CHAPITRE LXXXII - LE VER

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Zell commençait à s'essouffler. Son torse se soulevait avec difficulté sous sa chemise humide, trempée de sa sueur et tâchée de son sang. Sur les tatouages qui ornaient ses bras, des gouttelettes d'un rouge sombre coulaient lentement. Ses dreadlocks lui tombaient sur le front, lui brouillant la vue.

- Putain... soufflait-il entre deux inspirations. Ça n'en finit jamais...

Sous les charpentes de la chapelle, au-dessus du jeune soldat, Mothra voletait avec grâce. Autour de lui, une nuée sombre vrombissait, mille pétales noirs tourbillonnant. Lorsque Zell s'était jeté sur son adversaire, le nuage de pétales noirs en avait pris la défense. La peau métissée de Zell avait été tailladée, déchirée, et il s'était souvenu du tourbillon similaire créé par Hana. Une chose était cependant différente : il ne s'agissait pas là de papier, mais de terribles insectes. Des papillons, par centaines, par milliers. Leurs ailes vrombissantes, leurs mandibules grinçant furieusement, prêtes à défendre leur maître.

Zell essuya son front tailladé d'un revers de la main.

- Tu reconnais ces entailles, mon cher ami ? susurra Mothra.

- Cette vieille pourriture de Tollpatsch avait les mêmes, le soir où il a été attaqué à Bourg-en-Brume. Pas besoin de te demander si c'était toi, je le sais déjà. Je l'ai su dès que je t'ai vu.

Mothra caressa doucement son visage et se contorsionna étrangement. Un petit rire s'échappa de sa fine bouche.

- Quelle perspicacité. Tollpatsch était un idiot : nous avions offert d'épargner sa vie en échange de son silence, mais cet ignoble imbécile a paniqué en vous voyant débarquer dans son patelin. Nous n'avons pas eu d'autres choix que de l'éliminer.

Un papillon vint alors se poser sur sa paupière gauche, recouvrant son œil de ses grandes ailes noires.

- Ces merveilles sont des Karuka, originaires de l'extrémité de South Blue. Mon amie Stinger parvient à les rendre voraces en injectant une toxine dans leur cocon : une fois arrivés à maturation, ils se délectent du sang de leurs proies. Si tu ne fais pas attention, ils vont aspirer celui qui coule dans ton corps jusqu'à la dernière goutte.

Le visage de Zell se renfrogna soudain.

- J'ai vaincu des pirates par dizaines, pauvre minable, et tu seras le prochain. C'est pas quelques insectes qui vont me faire la peau, je suis plus coriace que ça.

Mothra laissa alors échapper un éclat de rire terrible qui glaça le sang du charpentier. Un rire de damné.

- Si seulement il pouvait en être ainsi, mon ami ! Je ne peux être vaincu. Chargé par ma maîtresse de parcourir le monde à la recherche de proies, je les capture et les ramène, accompagné de ma nuée. Je suis l'ombre dans la nuit, je suis le cauchemar des femmes.

A mesure que les mots sortaient de sa bouche, son corps se tordait pour laisser apparaître des traits monstrueux. Sa voix, devenue discordante, terrifiante, raisonnait contre les murs froids de la chapelle. Ses grandes ailes se déployaient dans son dos.

En assistant à cette transformation complète, Zell leva ses ciseaux devant son visage tuméfié. Il n'était plus face à un homme, mais à une bête terrible et cauchemardesque. Mais Zell n'en avait que faire. S'il avait été face à une armée sanguinaire, à un titan ou à un dragon, les choses n'auraient pas été différentes : ce monstre avait enlevé Haru, lui avait fait du mal. Le charpentier était prêt. Il en allait de son honneur de faire la peau à cet ennemi.

...

Jorge était misérablement assis contre la paroi rocheuse. Essoufflé, un filet de sang ruisselant sur sa paupière gauche, il observait Hopper. Le pirate ne bougeait plus. Le visage écrasé contre la roche, sa combinaison de combat détruite, ses yeux révulsés gardant le spectre de sa terreur. La terreur qu'il avait eu lorsqu'il avait aperçu le visage de Jorge avant que celui-ci n'en vienne à bout. Jorge ferma les yeux un instant, et sans qu'il puisse le réprimer, un léger sourire se dessina sur son visage épuisé. Il avait gagné.

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant