20. Le prix des larmes

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Cette nuit-là, Kilian fut consigné à l'infirmerie et Aaron reçut l'autorisation de dormir avec lui. Basile ne savait tout bonnement pas quoi faire. La situation lui semblait encore plus tendue que l'an passé. Et cette fois-ci, les moniteurs ne pouvaient nier leur part de culpabilité. Mais comme le directeur ne pouvait pas se punir lui-même, ce fut José qui fut immédiatement mis à pied et désigné par l'ensemble du groupe pour porter toute la responsabilité des évènements successifs de la veille. Ainsi, l'incident fut considéré comme clos et la vie put reprendre son cours normal dans le camp Sport & Fun. On était mercredi matin et il ne restait plus que quelques jours à tenir avant d'enfin renvoyer tous ces jeunes monstres dans leurs familles.

Toujours secoué à cause de sa sortie mémorable dont il avait du mal à se souvenir les détails, Kilian demanda à rester dans le bungalow G4 après le petit déjeuner au lieu de s'amuser dans le camp, et ce afin d'être parfaitement en forme pour l'activité prévue pour l'après-midi, la fameuse via ferrata, sorte d'accrobranches entre les arbres et les cailloux qu'il affectionnait particulièrement. Cette faveur lui fut immédiatement accordée. Mieux valait un blondinet seul en train de glander dans son lit qu'à poil au milieu du réfectoire criant à tue-tête que le camp entier voulait lui passer sur le corps. Ce qui, de l'avis général, était une analyse un peu disproportionnée de sa part. À tout casser, à peine dix pourcents des présents se seraient portés volontaires pour pareille entreprise, si les circonstances avaient été plus favorables.

Kilian resta donc dans sa chambre à lire les mangas qui trainaient au fond de son sac et à jouer sur son téléphone. Rapidement, il se mit à regarder les photos que ce dernier comportait et qui représentaient la majorité de ses plus beaux souvenirs de troisième. Certaines images le firent sourire, surtout les plus ridicules, d'autres lui rappelèrent les moments intenses passés en compagnie d'Aaron, présent sur presque toutes. En y repensant, il dut bien admettre que son comportement était peut-être un peu excessif, à toujours surréagir, bouder et chialer comme s'il était encore en primaire. Pourtant, ce qui restait en mémoire, c'étaient les bons moments, les sorties, les blagues, les petites bêtises, les baisers et autres flirts propres à l'adolescence. Il se souvenait parfaitement de tous les jours passés en compagnie d'Aaron, à se bouffer le nez au début, puis main dans la main à la sortie du collège ensuite. En fait, il avait tout pour être heureux, il lui restait juste à s'en rendre compte, et surtout, à l'accepter. Le malheur avait beau avoir souvent frappé à sa porte, le bonheur finissait toujours par rentrer. Et il n'y avait aucune raison pour que cet état de fait ne change. Pour oublier les mauvais souvenirs, il lui suffisait de s'en créer des bons, et pour ça, il avait la vie devant lui, à commencer par le lycée qui approchait. Il le réalisait enfin.

Ce petit moment avec lui-même lui fit le plus grand bien. Sur les coups des onze heures, il se jeta hors de son lit et entreprit, tout sourire, un petit décrassage composé d'une série d'abdominaux suivie d'une de pompes, sans oublier les flexions qu'il pouvait faire en s'accrochant à une des poutres apparentes qui formaient la structure de la chambre. Il était fin prêt à retrouver les autres et avait juste le temps de piquer une tête dans le bassin avant le repas du midi. Pour gagner du temps, il jeta son t-shirt et son futal dans son grand sac à roulettes puis enfila son short de bain moulant, celui qu'il gardait pour le sport et qu'il n'avait pas encore utilisé des vacances, à la différence du large bermuda type surfeur qu'il ne quittait jamais dès qu'une activité aquatique récréative pointait le bout de son nez.

« Ça te va bien, ça fait ressortir ton p'tit cul de pédale... Mais tu sais, t'étais pas obligé de le mettre. D'ailleurs, tu vas l'enlever tout de suite ! Après tout, t'aimes ça, montrer ta bite, non ? Hier j'étais un peu loin, j'ai pas tout vu ! Allez, fais pas ta précieuse, moi aussi j'veux profiter du spectacle ! »

Ce qu'il voulaitDär berättelser lever. Upptäck nu