CHAPITRE XXXVI - LA FORTERESSE EN FLAMMES

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Le feu avait pris dans la chambre du Bélier, au premier étage de Fort-Tempêtes. Les tissus, rideaux et vêtements s'étaient embrasés, et les flammes avaient ensuite attaqué le squelette de bois de la tour. Une épaisse fumée, noire et suffocante, avait commencé à remplir le grand escalier en colimaçon.

C'est par des cris d'enfant qu'Ariès fut réveillé :

- Réveille-toi, tonton Ariès ! Aller, debout !

Le styliste était pris de vertige. Il voyait double et sa tête le faisait horriblement souffrir.

- Gémi ? Où suis-je ?

- Tu es dans les archives, tonton. Les soldats nous ont battus, on s'est réveillés là avec Mini. T'était allongé à côté de nous.

- Oh, je vois... C'est sans doute ce gros ours qui...

- Il faut y aller tonton, regarde ! s'écria Mini, en écho à son frère. La tour est en feu !

En voyant l'épaisse fumée qui remplissait la chambre, et la porte de bois qui laissait transparaître une lueur rougeoyante, Ariès laissa échapper un cri strident. Saisissant les deux enfants dans ses bras, il courut aussi vite qu'il pu vers les étages supérieurs.

...

Pisces était très sensible à la chaleur, comme tous les hommes-poissons, qui aimaient se tapir dans les fonds marins, à l'abri de la lumière. Il pouvait donc percevoir la moindre augmentation de température, et dès que celle-ci dépassait les quinze degrés, il était profondément mal à l'aise. Hélio avait d'ailleurs aménagé son dojo, au douzième étage, afin d'en faire la chambre la plus fraiche de Fort-Tempêtes.

Mais cette nuit-là, Pisces avait chaud. Trop chaud. Ajoutant à cela l'odeur de brûlé qui commençait à emplir l'atmosphère, et que son odorat de requin lui permettait de sentir, il se douta que quelque chose n'allait pas. Tandis que Hélio et Taurus s'entretenaient avec Myr, qui était en mauvaise posture, Pisces s'approcha de la fenêtre qu'il ouvrit en grand. Dehors, le vent était toujours aussi violent, et les vagues déchaînées, mais la pluie s'était arrêtée. Il ne le vit pas tout de suite, mais il le sentit.

Le feu.

En baissant les yeux, il vit que la tour était dévorée par les flammes, des flammes qui remontaient à vive allure et risquaient de brûler vifs ses camarades. En se tournant vers Hélio, il vit que celui-ci le regardait.

- Cette odeur de feu... Il n'y a rien à plusieurs kilomètres à la ronde, ça ne peut venir que de chez nous.

- Oui. La base de la tour a pris feu, ça semble venir de la chambre d'Ariès.

- J'espère qu'il va bien, répondit Hélio en fermant les yeux. Tu sais ce que tu as à faire, Pisces. Sois prudent.

L'homme-poisson acquiesça, et monta sur le reborde de la fenêtre. D'un bond, il se jeta dans les airs, virevolta avec aisance, tourbillonnant comme un athlète gracieux. Lorsqu'il percuta l'onde agitée, il se sentit véritablement chez lui : la mer était son royaume, c'était dans l'eau qu'il pouvait révéler son plein potentiel. A travers la fine pellicule aqueuse, il pouvait voir la lumière chaude des flammes, éclatante.

De ses deux mains, il brassa l'eau de mer, comme s'il cherchait à la saisir. D'un mouvement du bassin, il projeta vers l'avant une onde si puissante qu'elle créa un fracas assourdissant en croisant les vagues :

- Cœur d'eau vive : projection !

La colonne d'eau projetée par Pisces, régulière et tourbillonnante, vint se jeter contre la tour en flammes. Le torrent se fracassa contre le bois, inondant les premiers étages, noyant les flammes, aussi ardentes soient elles. Lorsque Pisces remonta à la surface, il fut accueilli par des applaudissements. En remontant la tête, il aperçut Ariès et les jumeaux, éclatants de bonheur.

- Bravo Pisces ! criait Gémi.

- T'es le meilleur ! ajoutait Mini.

Pisces ne put s'empêcher de sourire. Il adorait cet équipage, estimait les plus forts et chérissait les plus faibles. Ils étaient devenus sa famille, la meilleure qui soit.

- Remontez à l'étage ! leur ordonna-t-il. Les premiers étages ne sont pas sûrs, car l'incendie pourrait repartir de plus belle.

Les trois pirates acquiescèrent et se retirèrent de la fenêtre. Tandis qu'ils remontaient vers la quatrième chambre, ils aperçurent Cancer et Léo. Ils étaient accompagnés de Soles, le fils de leur Dieu, mais aussi de quelques otages.

- Oh ! C'est... commença Gémi.

- ... la petite demoiselle, termina Mini.

- Et il y a ce gros ours aussi. Ah ! Vous vous êtes fait avoir, finalement ! jubila Ariès.

Jun et Jorge, bâillonnés, ne purent que constater en silence que les ennemis qu'ils avaient défaits étaient de retour. Attachées dans leur dos, Emmy et Igana demeuraient évanouies.

- Nous descendons préparer le navire, déclara Soles. Père veut que nous partions au plus vite. Léo et Cancer vont m'escorter, alors vous n'avez qu'à aller prêter main-forte aux autres. Il y a au moins quatre autres soldats plus haut.

- Très bien, jeune maître, répondit poliment Ariès. Pisces est déjà en bas, il vous aidera à préparer le navire.

Et tandis qu'Ariès et les Gémini remontaient, le second groupe descendit au rez-de-chaussée. Derrière la tour, dans une grotte à l'abri du vent, un gigantesque navire était dissimulé. Sa coque, sublime, était peinte d'un bleu nuit et constellée de dorures. Les voiles, quant à elle, laissaient apparaître le pavillon de l'équipage : une gigantesque étoile à douze branches, au centre de laquelle apparaissait le symbole du soleil.

- Chers otages, voici le Cosmos, notre navire amiral. Dès que le reste de l'équipage sera prêt, nous ferons voiles vers notre destination, déclara Soles. Vous n'êtes pas contre le fait de rester un peu en notre compagnie, n'est-ce pas ?

Jun ne pouvait lui répondre, mais elle bouillait intérieurement de rage. Dès lors que ses liens lui seraient retirés, elle fondrait sur lui pour le réduire en morceaux. Bien sûr, il s'était emparé de son set de couteaux, et les menottes de Jorge étaient faites de granit marin, un matériau qui, comme la mer dont il provenait, pouvait neutraliser les pouvoirs des fruits du démon. Impossible donc pour son camarade de se transformer.

A bord du navire, un gigantesque homme-poisson s'afférait déjà à descendre les voiles.

- Oh, Pisces ! Te voilà. Je n'ai pas eu la chance de revoir depuis mon retour ! s'écria Soles.
- Jeune maître, vous êtes donc bien rentré, répondit Pisces en s'agenouillant. J'ai fait le nécessaire, nous pourrons partir dès que les autres seront là.

- Parfait.

Soles leva les yeux vers la tour, qui fumait encore légèrement.

- Ils devraient être là bientôt, dès qu'ils se seront occupés des ennemis restants.

Doucement, Cancer lui tapa sur l'épaule.

- Je ne sais pas si les choses vont être aussi simples, jeune maître.

Soles regarda dans la direction que son camarade lui désignait du doigt, et Jorge ne pu retenir un cri étouffé. A l'horizon, quatre pavillons de la Marine commençaient à apparaître dans la nuit. 

MARINES - A ONE PIECE story (FRENCH) - Partie IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant