Thomas Shelby » Peaky Blinders

▬ Chapitre 70 : 1916.

   9 novembre 1916, 21h32.

   Bataille de la Somme, France.

   Hôpital de la brigade St. John.

   Ils ont fini par rentrer à l'hôpital. Dans le couloir qui mène jusqu'à l'échelle pour accéder au grenier, ils ont croisé Karishma qui leur a dit qu'un repas du soir avait été mis de côté pour eux.

   Alma n'avait pas faim - si elle repense encore une fois au fromage, elle va avoir le mal de mer -, mais Tommy a remercié Karishma et a disparu dans la cuisine l'espace d'un instant pour revenir avec un petit baluchon de provisions.

- Tu vas vraiment manger tout ça? lui demande-t-elle une fois la porte du grenier refermée derrière eux. 

- Peut-être plus tard, répond-il en posant le tout sur la chaise.

   Elle hoche la tête. Oui, il est vrai que s'ils ont mangé pour la dernière fois en fin d'après-midi, ils auront sûrement à nouveau un petit creux d'ici une ou deux heures. Karishma a eu une bonne idée, en leur préparant ça. La prochaine fois qu'un des jours de congé d'Alma tombera lorsque Karishma travaillera, elle lui préparera un petit quelque chose pour l'heure du thé - non, l'heure de la tisane, plutôt. Cela fait des mois qu'ils n'ont pas vu l'ombre de la moindre feuille de thé, à l'hôpital, alors il faudra se contenter de camomille, ou de quelque chose de cet ordre. Alma ne s'y connaît pas trop, en tisanes - en thé, déjà beaucoup plus, mais en tisanes, elle...

- Tout va bien?

   La voix de Tommy la fait revenir à la réalité. Alma se tient toujours encore debout près de la porte, remarquant seulement maintenant qu'elle est en train de jouer nerveusement avec ses doigts devant elle. A l'autre bout de la pièce, Thomas Shelby s'est assis sur le bord du lit et attend sa réponse avec un haussement de sourcil intrigué. Sans qu'elle ne s'en aperçoive, il a allumé une lampe à gaz, posée sur le sol, de façon à ce que la pièce soit plongée dans un nuancier jaune pâle.

- Dans la mesure où je ne me suis toujours pas remise de ta trahison, annonce-t-elle en se dirigeant vers lui tout en défaisant le collier de perles qu'elle porte autour du cou, non, tout ne va pas bien.

- Ciel. (Au moment où Alma passe devant lui pour poser le collier sur la chaise à côté des denrées alimentaires, elle sent sa main se glisser sur le bas de sa cuisse, se perdant au-dessus du tissus léger de sa robe de mariage.) Ne me dis pas qu'il est encore question du fromage.

- Ce n'est pas une question de fromage, rétorque-t-elle en se tournant pour lui faire face, mais de confiance. Je te faisais confiance, tu m'as laissée manger quelque chose de moisi sans m'en empêcher.

   Sans lâcher sa jambe, il lève un peu le menton pour pouvoir la regarder dans les yeux. Alma pose une main sur son épaule puis, trouvant ce geste un peu trop... militaire, la remonte sur le bas de son visage - sa clavicule, la base de son cou, la naissance de sa mâchoire. 

- Rappelle-moi ta date de naissance, Alma, veux-tu?

- Quoi, tu l'as déjà oubliée? fait-elle mine de s'indigner, sachant pertinemment qu'il n'est pas possible d'oublier un anniversaire aussi simple que le sien.

- Quelque part en janvier, ou bien? Le 24? 15? 8?

- C'est le même chiffre que le nombre de personnes qui dormiront dans ce lit cette nuit si tu continues comme ça.

- Aïe - (Il sourit, un sourire qu'Alma a envie de graver sur l'intérieur de ses paupières pour l'avoir toujours à un clin d'œil d'elle.) - il faut que je fasse attention à ce que je dis, là.