13. Vélo, rando et nœud au cerveau

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Le lendemain matin, Kilian n'attendit pas que son chocolat chaud refroidisse pour montrer sa détermination. Son petit déjeuner, il le passa intégralement assis à la même table qu'Alia la rayonnante. Le plus vexé de voir le blondinet dragouiller ferme, ce fut Arthur. Le jeune adolescent aux cheveux carotte n'appréciait pas vraiment que son camarade s'affiche ainsi. C'était presque indécent et, surtout, ce n'était pas sympa pour les copains, surtout quand ces derniers devaient se coltiner Julien et sa connerie ambulante. Toujours aussi gauche, le garçon réalisa l'exploit de renverser la carafe de jus d'orange sur les genoux de Guillaume et ne trouva rien de mieux à faire que de se cacher derrière ce pauvre Arthur qui se prit dans la tronche toutes les insultes du monde de manière parfaitement injuste.

Aaron, lui, avait choisi le jus de pomme, ce qui s'accordait parfaitement avec l'odeur de son eau de toilette préférée, celle aux arômes marqués de fruits du verger et de cannelle. Ce matin-là, Lucas lui demanda s'il avait fait exprès de se renverser la bouteille sur la tête ou si c'était juste l'escarmouche de la veille avec Kilian qui lui avait fait perdre le sens commun.

Plutôt que de répondre, le vacancier avala à grandes gorgées le contenu de son verre, sans pour autant quitter du regard son cher blondinet. À ses yeux verts pétillants, on aurait pu dire que l'incident derrière les douches n'avait jamais eu lieu. Avec son sourire charmeur, ses expressions adorables et son air de petit mec beau gosse mais quand même gentil, Kilian était aussi lumineux que ses cheveux quand le soleil se reflétait dans ses multiples mèches. Entouré de tout ce que Sport & Fun avait de plus féminin, il se sentait comme un poisson dans l'eau. « Parce que c'est une tapette », expliqua Guillaume. « Parce qu'il a un charme de malade et que, s'il le voulait, elles seraient toutes à ses pieds », rétorqua simplement Aaron.

Pourtant, bien que son plan semblât marcher à la perfection, le brunet n'arrivait pas à trouver la situation agréable. L'attitude désinvolte de son angelot l'énervait. Il voulait que Kilian se libère, pas qu'il joue un rôle pour faire genre. Et ce qui acheva de le crisper fut la petite phrase discrète que son amoureux lui glissa à l'heure du déjeuner, après une matinée passée à trainer avec la demoiselle et avant l'après-midi consacrée à la promenade en VTT.

« Tu veux que je me rapproche d'une fille ? Mange ! Et comme je le fais, tu dois le faire aussi ! C'est le deal, chouchou... »

Il n'en fallait pas plus à Aaron pour prendre la mouche. Si Kilian voulait frimer en faisant le pitre sur un vélo, il venait de trouver son rival. Et s'il tenait tant que cela à recevoir une leçon de drague, alors il venait de trouver son maitre. Le garçon aux cheveux foncés allait montrer à celui qui les avait jaunes comme le soleil comment un adolescent doit s'y prendre pour charmer les femmes. Mais pour rajouter un peu de piment à cette après-midi d'été presque caniculaire, Aaron se détourna des cibles trop faciles et jeta son dévolu de manière subtile sur la seule fille qui avait réussi, depuis le début du camp, à apprivoiser son petit lionceau. Alia.

Courtisée par les deux garçons, qui accumulaient les gestes de galanterie, les petits mots mignons, les sourires et les marques d'humour, Alia ne savait plus où donner de la tête. Bien entendu, c'était sur le blondinet qu'elle avait immédiatement flashé, mais ce jeune brun ténébreux était tellement... avenant, charmeur, marrant, beau et désirable – il n'était pas le héros d'un roman pour gonzesses en manque d'amour, il était encore mieux que ça –, qu'entre les deux, son cœur chavirait. Et quand Aaron réussit à lui déposer une légère bise sur la joue, elle dut quand même admettre qu'elle n'aurait pas été contre se faire embrasser une autre partie de son visage. Lorsque, sur son vélo tout terrain, Kilian vit à quel point Aaron avait réussi à le rattraper et même à le dépasser dans leur course à la minette en même pas deux heures d'effort, alors que lui y avait passé toute la matinée sans le moindre résultat, il eut comme seul réflexe de rejoindre l'arrière du peloton, celui des laissés pour compte, des parias et autres boulets incapables de tenir le rythme. De cette manière, même si sa place légitime était aux avant-postes, il avait le sentiment de s'infliger une punition méritée. Il ne savait pas avec exactitude pourquoi il devait être puni, mais il avait la ferme impression que c'était tout à fait naturel. Alors, tout en tripotant toutes les cinq minutes son collier, comme si ce geste le rassurait et l'apaisait, il passa le reste de la promenade à encourager ce pauvre blond de Julien qui galérait comme un rat mort et à soutenir Arthur, qui après deux chutes stupides, avait décidé d'aller à son rythme. Ce petit trio fut particulièrement remarqué par les autres adolescents et par José, le moniteur, qui n'en pouvait plus de faire des pauses tous les cinq cents mètres pour les attendre.

Ce qu'il voulaitWhere stories live. Discover now