrompit Kegaro, nous serions sous le joug du Dragon Céleste. Croyez-moi, mon peuple préfère vivre libre.

- Mais... Et votre île ? Qu'en reste-t-il, aujourd'hui ?

- Après votre départ, le Léviathan vous a longuement cherchés en mer. Les deux Corsaires convoqués pour lui prêter main forte étaient trop puissants, ils nous ont écrasés. Quand le monstre est revenu, il nous a massacrés... La poignée de survivants que vous voyez sous vos yeux est tout ce qu'il reste. Notre île a été réduite à des ruines misérables.

Arthur le regardait tristement. Doucement, il posa sa main sur son épaule tatouée de guerrier.

- Sachez que ce navire est le vôtre autant de temps que vous le souhaiterez, Lion Rouge.

Il lui sourit.

- Et sachez que ma lame sera vôtre dès que je l'aurai récupérée. Pour l'heure, disons simplement que je vous offre ma loyauté !

Arthur acquiesça en silence. Plus loin, au centre du pont, Jane était assise en tailleur.

- Elle est plongée dans une sorte de transe, expliqua Jorge en s'approchant de son capitaine. Son combat contre Leroy l'a complètement épuisée, mais elle tire ses dernières forces pour permettre à ce navire de s'éloigner autant que possible du G2.

Les deux hommes s'approchèrent du bastingage, frappé par le vent. Ils avaient la tête dans les nuages.

- Quelle vitesse... souffla Arthur. Je n'aurais jamais cru que le fruit tempêtueux puisse nous être aussi utile. Bang disait pourtant que sa base était impossible à prendre et à quitter sans son consentement.

- On dirait bien que cet imbécile n'avait pas pris en compte de telles capacités dans l'équation ! s'esclaffa Jorge en tapant sur l'épaule de son ami.

Arthur lui répondit par un grand sourire. Il avait l'intime conviction que ce sauvetage, aussi chaotique qu'il fut, avait rendu justice à Myr et Lola. Cette première victoire contre les forces d'Edouard avait permis la survie de bon nombre d'innocents. Mais tandis qu'il observait les visages des différents survivants, une absence jusque-là ignorée lui sauta au visage. Il courut jusqu'au chef powath, craignant le pire. Il devait savoir.

- Kegaro, rassurez-moi : votre fils va bien ? Est-il en sécurité ?

L'ombre de la colère traversa le visage crispé du père lorsqu'il se remémora, furieux, l'expression de Bang lorsqu'il lui avait arraché Hataro. Il n'avait pas eu le temps de conclure son duel contre cet ignoble salopard, mais le ferai à la première occasion. Pour l'heure, il n'avait qu'une préoccupation : récupérer son fils des mains de son ravisseur. Par chance, ses géôliers étaient de bien cruels tortionnaires, qui avaient pris un malin plaisir à le provoquer : « Ton sauvage de fils a été acheté par le clown dansant, mon pauvre gars ! S'il ne le met pas en charpie, peut-être en fera-t-il un esclave ? ». Il aurait aimé arracher la vérité à Bang du bout de sa lame, le faire parler et lui trancher la langue. Il n'en avait pas eu le temps, mais ce n'était que partie remise. Alors qu'il allait répondre à son nouvel allié, Haru arriva en hurlant.

- Arthur ! s'écria-t-elle en pointant les nuages du doigt. Nous sommes poursuivis !

Le jeune capitaine accourut au bastingage, le Lion Rouge sur les talons. Derrière eux, lancé à pleine vitesse comme un ange de glaise, Leroy battait des ailes pour les rattraper. Tandis qu'il dégainait son épée, le capitaine donna ses ordres à ses hommes :

- Zell, Jorge, foncez à la barre. Même si les vents de Jane permettent de maintenir le navire en suspension, elle aura besoin de vos manœuvres pour assurer sa meilleure conduite.

Ils acquiescèrent en vitesse et disparurent, tandis qu'Arthur continuait de préparer son équipage.

- Kegaro, Mugaro, préparez vos hommes à un éventuel abordage ennemi. Leroy est surpuissant, mais il est seul. Si nous l'attaquons tous ensemble, nous pourrons peut-être le chasser du navire. Haru et Jun, avec moi : nous allons tenter de retarder son abordage avec des attaques de longue portée.

Et tandis que les trois anciens soldats se rassemblaient sur le bastingage, Leroy continuait de gagner du terrain. Il s'éleva dans le ciel, les mâchoires crispées de fureur, et invoqua d'un mouvement de la main un millier de lances de glaises, qui durcirent aussitôt pour devenir aussi tranchantes que des lames. Et tandis qu'il les projetaient sur ses jeunes ennemis, Arthur dressa son épée devant lui.

- Préparez-vous ! cria-t-il à ses deux camarades. 

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant