CHAPITRE CI - CRISE

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L'ouverture de l'enveloppe et la lecture de la lettre, de ces caractères en pattes de mouche que Myr avait tracés quelques heures avant sa mort, marquèrent une rupture nette dans la vie d'Arthur. Jamais aucun événement n'avait autant bouleversé son monde, comme si ces révélations étaient une comète brûlante télescopant sa petite planète intérieure.

Lui qui s'était toujours cru orphelin connaissait désormais l'identité de ses deux parents, des figures mondialement connues pour leur puissance quasiment divine et leurs positions politiquement controversées. Lui qui n'avait jamais pu expliquer l'origine de son épée et des sigles qui la recouvraient savait désormais qu'il s'agissait du cadeau d'adieu de sa défunte mère et de la dernière manifestation de ses pouvoirs. Lui qui avait toujours vu en l'amiral Kuroryu un modèle à suivre devait à présent le considérer comme un ennemi mortel. Lui qui avait toujours vu le vice-amiral comme un père de substitution le savait désormais oncle.

Ces simples considérations donnaient à Arthur le vertige. Il n'en dormait plus la nuit, n'en vivait plus le jour. Peck se posait parfois sur son épaule à la recherche d'affection sans obtenir la moindre attention. Ses amis cherchaient à le réconforter mais ne parvenaient pas à lui décrocher le moindre mot.

Sa mère était morte. Son oncle était mort. Son père était un pirate mondialement recherché. Son héros était un tueur.

Que devait-il penser de cela, d'ailleurs ? Le seul argument de Myr était une prémonition, mais quelle preuve concrète avait-il de la culpabilité d'Edouard ? Parfois, Arthur serrait le poing. Il en voulait à Myr de ne jamais lui avoir parlé de tout cela, de l'avoir abandonné avec si peu d'informations, en lui demandant de se fier à son seul jugement. Arthur était plein de colère. Puis, il se souvenait des entraînements avec son mentor, de la force qu'il lui avait donnée. Des repas passer avec lui, interrompus par des éclats de rire terribles. De toutes les fois où il l'avait protégé. Alors, le cœur d'Arthur abandonnait toute colère et se serrait de désespoir. Il lui manquait tellement...

...

Un soir, alors qu'il s'était isolé, Arthur observa les étoiles. Tous ces morts y étaient-ils cachés, quelque part ? Les mains dans les poches, adossé à un muret de pierre, il pouvait encore sentir la fumée de l'explosion. Son regard se tourna instinctivement vers la haute tour principale, ou du moins ce qu'il en restait. Elle était déjà en rénovation. Il avait l'impression que le fantôme de Myr tourbillonnait dans les airs, à ses côtés. Alors qu'il était tout entier absorbé par sa rêverie, son index rencontra dans sa poche un petit objet métallique. Une clef d'argent.

Leroy avait confié les clefs du bureau de Myr à ses élèves orphelins. Il en existait trois, que le vice-amiral avait confié à Arthur, Zell et Haru. Alors qu'Arthur la faisait tourner dans sa main, il lui prit l'envie d'aller y faire un tour, de farfouiller le bureau, d'y passer un moment seul, avec l'esprit de son maître.

Il gravit quatre à quatre les marches de la tour Sud, dont seule la façade avait subi les dégâts de la déflagration, et glissa la petite clef dans la serrure. Etrangement, celle-ci n'opposa presque aucune résistance. Aussitôt, Arthur comprit que la porte était ouverte et en approcha son oreille. Des voix. De sa main droite, il tira Excalibur hors de son fourreau et de sa main gauche, il poussa la porte de toutes ses forces.

A l'intérieur, ses cinq camarades se tournèrent vers lui, Jorge et Lola bondissant de surprise. Ils restèrent là, tous les six, à se regarder quelques secondes, en silence. Puis, ils éclatèrent de rire. Un rire si libérateur, si bon qu'il leur tira les larmes. Comment Arthur avait-il pu s'isoler, prendre ses distances de gens si merveilleux. Sa mère n'était plus depuis de nombreuses années, il venait de perdre son oncle. Pour autant, sa famille était loin d'être détruite : elle était là, sous ses yeux.

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant